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E-commerce en Afrique : pourquoi le business model classique ne marche pas

Publié le 02 décembre 2013 par Wilntonga

C’est vrai que les méga structures de e-commerce ont dessiné clairement leur business model. Et celui-ci repose presqu’invariablement sur un système de vitrine en ligne, de choix en ligne, de paiement en ligne et de livraison à distance. Amazon et EBay, pour ne prendre que les deux principaux géants en sont l’illustration parfaite. Du coup, la plupart des velléités de commerce électronique en Afrique francophone ont construit leur stratégie sur le même business model…

Sur mon dernier article concernant le Facebook business au Burkina Faso, j’avais déjà eu un commentaire remettant en cause l’idée qu’il s’agissait d’un commerce en ligne sur le principe qu’il ne s’alignait pas sur ce business model…Et il y’a quelque jours, sur la page Facebook de Verone Mankou, après qu’il ait publié sa satisfaction de l’arrivée de la carte Africards au Congo, un de ses fans a commenté en disant qu’il peut maintenant se lancer dans le e-commerce….

C’est vrai que ce business model est profondément ancré dans nos esprits au point où la plupart des projets de e-commerce ont échoué en voulant strictement s’aligner sur lui. Parce qu’en réalité, les grandes lignes de ce modèle d’affaires tels que pratiqués par les EBay et autres géants, ont des réalités beaucoup moins simples en Afrique francophone notamment.

D’abord le problème de crédibilité

C’est le premier obstacle à ce modèle d’affaires. L’idée d’acteurs qu’on ne connaît pas et que l’on imagine entrain de nous tromper est plus forte que l’idée d’une véritable opportunité. Elle est souvent justifiée par la qualité si peu professionnelle des sites et espaces de e-commerce dont la médiocrité inspire méfiance. Et même quand certains ont mis des moyens pour faire du bon boulot, la plupart des pages sont restés statiques…et bien souvent avec des illustrations que l’on sait ne pas venir des produits en vente. Bref, il y’a presque toujours eu un prétexte pour ne pas faire confiance et conséquence, les clients potentiels ont été peu présents sur ces sites.

Mais je pense que le problème de crédibilité est un problème qui peut plutôt facilement se régler. Il y’a un travail que les acteurs du e-commerce font souvent bien assez peu et qui peut donner de la confiance en leurs espaces de présentation de produits et à tout leur système. J’y reviendrais probablement dans un autre article, mais disons simplement que la crédibilité n’est pas le problème le plus grave du e-commerce.

Ensuite le problème de la livraison

Le business model décrit plus haut rencontre des difficultés énormes également dans les réalités africaines. Les  services de poste de certains pays sont même des ennemis farouches à ce type de démarche. Ils volent carrément les envois. Les autres sont soit chers, soit lents. Mais le fond du problème le plus grave est qu’une très faible proportion de la population dispose d’une adresse postale dans la plupart des pays.

Il reste les solutions clairement locales, mais elles sont très peu exploitées. Comme les envois à travers les agences de voyage et autres. La difficulté est que ces solutions nécessitent des déplacements soit de l’envoyeur, soit du récepteur, soit même des deux…Ce qui n’est pas de nature à faciliter les transactions quand on sait que dans certains pays, ces agences de voyage sont parfois éloignées.

Et que dire des envois par des agences d’envois locales…Leur prix est encore prohibitif pour des affaires dont la caractéristique principale est justement qu’elles doivent être bonnes…c’est à dire, le meilleur au plus bas prix.

Ce que certaines structures ont tenté enfin, ce sont des points de livraison et des livraisons face à face. C’est dans ce créneau qu’on trouve les projets de e-commerce qui se débrouillent mieux que les autres.

Le problème des paiements

Disons le tout de suite, le paiement est le principal tendon d’Achilles des projets de e-commerce en Afrique. A cause bien sûr de la monétique. Les moyens de paiement électronique ont été bien peu développés jusque dans les années 2010 où progressivement, ils ont commencé à prendre de l’envol. Mais même aujourd’hui, les cartes de paiement sont très élitistes et l’habitude de les utiliser pour les transactions en ligne est au sein même de cette élite, l’habitude la moins fréquente.

Certains ont essayé les paiements par les moyens classiques d’envoi d’argent (Money gram ou Western Union). Mais vu toutes les escroqueries qui se sont faites en demandant le paiement par ces moyens…la réticence observée peut bien se comprendre.

D’autres enfin ont essayé les paiements directs par voie physique en face à face. Cela semble marcher surtout sur les groupes Facebook.

Les problèmes de gestion de litige

C’est enfin la dernière grosse épine des projets de e-commerce en Afrique. Certains pays ont même élaboré des textes comme au Cameroun ou au Sénégal, mais ces textes n’étant basés sur aucune vraie expérience contextuelle, ils sont aussi peu fiables que les projets eux-mêmes. Ils n’engagent aucune mesure susceptible de garantir les business, mais sont presque tous fondés sur une approche répressive. La grande question de qu’est ce qu’on fait quand ca ne va pas reste grand ouvert et dans cette faille, des milliers de fraudeurs sont à l’affût.

Le business model de EBay et Amazon n’est peut-être pas le meilleur en ce moment dans nombre de pays Africains. Et le comprendre devrait permettre au moins d’aller vers d’autres modèles d’affaires dans les projets de commerce en ligne : des modèles capables cette fois de prendre en compte le contexte et ses contraintes et de dégager dans cela, l’innovation nécessaire pour virtualiser les échanges commerciaux.


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