Des souvenirs géolocalisés avec leur information spatiale dans notre mémoire, comme tagués avec toutes leurs données spatiales, c’est ce que décrivent ces neuroscientifiques de l’Université de Pennsylvanie. Avec l’aide d’un jeu vidéo, les chercheurs montrent comment nos cellules cérébrales encodent les informations spatiales en « géomarquant » certains souvenirs. Ils expliquent ainsi pourquoi se souvenir d’une expérience fait revenir à l’esprit d’autres événements qui ont eu lieu au même endroit. Des conclusions présentées dans la revue Science.
Les scientifiques de la Penn et de l’Université de Fribourg ont utilisé un jeu vidéo dans lequel les joueurs participants devaient naviguer à travers une ville virtuelle pour livrer différents objets à des endroits précis. Les participants, durant une première période, ont pu explorer librement la ville et apprendre les emplacements des livraisons. Une fois le jeu commencé, les participants ont été informés de leur prochain arrêt sans être informés de ce qu’ils livraient. Après avoir atteint leur lieu de livraison, le jeu leur révélait ce qu’ils venaient de livrer et leur donnait les instructions concernant leur prochain arrêt. Après 13 livraisons, l’écran est devenu tout noir et les participants devaient se souvenir du plus grand nombre d’articles livrés dans l’ordre où ces articles leur revenaient à l’esprit.
Le jeu a donc permis d’enregistrer non seulement toutes les actions effectuées (ou expériences) et de mesurer les réponses neuronales, à la fois lors de la navigation spatiale et puis plus tard pendant le rappel verbal. Les chercheurs ont pu ainsi corréler l’activation neuronale associée à la formation des souvenirs spatiaux (les lieux de livraison) et au rappel des souvenirs épisodiques (les articles livrés) et donc déterminer si le système de mémoire spatiale est activé même lorsque les souvenirs épisodiques sont accessibles.
Des schémas d’activation associés : L’analyse des enregistrements cérébraux générés pendant le jeu a permis d’établir une carte de neurones correspondant à la disposition de la ville, en particulier dans la région de l’hippocampe.. Concrètement, lorsqu’un participant passait par un lieu de livraison, les chercheurs ont pu corréler le souvenir spatial de cet endroit avec un schéma d’activation neuronale.
Cartes d’activations neuronales « en main », les chercheurs ont pu recouper les souvenirs spatiaux de chaque participant avec leurs souvenirs épisodiques des articles livrés. C’est ainsi qu’ils constatent et font la preuve que les neurones associés à un souvenir spatial sont également associés à l’élément qui a été livré sur ce site. En gros, expliquent les chercheurs, à partir du souvenir spatial on pourrait retrouver l’article livré !
« L’épisodique tagué avec le spatial »: Si les chercheurs ne peuvent pas distinguer si un souvenir spatial va aider le participant à accéder à nouveau aux souvenirs épisodiques associés, ils démontrent que l’activation du schéma neuronal associé à ce souvenir spatial joue un rôle dans les processus de récupération de la mémoire.
C’est la première preuve d’un « taggage » des souvenirs épisodiques avec leurs données spatiales suggérant que les fonctions de la mémoire spatiale et épisodique sont intimement liées et peuvent refléter une architecture fonctionnelle commune.
Il faut néanmoins rappeler 2 études : Une étude de 2011, de biologistes de l’université de Californie (San Diego) qui montrait que des impulsions électriques dans le cerveau, déjà connues pour jouer un rôle dans l’organisation des fonctions cognitives, comme la mémoire, permettaient aussi de stocker les informations nécessaires pour nous orienter au sein de notre environnement et faire fonctionner notre mémoire spatiale. Ainsi qu’une autre étude de l’Université de Drexel qui identifiait des neurones humains dédiés à la navigation et qui nous aident à conserver les coordonnées de notre emplacement par rapport à un environnement qui nous est peu familier.
Source: Science 29 November 2013 DOI: 10.1126/science.1244056 Neural Activity in Human Hippocampal Formation Reveals the Spatial Context of Retrieved Memories
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