"Si ELLE est déjà là, avec son père, ma mère me laisse avec eux et rentre à la maison ou va faire des courses. Je crois que le père d'ELLE est un ami de ma mère. Il vient chez nous de temps en temps."
C'est l'histoire d'une luciole tombée dans l'eau sucrée, c'est l'histoire d'un couple d'hirondelles ballotté au gré des traditions, c'est aussi l'histoire d'un coquillage aux parfums de camélia et de myosotis qui murmura à l'oreille de deux enfants : « je t'aimerai toujours » et « ne m'oublie pas ».
C'est l'histoire d'un amour impossible, à cause d'un amour refusé.
Les secrets traversent les décennies, les générations de deux familles, résistent au tremblement de terre, à la guerre, réveillent les traditions, flottent sur la rivière, entre les corps brûlés. Ils s'envolent avec les hirondelles, dansent avec les lucioles, chantent avec les cigales et les B-29. Ils se glissent dans les draps indécents d'adultères meurtriers, rythment le « kotokotokoto » des hamaguri, éclosent au fil des saisons.
Ils fécondent des tissus de mensonge, se nourrissent d'origines douteuses, exhalent des âmes tourmentées.
Le temps défile, d'avant en arrière, accéléré ou ralenti, opère des zooms rétrospectifs, offre différents points de vue, plusieurs narrateurs, différents interlocuteurs. Personne n'est de trop pour porter un tel secret, pour le rendre supportable. Car, au final, il n'y en a qu'un.
Il tient dans le creux de la main, dans un coquillage, dans la lettre K, il est gravé sur une pierre tombale, il est vivant, mort aussi, il est ici, et loin, là-bas. Mais surtout, il protège quelqu'un. Il protège les décennies, les générations de familles à venir, les hirondelles, le parfum des fleurs. Il tient à distance la souffrance passée.
Il a tué, et épargnera.
Pur, délicat et fleuri en toutes circonstances, comme l'écriture qui le porte...
Et l'emporte Tsubaki.
Note : 11 (camélias)/10 (myosotis)