L’écrivain Dany Laferrière Photo : AFP/MIGUEL MEDINA
Radio-Canada : L’écrivain d’origine haïtienne Dany Laferrière est le premier Québécois à faire son entrée à l’Académie française. Il a été élu au premier tour jeudi, à Paris, par les membres de la célèbre institution, avec 13 voix. L’auteur de Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer a été préféré à cinq autres candidats : Catherine Clément (3 voix), Yves-Denis Delaporte (0 voix), Arthur Pauly (1 voix), Jean-Claude Perrier (4 voix) et Georges Tayar (4 voix). À 60 ans, Dany Laferrière devient le plus jeune membre à siéger sous la coupole. Il occupera le fauteuil numéro deux, autrefois dévolu à Montesquieu et, plus tard, à Alexandre Dumas fils, lui-même d’origine antillaise, et laissé vacant par Hector Bianciotti.
La secrétaire perpétuelle de l’Académie française, l’historienne Hélène Carrère d’Encausse, avait personnelle- ment sollicité la candidature de l’écrivain, qui faisait figure de favori pour l’homme de lettres français Bernard Pivot.
Quelques minutes après être devenu « immortel » (c’est ainsi que l’on appelle les membres de l’Académie française), Dany Laferrière a réagi depuis sa ville natale, Port-au-Prince, en Haïti, où il a appris la nouvelle. Il a tenu à clarifier un point : non, il ne déménagera pas à Paris, même si, de son propre aveu, « il ne tient jamais en place ». S’il affirme ne pas vouloir « chambouler quoi que ce soit » en entrant à l’Académie française, il reconnaît que le simple fait de poser sa candidature était un chamboulement en soi.
Hélène Carrère d’Encausse avait même consulté l’actuel Président de la République française, François Hollande, le protecteur de l’institution, sur le cas de ce candidat ni français, ni parisien, né en Haïti et installé à Montréal. Vérification faite, les statuts de l’Académie française n’incluent aucune condition quant à la nationalité des candidats à l’Académie. Et pour Hélène Carrère d’Encausse, « la nationalité, c’est la langue ».
Une nomination qui suscite des réactions enthousiastes
Pauline Marois et Maka Kotto ont réagi par voie de communiqué. Pour la première ministre du Québec, « l’œuvre de M. Laferrière fait honneur à la langue française ». Elle s’est dite convaincue « qu’il saura apporter à l’Académie française une contribution exceptionnelle et y faire entendre une voix originale. » Le ministre de la culture a quant à lui déclaré éprouver « un mélange de fierté, d’admiration et de reconnaissance ». Selon lui, « c’est la littérature québécoise et la littérature haïtienne qui entrent avec [Dany Laferrière] à l’Académie française », et c’est « une grande nouvelle pour la culture québécoise ».
Fondée par le cardinal Richelieu il y a 378 ans, l’Académie française, composée de 40 membres a pour mission de surveiller la langue française.
Rappelons que Dany Laferrière a dû fuir la dictature des Duvalier en Haïti en 1976. Installé à Montréal, il publie son premier roman, Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, en 1985, et connaît un succès immédiat (il a été traduit en 14 langues). Une dizaine de romans et de nombreuses distinctions suivront, faisant de Dany Laferrière une figure marquante de la littérature québécoise. Son vingtième et plus récent roman s’intitule Journal d’un écrivain en pyjama (Mémoire d’encrier).
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