En cette période de plénitude un rien sucrée, alors que la Religion naissante se mêle au mercantilisme et consumérisme le plus improbable sous nos contrées, allons donc voir ce qu’il se passe du côté de nos amis Nippons.
Comme nous pouvons nous en douter, Noël n’est pas une fête particulièrement importante. Si elle a été introduite – volonté d’occidentalisation oblige – et qu’elle correspond souvent à un gros gueuleton de poulet grillé… de chez KFC depuis une campagne de publicité réussie de 1974, elle n’en demeure pas moins marginale. Certes, en décembre, vous pourrez entendre les chants de Noël – an anglais – résonner dans les Combini, les grands magasins, les salles de sport, les cinémas, à la radio, à la télévision… partout. Cela reste en revanche plus supportable qu’en Europe (m’est avis).
Ceci étant, cette période hivernale correspond aussi à une étape de cadeau importante : お歳暮 (o-seibo)
Originellement, cette fête correspondait à un temps d’offrandes mises sur les tombes des ancêtres, et donc tout un chacun distribuait sake, gâteaux de riz ou de poisson mariné à cet effet. Avec le temps, cette tradition s’est commuée en période d’échange de présents. Traditionnellement, l’on a entre le 1er et de 20 décembre pour offrir un cadeau aux personnes suivantes :
1/ La famille et amis ;
2/ Le marieur (仲人, Nakoudo) ;
3/ Le(s) médecin(s) de famille ;
4/ Le professeur de chaque matière ;
5/ Le supérieur, le client dans une compagnie, etc.
Cela peut donc devenir rapidement conséquent. Si aucun cadeau n’est donné durant la période susmentionnée, il devient お年賀 (o-nenga), littéralement « vœu de nouvel An » et s’offre entre le 26 décembre et le 7 juillet.
Le cadeau typique est 産直便 (sanchokubin) qui se traduit assez difficilement en français par quelques mots. Une périphrase serait : « bien de consommation envoyé directement de chez le producteur, l’atelier de production ou l’usine. » En ce qui concerne le vécu de votre humble et dévoué serviteur, les familles de certains élèves envoient des cartons de pommes, d’oranges de leur région, selon leur spécialité et réputation, au laboratoire. Cela correspond donc à un Sanchokubin envoyé au professeur ou au supérieur hiérarchique.
Un autre don populaire est de la nourriture. Ne l’oublions pas, nous parlons du Japon, certainement le pays au monde où mourir d’inanition est impossible. Ainsi, si le sanchokubin n’a pas été envoyé, l’on peut toujours offrir saumon, hareng, jambon mais aussi crabe, fruits (comme dit plus haut), sake… tout dépend de la personne à qui le présent est envoyé.
Le budget mis dans un tel cadeau dépend uniquement de la personne à laquelle il est envoyé. Typiquement, 5 000 yens sont une moyenne convenable.
De manière intéressante, ce cadeau de fin d’année a pour écho le cadeau de milieu d’année, son symétrique temporel, pourrait-on dire, お中元. (o-chugen, cadeau d’été) Cette dernière célébration émane du taoïsme dont le mot « chugen » provient. Mélangé au bouddhisme, le présent était, encore une fois, initialement prévu pour les trépassés lors du Festival Bon et est devenu un don à une personne dont nous sommes redevables.
Typiquement, le cadeau est fait autour du 15 juillet, aux mêmes personnes que celles citées précédemment. Passée cette période, du 16 juillet au 8 août, ce présent devient 暑中見舞い (shochumimai) soit littéralement « carte de vœu estivale » pour montrer que l’on prie pour la santé d’autrui durant cette période pour le moins chaude.
Etant considérée comme moins importante, les cadeaux ont une valeur souvent moindre, de l’ordre d’environ 3 000 yen, en moyenne.
Cependant, pas d’inquiétude, les étrangers ne sont pas soumis au même régime, l’on ne vous tiendra pas rigueur d’un oubli de votre part !