Front de Gauche vs Front National : pourquoi Mélenchon va finir KO
Publié Par Kevan Saab, le 1 décembre 2013 dans PolitiqueA cause (ou malgré) leurs grandes similitudes, Front national et Front de gauche se haïssent. Du duel, c’est le Front national qui sortira probablement gagnant.
Par Kévan Saab.
Si les partis au centre du spectre politique n’arrivent pas à tirer leurs marrons du feu, on assiste au contraire à un véritable essor des partis d’extrême gauche et d’extrême droite. Sur le même segment de marché de l’antilibéralisme forcené, de la relance keynésienne sans limite et du dirigisme on retrouve toute une myriade de petits partis ainsi que deux machines de guerre électorales : le Front national avec Marine Le Pen à sa tête et le Parti de gauche co-présidé par Jean-Luc Mélenchon.
Malgré la proximité intellectuelle qui les unit, l’inimité est consommée entre les deux formations. À titre de preuves on pourrait citer les clashs réguliers entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, ou la candidature surprise de Mélenchon dans la circonscription de Le Pen aux législatives :
Rien de bien surprenant à cette hostilité affichée, l’électorat de Mélenchon et de Le Pen est à peu de chose près le même. En clair, avec des scores élevés chez les 18 – 24 ans et les classes populaires, en particulier chez les hommes, le PG et le FN courtisent plus ou moins les mêmes électeurs (électorat de Mélenchon décortiqué ici, électorat de Le Pen décortiqué ici et là). Mélenchon et Le Pen l’ont bien compris, dans le camp des « anti-systèmes », il y a assez de potentiel pour se faire élire, mais seulement si on ne partage pas le gâteau avec un autre, d’où leur guerre sans relâche.
L’élection présidentielle de 2017 est encore loin, mais en tant qu’observateur extérieur, j’annonce aujourd’hui le pari suivant : Marine Le Pen sera largement devant Mélenchon avec plus de 20% des voix, alors que ce dernier sera relégué en quatrième ou cinquième place avec au mieux 10% des voix.
Explications
Si Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon se rejoignent sur l’essentiel et prônent ouvertement un genre de socialisme-nationaliste pour l’un et un national-socialisme pour l’autre, lui a une conception universaliste du socialisme, elle non. Voilà qui scellera la défaite de Mélenchon comme nous allons le voir.
Bien-sûr, comme chacun sait, Mélenchon traîne derrière lui 32 ans d’adhésion au PS, adhésion qui lui a permis de mettre le pied à l’étrier politique très jeune et de vaquer dès lors de mandat en mandat depuis 27 ans déjà, chose qui comme on peut facilement le comprendre entrave quelque peu sa crédibilité de candidat anti-système et d’opposant au PS. Néanmoins cette faiblesse de Mélenchon est contrebalancée par le fait que Marine Le Pen ait elle aussi bien profité de la bonne soupe républicaine avec bientôt une décennie de présence sur les fiches de paye du Parlement européen.
Comme on l’a vu, le passif de nos deux candidats s’avère peu explicatif des vestes répétées de Mélenchon. En réalité, l’explication est à chercher plutôt du côté d’une évolution des mentalités des classes populaires françaises. En effet, si les classes populaires ont bien compris que Le Pen et Mélenchon proposent plus ou moins la même chose en matière économique, ils ont en revanche noté le fossé qui sépare les deux candidats sur les questions de l’immigration et de la sécurité.
Commençons par traiter la question de la lutte contre la délinquance : historiquement le FN a toujours su se démarquer en utilisant cette thématique, à contrario, le PG brille par son silence sur le sujet. D’ailleurs, sur son site, le Parti de gauche ne mentionne nulle part le thème de la sécurité, preuve du désintérêt total du parti pour la question. Seulement, comme le montre une étude IFOP des priorités des Français avant la présidentielle de 2012 (disponible au complet ici), les classes populaires, représentée ici par les ouvriers, sont significativement plus préoccupée par les problèmes de sécurité que la moyenne des Français :
La lutte contre la délinquance est-elle une priorité ?
Que nous disent ces chiffres ? Ils nous indiquent que les « petites gens » sont bien plus préoccupées par les problèmes de délinquance que le Français moyen. Au passage, on imagine sans peine que ces chiffres on dû continuer à grimper au rythme des affaires récentes (bijoutier de Nice, braquage en plein Paris, etc.), alimentant naturellement le vote FN au détriment, notamment, du Parti de gauche.
Passons maintenant au thème de l’immigration, thème intimement lié à la délinquance s’il en est, au vu de la surreprésentation évidente des immigrants et fils d’immigrants dans les statistiques policières. Que pensent donc les classes populaires au sujet de l’immigration ?
