Salut Réza

Il vendait les journaux pas loin de chez moi et j'achetais mon Libé matinal chez lui. Et puis Chasseur d'Images, que je ne me sentais pas de ne pas lui prendre chaque mois, parce qu'il me le mettait gentiment de côté, même quand je savais pertinemment que je n'aurais pas le temps de le lire.

Je papotais deux trois minutes avec lui de temps en temps. Juste assez pour savoir qu'il avait quitté l'Iran il y a longtemps et qu'une partie de sa famille vivait aux Etats-Unis. Il leur rendait visite régulièrement. Il avait l'air cultivé, je m'étais imaginé qu'il avait été enseignant.

Je m'étais dit qu'un jour peut-être, je l'inviterais à prendre un thé à la maison, histoire d'en savoir un peu plus. Peut-être pour son départ. Comme beaucoup de kiosquiers les ventes allaient moins bien et il évoquait de temps en temps l'idée de fermer.

Et puis en octobre, je crois, il était parti en vacances, disant qu'il allait se reposer. A la date du retour supposé il n'était pas là. Je me suis dit qu'il avait finalement opté pour la retraite, fatigué des longues journées à attendre un passant plus rare - et fatigué de la gestion peu vraisemblable des NMPP.

Et puis samedi un autre kiosquier, voisin, m'a dit qu'il était mort, mais n'en savait pas plus. Pas de thé donc pour mieux connaître Réza. Il me reste de lui cette photo de l'hiver 2010, dont je lui avais offert un tirage. Il y discute avec une cliente, concentré, ayant abandonné très provisoirement son sourire habituel. Ne manque que la pipe, de laquelle il tirait régulièrement une bouffée, été comme hiver.

Salut Réza.