Katrina, Haiyan, Hanna, autant de cyclones qui ont semé la terreur des Etats-Unis à Haïti en passant par les Philippines. Et que dire des multiples inondations ou des sécheresses qui frappent bon nombre de pays africains avec leur lot de famines et de maladies. Selon des scientifiques, ces catastrophes, bien que naturelles, sont aggravées par le réchauffement climatique. Pire, ils prévoient même une recrudescence de ces phénomènes dans les années à venir. Mais, ni les milliers de morts provoqués par ces catastrophes, ni les sonnettes d’alarme tirées çà et là, par les scientifiques sur les conséquences catastrophiques du réchauffement climatique ne semblent faire plier les puissants de ce monde. En effet, la conférence sur le climat de Varsovie qui était censée poser les premiers jalons sur le chemin à parcourir jusqu’au grand rendez-vous de Paris, en 2015, n’a accouché que d’un accord minimum. Ce texte a été signé après plus de 30 heures de négociations non-stop dans le grand stade de Varsovie, le 23 novembre 2013, où se tenait cette conférence rassemblant plus de 190 pays et qui devait s’achever officiellement, vendredi 22 novembre. "Juste à temps, les négociateurs à Varsovie ont fait juste ce qu’il fallait faire pour que ce processus continue d’avancer", a commenté Jennifer Morgan, directrice du Centre de recherches World Resources Institute (WRI). "Les représentants des différents pays doivent désormais rentrer chez eux et faire des progrès significatifs sur leurs offres (en matière de lutte contre le changement climatique) qui doivent devenir la colonne vertébrale du nouvel accord sur le climat", a-t-elle ajouté. L’ambition de la conférence de Varsovie était de poser les fondations de l’ambitieux accord attendu en 2015 à Paris sur la réduction des gaz à effet de serre. Pour la première fois, l’accord doit concerner tous les pays, être légalement contraignant et suffisamment ambitieux pour limiter le réchauffement du globe à 2°C par rapport à l’ère préindustrielle, contre la trajectoire actuelle de 4°C. Mais les négociations ont buté toute la journée du vendredi, sur la position intransigeante de la Chine et de l’Inde qui se sont opposées à l’Union européenne et aux Etats-Unis sur la formulation du texte. Les deux pays n’ont cessé d’insister pour continuer à être considérés comme des « pays en développement », et à ce titre, ne pas devoir en faire autant que les pays industrialisés contre le réchauffement. Le ton est monté, au point que la perspective d’achever la conférence de Varsovie sans accord était évoquée ouvertement, ce qui aurait été un faux-départ très préjudiciable à l’accord de 2015. Les négociateurs des principaux pays : Chine, Inde, Etats-Unis, entre autres, se sont alors rassemblés dans un coin de la grande salle de conférence et durant plus d’une heure, ont négocié une formulation acceptable par tous. Résultat : au lieu d’« engagements », le texte adopté parle de « contributions », formule bien moins forte que les pays devront présenter et préciser qu’elles ne « préjugent pas de leur nature légale ». Sur la question du financement qui était l’un des points de crispation de ces longues négociations, les pays émergents ont finalement accepté le consensus proposé par les pays industrialisés : l’objectif de 75 milliards d’euros mobilisables chaque année, à partir de 2020, demeure, mais aucune étape intermédiaire n’est précisée. Seule victoire pour les pays du Sud, l’obtention de 75 millions d’euros pour un fonds d’adaptation. Voilà pour les accords. En revanche, ils n’ont pas obtenu la création d’un fonds pour aider les pays victimes des catastrophes climatiques, comme le récent typhon Haiyan aux Philippines. A croire que les pays, notamment les grandes puissances, n’ont pas encore pris la mesure de la situation. Les trajectoires d’émissions actuelles conduisent sur la voie d’un réchauffement plus proche de 4°C que de 2°C. Et beaucoup de pays ne tiennent pas les engagements de réduction qu’ils avaient promis en 2009 à Copenhague, comme le montre l’étude de Carbon Action Tracker, publiée la semaine dernière. Les pays en développement ont rappelé que l’effort des pays industrialisés n’atteint pas 20 % de réduction des émissions d’ici à 2020, alors que les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat préconisent une fourchette comprise entre 25 % et 40 %. De quoi s’accorder avec les pays en développement qui ont accusé les pays riches de vouloir transférer le fardeau de la lutte contre le changement climatique sur leurs épaules, dans le futur.
Raphaël KAFANDO