La lutte contre l’immigration clandestine est-elle une priorité ?
Là encore, on remarque clairement que les classes populaires sont bien plus sensibles à la question que le reste des Français. On connaît la position anti-immigration du FN, et celle pro-immigration du PG, je vous laisse donc imaginer pour qui les classes populaires sensibles à cette question voteront en 2017. D’ailleurs, il est bien probable que les opinions se soient largement radicalisées sur ce sujet suite à l’affaire Léonarda et à la publication d’un rapport accablant sur la manière dont la famille Dibrani a tout bonnement abusé des largesses de l’État.
L’évolution naturelle du socialisme vers le national-socialisme
Friedrich Hayek, prédisait déjà en son temps dans « La Route de la Servitude » que l’avènement du socialisme allait conduire à la fermeture hermétique des frontières tant pour les biens que pour les hommes. Pour ce qui est des biens, le mécanisme est relativement bien compris : la mise en place de mesures protectionnistes étant la conséquence directe de l’effondrement de la compétitivité du pays suivant la mise en place d’un programme économique socialiste. Pour ce qui est des hommes, Hayek expliquait très justement que le principe de base du socialisme, c’est-à-dire l’accaparement des richesses d’un pays par l’État pour ensuite les redistribuer sur des critères d’égalité, implique nécessairement de distribuer une plus petite part du gâteau à chacun au fur et à mesure qu’augmente la population. Ainsi, prédit Hayek, les ouvriers d’un pays riche n’ont aucun intérêt à voir débarquer chez eux des immigrants plus pauvres qui diminueront mathématiquement leur part du gâteau lors du partage final. Le socialisme ne peut s’appliquer que dans un pays fermé, afin d’empêcher aux plus pauvres d’y entrer et aux plus riches d’en sortir, tout en bloquant, bien-sûr, l’accès aux produits importés moins chers et de meilleure qualité.
L’électorat populaire français, tout comme le reste de l’électorat français du reste, n’est pas dupe : ces derniers comprennent bien que le système français est en faillite, comme le témoigne les 89% d’ouvriers qui pensent que la réduction de la dette publique est un sujet prioritaire ou important. En fait, si les Français rechignent toujours à accepter les réalités du 21ème siècle, comme en témoigne leur volonté de repousser le réveil brutal qui attend notre pays en élisant dernièrement un président dont le seul programme consiste à rafistoler le rafiot France, qui prend l’eau de toute part, à coup d’impôt tout azimut ; ces derniers n’ignorent pas que les caisses sont vides. L’État-providence à la française est à sec, mais plutôt que de changer de modèle, une bonne partie d’entre nous préfèrent gagner quelques années en excluant de l’État-providence les immigrés. Certes, les programmes sociaux clientélistes dont bénéficient les immigrés, comme par exemple l’Aide médicale d’État, sont un poids dont nos finances publiques se seraient bien passées. Cependant, avec ou sans ceux-ci, le modèle français n’est pas viable, rien ne sert de poursuivre cette fuite en avant qui nous laissera ruinés, mais aussi isolés du reste du monde.
Un résultat prévisible
Malgré son ambition d’être le tribun du peuple, M. Mélenchon ne comprend que partiellement son électorat. Comme on l’a vu, pour les classes populaires, la sécurité et l’immigration sont des sujets clés qui départageront les deux Fronts aux prochaines élections. Si les deux partis peuvent tous les deux bénéficier du gonflement des déçus de l’UMP et du PS, le FN empochera le gros du bataillon des mécontents pour des raisons politiques, mais aussi démographiques.
La population française est de plus en plus diverse et métissée, tendance qui il est vrai avantage largement Mélenchon vis-à-vis de Le Pen. Cependant d’après l’INSEE, 1 habitant sur 5 seulement est issu de l’immigration (en comptant les immigrants et les enfants d’immigrants). Pour n’arranger en rien les affaires de Mélenchon, l’électorat black-blanc-beur est une chasse gardée du PS, qui ne se laissera en aucun cas dépasser sur ce terrain sans livrer bataille.
À côté de ca, Marine Le Pen saura puiser, comme à chaque élection, dans le ras-le-bol face à l’insécurité, face aux excès du communautarisme ici ou là, face au manque de réponse crédible de la gauche sur la question des Roms, etc. Bref, dans le contexte qui est le nôtre, il semble évident que le FN va écraser, une fois encore, le PG en 2017.
Les dés sont déjà jetés : sans un changement complet de paradigme dans ce pays, le FN poursuivra son ascension. En 2017, il écrasera le PG et possiblement le PS moribond. Qui sait combien de temps il lui faudra pour entrer au gouvernement ou à l’Élysée ?
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