10- Arcade Fire - Reflektor
Comme on dit, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas
d’avis. Après plusieurs écoutes répétées, la plupart de ces chansons ont fini
par faire leur effet insidieusement. James Murphy a réussi à remettre de la
folie dans le rock des canadiens qui commençait déjà à devenir balisé.
« Reflektor » est un joyeux foutoir où l’on peut danser, bouger,
chanter, hurler. Arcade Fire ou comment se remettre en question tout en restant
soi-même, quitte à se louper parfois. Ce groupe reste donc l’un des plus
passionnants de son époque.
9- Babx - Drones Personnels
« Qu’on m’alune vite » demande Babx dans
« J’attends les E.T. », l’un des meilleurs morceaux de son troisième
disque, « Drones Personnels », dont les roulements de batterie n’est
pas sans rappeler Radiohead. Le jeune homme avance en dehors de tout hype et
est en train de concevoir l’une des œuvres les plus riches de la musique d’ici.
« Drones Personnels » n’échappe pas à la règle et propose une palette
d’influences et de styles assez prodigieuse. Il est temps que cet artiste soit
enfin reconnu à sa juste valeur, c’est-à-dire l’égal des plus grands.
8- Nick Cave & The Bad Seeds - Push The Sky Away
S’il ne devait rester plus qu’un rockeur, ça serait lui,
Nick Cave. Qui a eu la chance d’aller le voir cette année sur scène n’a pu être
qu’impressionné par son incroyable présence et le colossal son déployé par ses
Bad Seeds. Cave sait tout faire : jouer au crooner émouvant derrière son piano,
jacter comme un bluesman ou tout envoyer valdinguer à la façon d’un punk.Malgré sa déjà longue discographie, l’homme
semble encore progresser : si son nouveau disque calme le jeu, la guitare de
Blixa Bargeld étant absente, sa musique gagne en subtilité. La classe
intégrale.
7- Public Service Broadcasting - Informe-Educate-Entertain
Deux anglais bien propres sur eux inventent une nouvelle
façon de faire de la pop, dans l’esprit des allemands de
Kraftwerk, à la différence que les paroles sont uniquement composées de vieux extraits d’émissions
d’informations. Si le concept risque de passer difficilement le cap du
deuxième album, il est finalement assez révélateur d’une époque où nous sommes
souvent impuissants devant le flot de nouvelles dont on nous abreuve au
quotidien. « Entertain », la dernière injonction du titre, nous
inviterait aussi à ne pas prendre tout ça au sérieux. Bonne idée.
6- Deerhunter - Monomania
Je l’ai déjà dit, Bradford Cox est devenu en quelques
années, à travers ses deux formations, l’un des rockeurs les plus actifs et intéressants de sa génération. S’il manque
un petit quelque chose pour que ses albums deviennent des classiques
indémodables, le son est toujours d’une qualité irréprochable. « Monomania »
se fait plus sale, cradingue, dissonant, surtout le formidable morceau titre,
tout en montrant une fois de plus la remarquable capacité de Cox à écrire des
chansons pop imparables comme « The Missing » ou « T.H.M ».
Je ne suis pas prêt de lâcher le gaillard.
5- Parenthetical Girls - Privilege
Ceux-là, je les aime, pour leur univers à nul autre pareil,
qui me rappelle Pulp et Suede, le tout agrémenté d’un petit côté arty bien
américain. Le chant est affecté, la musique parfois kitsch, mais les chansons
sont suffisamment tordues pour que ça passe quand même. Le talent de la paire
Pennington-Bischoff est en tout cas injustement ignoré ou mésestimé. Le groupe
pourtant originaire de Portland, n’a jamais été invité au principal festival de
leur ville. De même, aucun tourneur français n’a souhaité les faire venir chez
nous lors de leur dernière visite européenne. Le disque, compilation des 5 EPs
qu’ils ont sorti depuis le déjà excellent « Entanglements » en 2008
n’a même pas été distribué chez nous. Si certains ouvraient mieux leurs
oreilles…
4- Aline - Regarde Le Ciel
Aline divise : les uns leur reprochent des paroles basiques
et plates, les autres ne jurent que par les guitares smithsiennes. Vous savez
déjà que je me place dans la deuxième catégorie. Le magazine Magic qui
n’est pas freiné par la pop même quand elle est chantée en français a compris
que cette musique était ce qu’on avait entendu de mieux dans le genre chez nous
depuis une éternité en classant « Regarde Le Ciel », disque de
l’année. Ici, on y est presque. En plus, ma Lulu adore…
3- The Pastels - Slow Summits
Voilà un de ces anciens groupes que je n’ai découvert réellement que
cette année par le biais de ce "Slow Summits", sans doute leur disque plus
accompli. Il n’est pas très éloigné dans le style comme dans la qualité du chef
d’œuvre de leurs voisins écossais de Belle & Sebastian, « If you’reFeeling Sinister ». Epaulé par John McEntire, The Pastels, l’une des
formations les plus sympathiques qui soient, nous assènent un magnifique
recueil de pop mélodique, subtile, qui devrait me suivre pendant longtemps
encore.
2- The Flaming Lips - The Terror
Depuis “Yoshimi Battles The Pink Robots” – même si j’ai
depuis réévalué "At War With The Mystics" -, les Flaming Lips étaient juste devenus de
fabuleux « performers ». Je n’arrivais plus à suivre les
expérimentations de plus en plus tarabiscotées de Wayne Coyne et de sa bande.
« Embryonic », le véritable précédent disque était un gigantesque
foutoir où il n’était pas évident d’y trouver beaucoup de chansons. « The
Terror » garde pourtant les mêmes grosses basses, mais est plus apaisé, et
surtout il est cette fois d’une incroyable cohérence. C’est l’un de ces
rares albums qu’il faut absolument écouter d’une traite pour mieux s’y plonger.
Un des disques après lesquels l’essentiel de la production musicale paraît bien
fade – essayer Stromae juste après par exemple. « The Terror », c’est
de la musique en 3D, c’est aussi le disque idéal pour la fin du monde. Beau et
effrayant.
1- Yo La Tengo - Fade
L'un des premiers disques, "Fakebook",
de Yo La Tengo était une brillante collection de reprises. Jusqu'à
aujourd'hui, il était considéré par beaucoup comme leur meilleur,
tendant à prouver que le groupe n'était qu'une sympathique formation de
série B, des sortes d'éternels outsiders. Et puis, il a fallu entre
autre qu'ils s'associent avec monsieur Tortoise à la production, John
McEntire, pour que leur indie rock prenne son véritable envol. Bon, les
vrais connaisseurs ergoteront qu'ils ont déjà enregistré un paquet de
très bons disques et ils auront raison, mais moi, c'est avec ce "Fade"
que j'ai eu la révélation. Yo La Tengo est devenu d'un coup d'un seul
le groupe de rock indépendant par excellence. Celui qui trace sa route
sans se soucier des modes, ce qui a justement pour effet de rendre leur
musique indémodable. Partant de l'influence obligée du Velvet
Underground, Yo La Tengo a su digérer chaque nouveau courant - le
grunge, le shoegaze, la dream pop, etc -, l'intégrer à son univers pour en
ressortir une étonnante matière originale. "Fade" ressemble aujourd'hui
à s'y méprendre à l'album parfait.