Hier dimanche il fallait absolument changer d'air pour se ressourcer. J'ai pris le chemin du Musée Zadkine car les photos qui y sont
présentées autour d'un voyage inédit dans l'ancienne Russie semblaient pouvoir me transmettre cette particule de poésie qui régénère, rétablit le corps et la pensée et soustrait d'un quotidien.
C'est dans ce voisinage perpétuel avec l'art que je puis emon bien-être et surtout ma différence, ma possibilité de dépasser l'ordinaire, le banal, le digéré et redigéré, l'alimentation du
bourrage de crâne dont le politique ne sait que si peu se soustraire. Alors je me suis fait plaisir et comme n'étant nulement égoïste je vous en fait partager en quelques mots l'essence; comme
celle de cet orme sacré!
[Janvier 1907] – Orme sacré – Karagach – près de Samarkand
Saint-Pétersbourg, 3 mai 1909, Sergueï Mikhailovitch Procoudine-Gorsky (1863-1944), inventeur d’un
procédé photographique couleurs inédit, est reçu pour une projection privée par Nicolas II au Palais impérial. Son procédé est issu de recherches visant à produire des films
positifs couleur pour images fixes ( diapositives ) et le cinéma. Il mit à cet effet au point un appareil permettant d'impressionner successivement 3 plaques monochromes à travers trois filtres.
En projetant simultanément ces trois images rouge, verte et bleue avec des sources de lumière judicieusement filtrées on reconstituait les couleurs originales par synthèse additive.
Monastère Théodore Stratilat, [1911
Il obtient du tsar la mission de sillonner l’empire pour effectuer l’ambitieux travail de reportage dont il rêvait.
Il dispose alors d’un wagon
spécial de même que d'un bateau à vapeur, un bateau à fond plat pour naviguer le long des canaux et un véhicule à moteur adapté aux terrains accidentés. Il a réalisé un reportage documentaire
sur l'Empire russe entre 1909 et 1912 en sillonnant diverses régions de l’empire. Ses photos sont un témoignage inédit de la Russie tout juste avant le bouleversement de la Révolution d’Octobre
avec une Russie paysanne, un essor industriel naissant et un monde religieux prégnant avec les monastères. En ayant parcouru les rives de la Volga,
atteint les confins de l’Oural et pénétré le Turkestan il décrit photographiquement les populations et nous propose un témoignage ethnographié
étonnant. Ces photographies sont uniques et chargées d’une évocation exceptionnelle et son procédé nous restitue un présent d’une Russie éternelle et surtout étonnamment contemporaine. C’est ce
ressenti de contemporanéité qui étrangement accompagne le visiteur dès les premières photos. A voir absolument et s’autoriser à ouvrir les portes d’une immensité captivante, à baigner ses rêves
dans une Volga ondoyante.
[Juillet-Août 1909] – Tour de signal du village de Bourkovo
la Volga