Dimanche 22 décembre 2014
Je reviens sur des faits relevés lors d’un précédent billet concernant la situation à tout le moins embarrassante d’une élue de la Ville de Narbonne propriétaire , à titre privée, de la marque du festival Trenet, tout en étant son organisatrice , à titre d’adjointe au « tourisme et à l’animation » - la Ville y apportant la plus grosse part financière… , après qu’elle ait été interpellée par des membres de l’opposition municipale. Et, plus précisément, sur la ligne de défense présentée par Nicolas de Sainte-Cluque , avocat de profession et adjoint au maire de Narbonne, qui, lors de la dernière réunion du conseil municipal, a défendu sa collègue en contestant l’invocation d’un éventuel « conflit d’intérêt », au motif qu’il « n’y a pas de royalties ni de bénéfices générés. », comme le rapporte le Midi Libre, dans son édition du 21 décembre.
Avant de contester cet argument, arrêtons nous quelques instants, non sur le conflit d’intérêt, en soi, mais sur ce qui me semble caractériser la situation présente, à savoir la « prise illégale d’intérêts ». Sa définition tout d’abord ! La prise illégale d'intérêts, anciennement connue sous le nom de « délit d'ingérence », est un délit prévu et réprimé par l'article 432-12 du Code pénal. Article qui définit la prise illégale d'intérêt comme le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public : de prendre, recevoir ou conserver (c'est à dire d'avoir); directement ou indirectement (c'est-à-dire, soi-même ou par l'entremise d'un proche, ascendant ou conjoint par exemple), un intérêt quelconque (qu'il soit matériel, financier par la détention de parts sociales, mais également symbolique et honorifique); dans une entreprise ou dans une opération, dont l'élu ou l'agent a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement.
Cela exposé, qui me semble correspondre à la situation dans laquelle se trouve l’adjointe au « tourisme et à l’animation » , posons nous la question à présent de savoir si l’élue concernée pourrait être condamnée sans avoir retiré un bénéfice matériel de la possession de la marque du festival Trenet . La réponse, contrairement à ce qui est argué par Monsieur de Sainte-Cluque, est sans conteste : oui ! La Cour de cassation juge de longue date en effet que le délit de prise illégale d'intérêt « se consomme par le seul abus de la fonction, indépendamment de la recherche d'un gain ou de tout autre avantage personnel» (Cass. crim., 2 novembre 1961, Bull, crim., n° 438).
Monsieur de Sainte-Cluque, que j’ai eu l’occasion de rencontrer et avec qui , je dois le dire ici, je pense avoir établi un contact sinon une relation faite de respect et d’hônneteté, ne m’en voudra pas de lui rappeler ces principes élémentaires du droit en la matière.
Je voudrais aussi, profitant de l’occasion qui m’est ainsi offerte de revenir sur cette affaire, pour me distinguer de ceux qui, avec des mots et des images d’une violence inouïe, et des accusations d’escroqueries à peine voilées, mettent gravement en cause la dignité des personnes concernées.
Que les choses soient claires, dans mon billet précédent, je me contentais, m’appuyant sur un article parfaitement documenté du Midi Libre signée Marie Pintado, de poser calmement et respectueusement, le problème. Et conséquemment de soulever quelques questions de bon sens, sans autre intention que celle d’obtenir des réponses argumentées de la part des principaux intéressés.Je pense même , pour être encore plus net , contrairement à ce qui est suggéré dans certains médias sociaux à coups de sous entendus aux relents diffamatoires, et jusqu’à preuve du contraire, que cette situation est plus la conséquence d’un défaut de vigilance juridique de la personne en cause, de ses collègues et de son administration, que d’une volonté délibérée d’en tirer des « profits » personnels .
Quoiqu’il en soit, je n’entrerai jamais dans ce genre de basse et vulgaire polémique Mais il n’empêche, pour en revenir au fond de cette affaire, que la « prise illégale d’intérêt » me semble, sans remonter aux années 1995 où ce « festival Trénet » fut déjà conçu et « organisé » avec les mêmes partenaire ou presque, bien caractérisée, comme je viens de le démontrer.
Ce constat fait, pour l’heure, rien d’autre ne peut être invoqué qui serve, dans des formes grossières ou insultantes, au combat politique du moment, serait-il à peine masqué par des considérations prétendument éthiques . La loyauté et la noblesse, je le sais, y font hélas! souvent défaut, surtout dans ces moments de vives tensions électorales.Pour ma part, je ne dévierai jamais de ce qu’impose, en toutes circonstances, le respect de la dignité des autres : je tiens trop en effet à ce que l’on respecte la mienne… Et s’il m’arrivait, par passion ou légèreté, nul n’est parfait, d’y déroger, j’accorde bien volontiers le droit à quiconque de m’en faire l’observation ; et m’en trouverai flatté si la forme choisie donnait vie à ce même souci d’honnêteté intellectuelle…