Avec toute le respect, l'admiration que l'on a pour le travail de ce talentueux artiste qui enchanta, à de nombreuses reprises, les salles parisiennes depuis le début des années 70, force est de constater que son inspiration peine de plus en plus à se régénérer. Ainsi présente-t-il une poussive farce musicale argentino-gay intitulée "El Tigre", clin d'oeil aux femmes fatales et au septième art d'autrefois, où des travestis croisent des fées, Lana Turner, Vampira, et rejouent Mars Attacks (pour la faire courte). Nous aimerions, sinon nous enthousiasmer, du moins poser un regard bienveillant sur ce qui nous est proposé, mais les dialogues se révèlent d'une platitude extrême, l'humour sacrément faiblard, les chansons bâclées, la musique de Bruno Coulais anecdotique, l'interprétation bruyante, peu harmonieuse (ça braille, ça bêle)... Cela ne dure qu'une heure quarante, et pourtant c'est interminable.
Sur le beaucoup trop grand plateau de la salle Renaud-Barrault, six comédiens mal dirigés se démènent pour occuper l'espace. L'irrésistible Denis D'Arcangelo est seul responsable des quelques sourires que nous esquissâmes au cours de la soirée. Il faut dire qu'il maîtrise et assume à merveille les rôles à talons. Quant à Arielle Dombasle, qui a visiblement oublié de manger depuis 1998, elle n'est définitivement pas comédienne. Absolument pas à l'aise en fantôme de Lana Turner, elle minaude, cherche une sincérité qui ne vient pas, et laisse transparaître les limites d'une voix certes plus plaisante que celle de ses partenaires mais terriblement fabriquée, à la justesse fragile, manquant de puissance... Le reste du cast avance comme il peut avec la matière qu'on lui donne, c'est à dire pas grand-chose. Notons toutefois la compositions transgenre haute en couleurs et d'une jolie précision de Carlos Casella ainsi que l'efficacité certaine d'Alexie Ribes dans l'hystérie.
On ne devrait donc pas se tromper en affirmant que le déplacement au Rond-Point s'avère dispensable en cette fin d'année (à moins d'aller voir "Perplexe" avec Valérie Bonneton). Les "Holala" récurrents murmurés durant la représentation par notre voisin de droite et les ronflements de celui de gauche nous poussent à croire que nous sommes dans le vrai...
Jusqu'au 12 janvier.
El Tigre par WebTV_du_Rond-Point
Photos : Alejandra Lopez