Don d'organe: quel consentement?

Publié le 13 décembre 2013 par Samiahurst @samiahurst
En Suisse, le Conseil des Etats à rejeté le passage au consentement présumé pour le don d'organes. Une mesure dont je vous avais déjà parlé et que le Conseil National avait accepté il y a quelques temps. Un dossier dont on reparlera certainement, donc. Du côté des services de transplantation, on a clamé que les droits des personnes en liste d'attente n'étaient pas respectés. Et comment faire, en effet? Car il est clair qu'il n'y a pas de droit à être transplanté. En même temps, il y a en revanche un droit à obtenir les soins dont on a besoin, a fortiori s'ils sont nécessaires à notre survie. En même temps toujours, ce droit ne s'étend pas à obtenir d'autrui un organe, qui lui appartient même après sa mort. Mais que cela signifie-t-il que mes organes m'appartiennent, lorsque je ne peux plus rien en faire, car après tout je suis déjà morte? La question de remplacer ou non le consentement explicite par le consentement présumé navigue entre ces difficiles questions.
Dans cette controverse, quelques points méritent d'être précisés. D'abord, il n'est pas exacte que le consentement présumé serait carrément 'non éthique'. Un commentaire récent dans le forum du Bulletin des médecins suisses a raison sur ce point. Sous le consentement présumé, nous garderions le droit d'être ou de ne pas être donneur d'organes, car nous garderions le droit de nous opposer. Nos proches garderaient eux aussi le droit de s'opposer à notre place, ce qui constituerait une protection pour les personnes qui n'auraient pas voulu faire la démarche du refus de leur vivant.
En fait, le problème principal du consentement présumé n'est pas une atteinte à l'éthique, qui est évitable, mais l'inefficacité. Changer le mode de consentement ne change pas la capacité du système à identifier les personnes décédées qui pourraient devenir donneuses d'organes. Cela ne permet pas non plus de lever le doute sur la volonté de la personne décédée, et c'est souvent ce doute qui motive le refus de ses proches. Quel que soit le mode de consentement choisi, donc, il faut aussi d'autres mesures si l'on souhaite faciliter le don d'organes. Les pays qui, comme l'Espagne, ont fortement augmenté le don d'organes le doivent probablement à d'autres mesures, comme la coordination, et la formation du personnel soignant à aborder la question de la transplantation.
Ce qui permettrait de lever le doute serait en revanche de demander à chacun de se prononcer. Lorsque je vivais aux Etats-Unis, on m'a demandé de faire figurer cette information sur mon permis de conduire. Non seulement ce n'était pas choquant, mais c'était en même temps une démarche de prévention routière. En Suisse, on pourrait imaginer de faire de même avec la carte d'assurés, par exemple. Dans le temps, j'avais appelé ça le consentement proposé. Je vous en avais déjà parlé ici, et j'en ai reparlé dans le journal de Swisstransplant. Cela soulagerait le fardeau des proches en clarifiant la volonté de la personne décédée, cela faciliterait l'expression de notre volonté et du coup sans doute aussi le don d'organes, cela ne porterait pas atteinte à notre liberté puisque l'on demeurerait libre de donner la réponse que l'on voudrait. Qui sait, peut-être qu'un jour on essayera...