Titre original : Mandela : Long Walk to Freedom
Note:
Origine : Angleterre/Afrique du Sud
Réalisateur : Justin Chadwick
Distribution : Idris Elba, Naomie Harris, Tony Kgoroge, Riaad Moosa, Fana Mokoena, Zolani Mkiva, Simo Magwaza, Thapelo Mokoena…
Genre : Drame/Biopic/Adaptation/Histoire vraie
Date de sortie : 18 décembre 2013
Le Pitch :
De la campagne sud-africaine où il passa son enfance, à son accession au pouvoir, en passant par les longues années d’emprisonnement, comment Nelson Mandela est non seulement devenu le héros de tout un pays, mais aussi, de manière plus universelle, l’un des plus grands représentants de la paix…
La Critique :
C’est après une genèse de 16 ans que naquit le biopic (voulu comme) définitif de Nelson Mandela. Directement adapté des mémoires de l’ex-Président sud-africain, le film sort enfin, malheureusement trop tard pour qu’il puisse le voir. Il faut savoir que c’est Madiba lui-même qui céda les droits de son ouvrage afin d’en faire un long-métrage. Le fait que ce dernier soit sorti, quasiment au moment où le héros de la paix tire sa révérence, confère bien évidemment à l’œuvre un statut particulier. Difficile de juger le travail accompli ici, sans prendre en compte son sujet, à savoir la vie et le combat d’un homme ayant tout sacrifié pour unifier son pays et propager un message de paix universel en tous points. Surtout si on considère l’extraordinaire cinégénie d’un personnage aussi fédérateur que Mandela. Un personnage déjà au centre de longs-métrages (Invictus, Goodbye Bafana…), qui occupe ici le rôle central d’une fresque historique voulue grandiose et authentique. Grâce à son protagoniste principal et au fabuleux travail accompli par un Idris Elba en état de grâce (allo les Oscars ?), le film mérite quoi qu’il en soit d’être vu. Doit-on pour autant éviter de rentrer dans les détails ? Non. Car quoi qu’il en soit, malgré ses qualités évidentes, Mandela : Un Long Chemin vers la Liberté n’est pas parfait. Loin s’en faut.
Réaliser un biopic n’est pas chose aisée. L’exercice appelle certains automatismes et un classicisme difficile à éviter. Là se trouve justement le principal défaut du film de Justin Chadwick, un réalisateur notamment connu pour avoir orchestré la rencontre entre Natalie Portman et Scarlett Johansson dans Deux Sœurs pour un Roi.
On imagine aisément à quel point il peut être écrasant de se frotter à un monument comme Mandela. Ne rien oublier, rendre justice à l’homme, à ses idées et à son combat, tout ceci sans perdre de vue l’aspect strictement formel de l’œuvre globale. Reposant sur un script maintes fois remanié, le long-métrage traduit à la fois les efforts et les hésitations d’une équipe trop soucieuse de faire bien, au point d’en oublier d’éviter les clichés. Au final, l’ensemble prend souvent des airs de leçon d’histoire très didactique et pourtant plus qu’à son tour brouillonne. Pour qui ne connait rien ou presque de la vie de Mandela, le film laisse dans l’ombre de nombreux aspects du personnage. On ne sait par exemple pas ce qu’il est advenu de sa première femme et certains événements sont à peine évoqués quand leur développement aurait aidé l’émotion à percer plus souvent qu’elle ne le fait. En comptant peut-être un peu trop sur le côté héroïque de Mandela et sur les épreuves qu’il dut traverser pour arriver à imposer sa vision des choses, le film oublie de mettre les formes autrement qu’en ayant recours à des schémas pré-établis et maintes fois croisés dans de nombreux biopics, depuis plusieurs décennies. En 2h20 et des poussières, Chadwick peine à condenser l’extraordinaire parcours de Nelson Mandela ; s’étalant par moment sans trop de raison et balayant trop vite d’autres passages qui auraient mérité plus d’éclaircissements.
Ceci dit, on apprécie par contre le refus de trop policer le propos. En n’omettant rien des zones d’ombre de Mandela, le film met en exergue son humanité et la puissance du cheminement intérieur d’une pensée arrivée à maturation après un combat évolutif qui permit à Mandela de devenir Président de son pays, après avoir purgé 27 années de prison, dont la majorité dans des conditions extrêmement difficiles.
Il y aussi, on y revient, Idris Elba, formidable de dévouement et remarquable de sobriété, qui parvient à imprimer de son charisme et de son talent, son personnage, sans jamais cesser de lui rendre hommage. À ses côtés, dans le rôle de Winnie Mandela, l’amour de toute une vie, qui prit une autre direction que celle de son époux, alors qu’il croupissait derrière les barreaux, Naomie Harris est elle aussi fantastique. Non seulement belle, elle arrive à faire exister son personnage qui jamais ne reste dans l’ombre du héros, au point de permettre au film de s’offrir une pertinence bienvenue quant au combat contre l’Apartheid.
Fresque trop linéaire et scolaire, Mandela : Un Long Chemin vers la Liberté est néanmoins un film utile, même si on est en droit d’y préférer Invictus. Utile, car il devrait permettre à un public plus large de découvrir ce que fut la vie du grand Mandela. Et même si dans d’autres mains, un tel chemin de vie aurait pu bénéficier d’un souffle émotionnel plus dévastateur, le long-métrage en l’état, propage quoi qu’il en soit le message de Madiba.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Pathé Distribution