La dette fédérale américaine est-elle un « actif sans risque » ?
Publié Par Siméon Brutskus, le 20 décembre 2013 dans Amérique du NordTous les éléments sont réunis pour faire de la dette fédérale américaine un des investissements les plus risqués.
Par Siméon Brutskus.
Un article de l’Institut économique Molinari.
Sur cette période presque quinquennale, peut-on déceler un changement dans la structure de détention de ces titres ? Le tableau suivant décrit les grandes catégories de détenteurs de la dette américaine fédérale. En 2008, un peu plus de la moitié de cette dette (51%) était détenue par les étrangers. Le reste était distribué entre les fonds mutuels (12%), les gouvernements locaux (8%), les ménages (4%), les fonds privés de retraite (3%) et d’autres. Les autorités monétaires détenaient 7,5% du total.
La répartition a sensiblement changé en 2013. La part détenue par les étrangers a diminué légèrement, pour se situer à 47%. Le grand changement intervient au niveau de la distribution nationale, où ménages et autorités monétaires détiennent, à eux seuls, plus du quart de la dette fédérale, à comparer avec un peu plus de 11% il y a cinq ans. En pourcentage, les titres fédéraux détenus par les ménages et les autorités monétaires ont crû de 397% et 307% respectivement !
Répartition des détenteurs de dette fédérale américaine.
Trois conclusions simples s’imposent. Premièrement, le désenchantement des investisseurs étrangers reste à prouver. Il est vrai que sur la première moitié de 2013, les titres détenus par les étrangers n’ont augmenté que de 27 milliards de dollars, ce qui n’était que 8,4% de la hausse totale. Il n’y a cependant pas eu encore de retrait net de la part des investisseurs étrangers.
Deuxièmement, les autorités monétaires mènent une politique très agressive d’achat de la dette fédérale qui a pour objectif d’abaisser les taux d’intérêt dans l’économie. Depuis juin 2013, l’encours sur le bilan de la Réserve Fédérale a encore monté de quelques 206 milliards.
Troisièmement, ce contexte de taux bas modifie profondément les incitations des épargnants et des institutions financières. Les ménages semblent privilégier la dette américaine fédérale (sans doute au détriment des dépôts bancaires), alors que les intermédiaires financiers quittent les titres de dette fédérale (sans doute au profit des actions). Voilà ce qui expliquerait aussi les nouveaux sommets du Dow et du Nasdaq.
En réalité, tous les éléments sont réunis pour faire de la dette fédérale américaine un des investissements les plus risqués. Si les autorités monétaires se désengageaient de leur politique actuelle, la hausse des taux d’intérêt ferait subir des pertes aux investisseurs privés. Si, au contraire, elles maintenaient leur politique, la bulle financière de tous les actifs en dollars qui est en train de grandir finirait par éclater tôt ou tard. Dans un cas comme dans l’autre, les taux actuels sur la dette fédérale américaine (0,13% sur un an, 1,36% sur cinq ans et 3,81% sur trente ans) sont totalement déconnectés des véritables risques associés.
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