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[Livre] Une part de ciel – Claudie Gallay

Par Tix @ThierryTix
[Livre] Une part de ciel – Claudie Gallay

France – 2013

  • PRÉCISIONS

Auteur : Claudie Gallay
Publication originale : 2013
 

  • NOTE GLOBALE :

Notation NA-08

 

  • DE QUOI ÇA PARLE ?

Aux premiers jours de décembre, Carole regagne sa vallée natale, dans le massif de la Vanoise, où son père, Curtil, lui a donné rendez-vous. Elle retrouve son frère et sa soeur, restés depuis toujours dans le village de leur enfance. Garde forestier, Philippe rêve de baliser un sentier de randonnée suivant le chemin emprunté par Hannibal à travers les Alpes. Gaby, la plus jeune, vit dans un bungalow où elle attend son homme, en taule pour quelques mois, et élève une fille qui n’est pas la sienne. Dans le Val-des-Seuls, il y a aussi le vieux Sam, pourvoyeur de souvenirs, le beau Jean, la Baronne et ses chiens, le bar à Francky avec sa jolie serveuse…

Dans le gîte qu’elle loue, à côté de la scierie, Carole se consacre à une traduction sur la vie de Christo, l’artiste qui voile les choses pour mieux les révéler. Les jours passent, qui pourraient lui permettre de renouer avec Philippe et Gaby un lien qui n’a rien d’évident : Gaby et Philippe se comprennent, se ressemblent ; Carole est celle qui est partie, celle qui se pose trop de questions. Entre eux, comme une ombre, cet incendie qui a naguère détruit leur maison d’enfance et définitivement abîmé les poumons de Gaby. Décembre s’écoule, le froid s’installe, la neige arrive… Curtil sera-t-il là pour Noël ?

  • NOS AVIS

Tix :

Je remercie Price Minister et ses matchs de la rentrée littéraire pour cette lecture, et cette découverte de la plume de Claudie Gallay.

La romancière a choisi de nous parler de Carole, une femme qui va retourner dans son village natal pour y attendre l’arrivée de son père et retrouver des êtres chers qui n’ont jamais quitté la commune. Son frère Philippe et sa soeur Gaby, en particulier. Mais aussi toute une galerie de personnages. De son arrivée à son départ, l’auteur va nous faire rentrer dans une routine loin d’être déplaisante, chaque journée de ce séjour va être décrite, et c’est la force de ce roman.

L’atmosphère est travaillée. Après une première approche et un style qui parait froid, l’écriture prend rapidement son sens, avec une petite distance qui ne nous empêchera jamais de nous attacher aux personnages, et dans des descriptions apparemment insignifiantes qui contribuent pourtant largement à l’intensité de ces vacances improvisées. Et ça va de ces photos atypiques que prend l’héroïne, jusqu’au livre qu’elle traduira comme un fil rouge et dont elle tirera par ailleurs les meilleurs métaphores à propos de sa situation.

« -Et ça parle de quoi, maintenant ?
-De l’éphémère.
[...]
Je lui ai montré une photo du Reichstag.
-Christo consacre sa vie à ce qui ne dure pas. Imaginer une oeuvre lui prend des années, c’est l’essentiel de son travail. Le Reichstag emballé n’a été visible que quelques jours, après il a tout démonté comme si ça ne l’intéressait plus. »

De cet aspect en forme de journal, on n’échappera pas à quelques répétitions, quelques longueurs, qui risquent d’en glacer plus d’un. Mais du côté de l’histoire, cette aventure va être une plongée dans la vie de ce village. Ouvrir ce roman, retourner au Val-des-Seuls (un lieu fictif au nom annonciateur), va avoir le même effet sur nous qu’avec Carole. Une parenthèse à sa vie, loin du train-train du reste de l’année. Une réflexion, aussi. Sur ce qu’elle est, sur ce qui l’a faite, sur ces liens familiaux à dépoussiérer.

« -Christo fait comme la neige, il révèle en cachant. Et ce qu’il cache, on le regarde d’une autre façon.
-Et quand la neige fond, toutes ces choses cachées, on les voit à nouveau.
-Oui… Et à ce moment-là, on ne les regarde plus. »

Des personnages qu’elle va rencontrer et (ré)apprendre à connaître, on retiendra de fins portraits, qui touchent régulièrement au stéréotype mais qui possèdent chacun leur côté inattendu. Le truc en plus qui va faire avancer Carole, la faire réfléchir. Certains m’ont tout de même peu attendri, la Baronne par exemple, ne m’a pas spécialement passionné. Au contraire, la Môme et Marius ont su me toucher tout le long. Carole elle-même est parfois agaçante (car humaine!), en particulier à mentionner sans cesse leur drame familial, essayant de revenir aux sources et comprendre cette distance qui s’est instaurée entre elle, et Philippe et Gaby qui sont beaucoup plus soudés.

« -Tu vas refaire ta vie ?
Je me suis marrée. La vie, on ne la refait pas. On fait des choix et on laisse des choses. Il m’arrive de penser à celles que je laisse. Les choix qui restent. Tout ce qu’on ne vit pas. Il faudrait des vies de plus pour vivre certaines de ces choses. »

Ce roman dépeint avec brio les relations humaines. Il ne faut pas s’attendre à de l’action et des coups de théâtre, bien que certains lourds secrets vont être dévoilés. Il n’aurait pas souffert de quelques pages en moins, à l’échelle de l’action disons une semaine de séjour en moins. Mais ce roman sait bousculer, sait faire de l’histoire de Carole une histoire très juste, à la fois intime, particulière et pourtant ordinaire, à propos des rapports humains. Ce roman, c’est seulement 7 semaines dans une vie, 450 pages entre nos mains, une lueur d’espoir dans l’incertitude.
Une part de ciel entre deux montagnes.


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