Un film de Noémie Lvovsky (2002 - France) avec Nathalie Baye, Jean-Pierre Bacri, Isabelle Carré, Jean-Pierre Bacri
Etrange.
L'histoire : Jacques, médecin, et son épouse Carole, attendent l'arrivée de leurs nouveaux voisins, un jeune couple, François et Edith. Jacques, fatigué par une longue carrière de médecin de campagne, a trouvé un job plus tranquille à l'hôpital du coin et François va le remplacer. Les deux couples sympathisent immédiatement. Mais Jacques et Edith tombent follement amoureux l'un de l'autre...
Mon avis : Outre l'aspect vu-et-revu du scénario, ce film ne m'a guère emballée, mais il m'a surprise, et c'est pourquoi je lui accorde quelques points. Les partis pris assumés de la réalisatrice quant à la mise en scène dénotent une personnalité certaine, même si sa fantaisie ne m'a pas touchée, mais laissée au contraire fort dubitative. J'ai tout trouvé bizarre...
A commencer par la B.O. inexistante, puisque remplacée intégralement par une petite chorale et son orchestre, que l'on voit chanter entre les diverses séquences... Au début, je me demandais ce qu'ils fichaient là, avant de comprendre que c'était la bande son ! Visuelle, donc. Comme le choeur des scènes de théâtre antiques. Original, certes, mais moi je n'ai jamais été sensible aux chorales (sauf le gospel).
Ensuite, je n'ai pas aimé les personnages, antipathiques. A part François (Melvil Poupaud), le seul qui semble avoir la tête sur les épaules, mais reste étonnament transparent. Jacques est fort bien interprété par un Jean-Pierre Bacri, juste et touchant, enfin dans un rôle autre que le grincheux de service. Mais en même temps, je le trouvais si popote et si peu sexy que je me demandais bien ce qu'Edith pouvait lui trouver, vu ce qu'elle avait à la maison (Melvil, donc) et venant à peine de se marier. Le couple Carré/Bacri n'est pas du tout crédible. Les deux femmes, si elles sont fort bien incarnées par les toujours excellentes Baye et Carré (décidément ravissante), sont détestables et caricaturales ; un comble quand on sait que c'est une femme qui dirige le film. Carole est ivrogne, hystérique, oisive, pathétique ; Edith est inconstante, égocentrique, insouciante jusqu'à la sottise, et elle regarde son amant comme si elle avait vu le Bon Dieu. Bizarre... Et puis Isabelle Carré est toujours à poil, ou presque, et ça m'énerve. C'est purement et totalement gratuit. On n'est pas dans une atmosphère chaude et sensuelle, un amour torride et passionné, on est dans une comédie mollassonne et il n'y a aucune raison pour la voir à walpé. Je ne comprends pas. Et c'est une femme qui inflige à une autre, et à toutes les spectatrices, cette vue raccourcie de la féminité... On n'est pas prêt d'arriver à l'équité, je vous le dis. A quand Poupaud et Bacri en train de courir tout nus dans l'herbe ?
Autre sujet de fascination pour moi : les décors et les fringues ! Une constante : le rouge. Pas une image sans plusieurs choses rouges (volets, feuilles, fleurs, voitures...). Ensuite, qu'il s'agisse des robes, des chemises des hommes, des tapisseries, des rideaux, tout est à gros motifs (grosses fleurs, grosses rayures, gros ronds, gros carreaux...)... Etonnant. J'imagine que c'est un choix esthétique, mais j'ai trouvé ça, encore une fois, très étrange. Lvovsky voulait-elle donner à son film une couleur onirique, ou artistique, ou tout autre adjectif en ique ? Probablement, mais je n'ai pas été touchée... juste incrédule, scène après scène, devant tant de démonstration : au bout d'un moment ça lasse, trop c'est trop. A noter une apparition particulièrement coquette de Bacri en pantalon rouge et chemise vichy blanc/rouge...
Noémie Lvovsky prouve qu'elle a une grande fantaisie, c'est sûr ; elle a renouvelé l'expérience en se mettant dans la peau d'une jeune fille de seize ans, dans Camille redouble. Mais décidément je n'adhère pas... et ça ne me donne guère envie de voir ses autres films.
En plus, si quelqu'un peut m'expliquer l'histoire du Chinois... j'ai rien pigé.
Le public n'a guère apprécié, par contre les professionnels sont dithyrambiques ; encore une fois, on se demande s'ils voient les films ou se contentent de distribuer les bons points à leurs copains...
Même Télérama et Les Cahiers du Cinéma, les deux rabat-joie de la critique cinéma ont adoré :
Une comédie décalée, déjantée, par moments carrément burlesque (Bacri, et son stylo qui fuit), où la vivacité du rythme et des couleurs crée une sorte de carnaval permanent, destiné à se protéger de la grisaille et du chagrin. (Télérama) Le carnaval permanent, c'est clair ! Mais ça ne m'a pas plu du tout !
Les Sentiments met l'adultère en valeur, traité comme une belle histoire d'amour. Merci à Noémie Lvovsky de l'avoir dévêtu de ses oripeaux puritains et extrait des genres auxquels tant de films l'avaient voué, du vaudeville ou du guignol à la tragédie en passsant par le drame bourgeois. (...) Le film met les pieds dans le plat tout en posant avec une rare intelligence, et sans désinvolture, la question de la liberté de chacun dans le couple. (Les Cahiers). Une belle histoire d'amour ? Je n'ai vu qu'une vague histoire de coucherie entre une jeune nymphette narcissique et un cinquantenaire titillé par le démon de midi.
Mais je salue l'esprit original qui souffle sur le film.