Fini les chansonnettes de Nains au coin du feu et les ballades champêtres en pleine Terre du Milieu, ce deuxième volet des aventures du Hobbit nous propose enfin de l’aventure, la vraie. C’est vrai que le premier volet du Hobbit paru en décembre 2011 nous paraissait un peu trop long, Peter Jackson cherchant à tirer à la ligne (3 heures par film c’est long il faut combler) ou alors trop en faire pour nous présenter un monde que nous connaissions déjà, du moins l’essentiel. Ce préambule pour éliminer toute comparaison avec la Trilogie Seigneur des Anneaux qui, elle, présentait un univers totalement nouveau et nécessitait une longue introduction qu’était La Communauté de l’Anneau, le premier volet qui est sans doute le plus abouti des trois, et surtout celui qui résiste le plus au temps.
Retour en 2013 et au second volet des aventures de Bilbon Sacquet de la Comté. Peter Jackson semble avoir retenu la leçon et commence son film de manière très énergique: un rapide flashback dans une taverne et le retour aux héros là où nous les avions laissés c’est-à-dire poursuivis par les Orques menés par Azog lui-même. Pression d’emblée installée et que le néo-zélandais ne relâchera jamais, accumulant des morceaux de bravoure parfois plaisants (le combat entre Elfes et Orques dans la Forêt Noire) mais parfois proches du ridicule, comme les Nains échappant aux Elfes et aux Orques à bord de tonneaux, faisant ressembler le film à un mauvais jeu vidéo d’arcade de la fin des 90′s.
Alors certes on est pris de sympathie pour ces Nains et ce hobbit attachants, enervés par ces Elfes mais dont on sait qu’ils sont du côté des cool guys, effrayés par les Orques et par l’apparition de Sauron (manière habile du scénario de raccorder les deux trilogies au prix de la fidélité avec l’oeuvre originale), émerveillés par la richesse de la Terre du Milieu (notamment LacVille, mélange d’Europe protestante du 16ème siècle et de Russie médiévale) et tenus en haleine par un scénario qui ne laisse aucune place au temps mort jusqu’au climax final: la confrontation avec Smaug, la grande réussite du film. Smaug, le dragon, le Tyran sous la montagne est véritablement effrayant et à lui-seul justifie et pardonne les scènes parfois ratées des 2 premiers volets. Peter Jackson renoue avec son ambition d’origine évoquée à l’époque de la première Trilogie: faire retrouver aux effets spéciaux numériques la poésie et l’imaginaire des trouvailles visuelles de Ray Harryhausen. On y est presque.
Seulement voilà, tout ça sent le réchauffé et Jackson – qui n’avait aucune envie de faire le film – tire sur la corde d’une recette de mise en scène qui ressemble à un fonds de commerce – une histoire d’amour fabriquée, des araignées, une forêt, des cités au bord de la misère gouvernée par un roi fainéant et corrompu – qui fait que chaque situation et personnages peuvent retrouver son équivalent dans la Trilogie de l’Anneau. Et surtout, il y a cette mise en scène!! Peter Jackson se contente ici du minimum syndical, pire il accentue les défauts déjà présents en 2001, 2002 et 2003: des mouvements de caméra rapides et incohérents et surtout ces plans larges aériens, mix entre du Yann Arthus Bertrand et une pub pour l’Office du Tourisme kiwi. Ça fait plus de dix ans qu’on sait que c’est beau la Nouvelle-Zélande mais que c’est surtout trop loin et trop cher.
Le Hobbit: la Désolation de Smaug et par là-même la franchise Tolkien prennent un coup de vieux par-là où on ne l’attendait pas: la télévision. Alors que, fort de son budget, le Hobbit offre au regard une foire d’effets spéciaux époustouflants (mais le CGI ça vieillit très vite, essayez de regarder le premier Matrix pour voir), il se fait doubler au niveau de l’émotion et de l’enjeu humain par Game of Thrones, l’autre fresque heroic fantsy. Assez ironique quand on sait que GOT n’aurait pas existé sans Jackson. Alors qu’un troll, un orque, voire même un dragon ne nous impressionnent plus chez Jackson en tant que simple élément d’un éco-système beaucoup plus large et délirant, un simple coup de couteau dans le ventre ou les pleurs de Lady Stark nous apparaissent comme des enjeux humains, dramatiques et cinématographiques beaucoup plus forts. Impossible dans le Hobbit où le récit – déjà alourdi par l’amourette entre le Nain et l’Elfe – réduit les personnages à de pures fonctions archétypales.
Evidemment, tout n’est pas à jeter dans ce Hobbit, loin de là, il reste un magnifique spectacle dans lequel on en prend les yeux pendant près de trois heures. Et ce n’est pas Orlando Bloom frappé d’une étrange paralysie du visage qui nous gâchera le plaisir.
En bon réalisateur futé, Jackson garde ses meilleures cartes pour la fin et le troisième volet, instaure une relation plus complexe entre personnages (un trio amoureux entre Nain et Elfes et surtout la dérive vers la folie et la cupidité d’un Thorin aveuglé par la recherche de l’Arkenstone) et surtout nous annonce une bonne grosse bataille comme on les aime.
Encore une année à attendre!
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