Pétition des sacrifiés : l’UPA gonfle-t-elle ses chiffres ?

Publié le 13 décembre 2013 par Copeau @Contrepoints
Analyse

Pétition des sacrifiés : l’UPA gonfle-t-elle ses chiffres ?

Publié Par Alexis Vintray, le 13 décembre 2013 dans Travail & emploi

L’UPA revendique 500 000 signataires a sa pétition de défense des petites entreprises. Des chiffres manipulés et gonflés par 10. Démonstration.

Par Alexis Vintray.

L’Union Professionnelle Artisanale (UPA) est sous le feu des projecteurs pour le beau succès de sa pétition qui dénonce le matraquage fiscal dont sont victimes les petits entrepreneurs. L’UPA a ainsi envoyé hier un communiqué se félicitant que plus de 500 000 signataires avaient répondu à son appel, suscitant des articles dans toute la presse française (Les Echos, La Tribune, Le Figaro, AFP, etc.). Pourtant, si la justesse de la cause est indéniable, les chiffres de la pétition semblent (bien mal) manipulés.

Grâce à différents outils comme le cache Google ou le site archive.org, il est très facile de reconstituer l’historique du nombre de signataires par jour, et de voir que le compteur sur le site augmente de façon assez régulière, d’environ 20 000 signataires par jour. De 135 000 signataires le 25 novembre (source), on passe à 536 936 le 12 décembre à 23h. Soit 23 643 signataires nouveaux par jour, 937 à l’heure, 16 à la minute, nuit et jour. Pourtant, faites l’exercice sur le site, vous verrez que le compteur des signatures augmente au mieux de 1 voire 2 par minute en journée. Pire, à partir de 22h, c’est à grand peine que vous trouverez 15 personnes… par heure :  six personnes seulement signent ainsi entre 22h48 et 23h11. C’est à peine 1/60e de ce qu’il faudrait si les chiffres annoncés par l’UPA étaient vrais.

Mais comment les Sacrifiés de l’UPA arrivent-ils alors à 500 000 signataires ? En ajoutant artificiellement quelques dizaines de milliers de signatures au compteur ! La preuve ? Nous avons pu attraper deux de ces ajouts peu discrets et les immortaliser grâce à des copies d’écran (au bas de cet article) : à 16h19 hier, 512 931 signataires. A 17h43, 513 059, 130 de plus, normal. A 18h57, accrochez-vous, le compteur a explosé à 536 786 signataires. 24 000 signataires apparus de nulle part : des cinq signataires minutes, on est passé à … 1 695 ! Et la croissance revient ensuite dans l’ordre, puisqu’à 19h02, 536 790 signataires sont recensés, soit un par minute. Admirez la courbe de croissance sur quelques heures :

Malgré une demande d’éclaircissements demandée par nos soins à l’UPA, les chiffres sont à nouveau embellis ce matin, puisque de 537 273 signataires à 10h55, on passe à 547 885 signataires à 11h25, avant de retrouver la croissance normale (547 890 signataires à 11h29). En moins de 24 heures, ce sont ainsi près de 35 000 signatures qui sont apparues de nulle part.

Sachant que la pétition est signable exclusivement en ligne (c’est l’UPA qui le dit), l’argument d’un ajout massif de signatures papier ne tient pas et il ne reste guère plus que l’explication de la manipulation.

Combien de vrais signatures alors ? Une estimation peut être faite sur la base de 1 signature par minute (moyenne observée, voir le graphique). Cela ferait 1 500 signataires par jour, sur un mois, 50 000 personnes. Honorable, surtout pour un sujet peu « tendance » mais à des années-lumière des 500 00 affichés.

Dommage car la cause défendue par les Sacrifiés de l’UPA non sans un certain talent (voir la vidéo, excellente) mérite d’être défendue : l’usine à gaz fiscale française assassine en effet les petits entrepreneurs, alors que les grandes entreprises peuvent se payer les services de conseillers fiscaux. Une flat tax serait la bienvenue pour cesser de faire payer par les petits les privilèges des gros. Une cause suffisamment juste et urgente pour avoir besoin de mauvais trucages…


è