Projet Foyers améliorés: la santé des dolotières et la protection de l'environnement comme leitmotiv

Publié le 24 décembre 2013 par Kafando @KAFANDORAPHAEL

L’Organisation néerlandaise de développement(SNV) a lancé un projet dénommé Foyers améliorés dolo dans la Boucle du Mouhoun. Cette initiative cherche à rendre environnementalement durable la transformation du dolo et à accroître les revenus des dolotières. Pour faciliter l’appropriation du projet par les populations locales, la SNV a organisé les 5 et 6 décembre 2013, des ateliers de concertations entre dolotières et maçons d’une part et entre les élus locaux, les services de l’environnement et l’ONG néerlandaise d’autre part.


Le responsable du projet foyer amélioré dolo de la SNV, Sylvain Thiombiano en train de contrôler un FA.

Madeleine Drabo est dolotière à Tougan dans la province du Sourou depuis 2002. La soixantaine bien sonnée, c’est avec enthousiasme qu’elle parle du Foyer amélioré(FA) dolo introduit dans sa localité par l’Organisation néerlandaise de développement(SNV). « Avant, nous utilisions au moins trois voyages de charrettes remplis de bois, maintenant avec deux voyages cela suffit largement. Je précise que le voyage coûte au moins 4000F », dit-elle. C’est donc sans détour, qu’elle annonce qu’elle va changer tous ses foyers traditionnels. Elle reconnaît qu’avec l’utilisation des foyers traditionnels, les dolotières avaient beaucoup de problèmes de santé et qu’elles étaient exposées aux brûlures. Ces dires sont corroborés par le Dr Mahamady Yarbanga du district sanitaire de Tougan qui affirment que les femmes et les jeunes enfants, sont souvent exposés à de fortes émanations de fumée de cuisson, à des taux bien supérieurs à ceux considérés comme sans danger par l’Organisation mondiale de la santé(OMS). Pour lui, l’exposition prolongée aux composants toxiques dégagés par la fumée est néfaste pour le système respiratoire, les yeux et le système immunitaire, et elle fragilise l’organisme face aux infections et aux maladies. « Cette situation peut donc entraîner la tuberculose, des infections respiratoires aiguës, des maladies pulmonaires obstructives chroniques et le cancer du poumon. Associée à l’asthme, elle peut provoquer la cécité ou l’anémie, et des issues défavorables de la grossesse », soutient le Dr Yarbanga.

Plus de 1000 l de dolo produit par jour

Par ailleurs, les dolotières sont conscientes que les FA de la SNV les aident à protéger l’environnement.

A droite un FA traditionnel consommant énormément du bois et à gauche un FA SNV réduisant la consommation d’énergie

C’est le cas de Honorine Ki de la ville de Tougan. En effet, cette femme qui travaille avec sa mère possède l’un des cabarets les plus impressionnants de la ville. Elle emploie près d’une cinquantaine de femmes et produit plus de 1000l de dolo par jour. « Avec les FA de la SNV, nous économisons du bois car une charrettée prend près de 50% de nos dépenses. Les FA nous aident à conserver notre santé et les ressources naturelles », déclare-t-elle. Ce que ne dément pas, l’agent des Eaux et forêts de la localité, Mohamed Camara. Il est très inquiet de l’allure que prend la déforestation dans la zone. Le pire, dit-il c’est le fait que les dolotières s’attaquent à des espèces protégées tels que le néré et le karité. Il espère que toutes les dolotières adopteront cette nouvelle technologie qui, à son avis, aidera à réduire la coupe abusive du bois. En termes d’emplois, le projet foyers améliorés dolo a permis de former 15 maçons à Tougan et 16 à Toma qui sont chargés de construire les FA. Pour Gaoussou Ki, maçon de la SNV à Tougan, le marché est porteur. Il a construit pour l’instant, deux FA et il a déjà une dizaine de demande de FA. Même son de cloche pour Isidore de Toma. « Après les concertations avec les dolotières le 6 décembre, nous allons construire le foyer à 12 500FCFA minimum. Chaque brique coûte 25F, le total fait 5000F et le maçon à 7500F. Nous sommes certains que cela va nous permettre de mieux nourrir nos familles », indique-t-il. Quand aux autorités locales, elles accueillent le projet avec beaucoup d’espoir. Le maire de la commune de Toma dans la province du Nayala, Bonaventure Toé est convaincu que le projet va apporter des changements aux plans sanitaire et environnemental dans la vie de la commune et il est prêt à accompagner cette initiative de la SNV. Le haut-commissaire de la province du Nayala, Abdoulaye Bancé, félicite la SNV pour sa lutte contre la désertification et pour son travail qui contribue au bien-être sanitaire de la population. « Ce sont des initiatives futuristes que nous appuyons fortement au regard des effets négatifs des changements climatiques que nous vivons chaque jour », assure-t-il. A la suite des concertations les 5 et 6 décembre à Tougan et à Toma avec les dolotières, les maçons, les autorités locales et les services de l’environnement, le responsable du projet, Sylvain Thiombiano, a bon espoir que les dolotières adopteront cette nouvelle technologie. « Les deux rencontres ont permis de présenter les maçons aux dolotières et aux autorités locales. C’est comme si en quelque sorte, c’était le lancement du projet », révèle-t-il. En termes de perspective, il envisage couvrir l’ensemble des six provinces de la Boucle du Mouhoun et intensifier la formation des maçons ainsi que l’organisation des dolotières. Par ailleurs, M.Thiombiano indique que le projet avec le soutien des élus locaux et des autorités coutumières veut accompagner les dolotières dans les différentes localités à mettre en place des bosquets. « Le FA réduit la consommation du bois, mais ne l’arrête pas ; l’idée du bosquet est de les dédié entièrement aux dolotières et elles pourront y prélever dans quelques années du bois pour mener leurs activités », ajoute-t-il.

Des dolotières et des maçons visitant un modèle de FA chez Madeleine Drabo à Tougan

En outre, la SNV a mené une étude de faisabilité carbone pour pouvoir mobiliser des ressources additionnelles pour les dolotières. Sylvain Thiombiano espère que d’ici à 2015, les dolotières pourront bénéficier de ses résultats. L’objectif final étant que les populations locales s’approprient le projet et continuent le travail même à la fin du projet.

Raphaël KAFANDO