Deux exemples parmi d’autres. En Belgique, après d’autres péripéties, le météorologue Luc Trullemans, future tête de liste aux élections européennes pour le Parti populaire, a publié dernièrement sur sa page Facebook une lettre d’un « bon ami suisse », adressée à « tous nos amis Tunisiens, Algériens, Marocains, Égyptiens, Libyens et tous les autres ». Une lettre dans laquelle l'auteur imagine que ses « amis » quittent la Belgique pour retourner dans leur pays, et que cela rend les Belges tristes. De l’humour bien sûr.
En France, un grand humoriste – Dieudonné pour ne pas le noter – s’est exprimé à propos du journaliste Patrick Cohen (qui a mis l’humoriste sur une liste noire) : « Moi, tu vois, quand je l'entends parler, Patrick Cohen, je me dis, tu vois, les chambres à gaz... Dommage ! ». De l’humour bien sûr.
Le grand argument des défenseurs de ces "humoristes" est qu’on peut rire de tout… et de tous. Je suis assez d’accord avec cette idée. Pour autant que ce ne soit que de l’humour. L’humour, c’est – ce devrait toujours être – la contraction de deux mots : « amour humain ». On peut « se moquer » de quelqu’un qui est devant soi et qu’on aime. On ne peut pas « se moquer » de quelqu’un qui n’est pas là et qu’on n’aime pas. Ça, ça s’appelle de la diffamation ou de la stigmatisation. Pour ne pas utiliser d’autres mots dont je n’aurais moi-même pas le contrôle.
Non, on ne peut pas dire n’importe quoi sous prétexte que ce serait de l’humour. Non, l’humour – pour autant que c’en soit – n’excuse pas tout. D’autant plus que cet « humour » semble aller toujours dans le même sens : celui d’exclure, de nier ou de stigmatiser l’une ou l’autre partie de l’humanité sur la base de critères liés à la nationalité, à la religion, à la langue, au genre…
L’humour n’est souvent devenu aujourd’hui que le plaisir de glisser une peau de banane sous les pas de certaines communautés. Il est bien sûr toujours amusant de voir quelqu’un « se casser la figure » pour l’une ou l’autre raison dans un contexte naturel. Lorsque ce contexte est construit, lorsque la peau de banane n’est là que pour mettre la « victime » dans une situation difficile dont tout le monde devrait rire, ce n’est plus de l’humour.
Au bout du compte, on n’a jamais que l’humour qu’on mérite. À méditer !