On entend beaucoup, ces temps derniers, une idée assez communément répandue au sujet de la prostitution ; elle serait là pour empêcher le viol. Les sociétés sexistes fonctionnent - tout au moins depuis l'antiquité - selon un principe assez connu ; les hommes ont des besoins en particulier sexuels ; un certain nombre de personnes, hommes comme femmes, doit donc être mis à leur disposition pour satisfaire leurs besoins qui ne souffriraient pas de n'être pas assouvis. Nous planons toujours plus ou moins sous la menace non dite que ce qui n'est pas donné - et devrait l'être - sera de toutes manières pris donc autant y céder de suite. C'est d'ailleurs sans doute pour cela que le viol conjugal a mis si longtemps a être puni ; si un homme s'était payé une femme à libre disposition, il paraissait tout de même un peu bizarre qu'il n'en profite pas à loisir.
L'idée que la prostitution ferait diminuer le viol est infiniment violente :
- elle nous met sous une menace constante qu'on peut nous violer si les hommes ne sont pas sexuellement satisfaits
- elle suppose qu'il faut mettre un contingent d'êtres à libre disposition de violeurs potentiels pour un mieux-être social
- elle suppose que les prostituées ne sont pas violées, ou que ca n'est pas grave ou qu'elles sont dévolues à cela.
- elle dit que les hommes s'ils ne sont pas satisfaits sexuellement deviennent des violeurs.
Étudions un peu cette dernière idée.
Il ne viendrait à l'idée de personne de justifier que, parce qu'on a voulu un collier, que c'était un besoin irrépressible, on a braqué un magasin. On ne justifierait pas qu'un instinct incontrôlable m'a poussé à arracher un iphone 5 des mains d'une passante. On n'irait pas dire non plus que des pulsions violentes qu'il faut tout de même bien comprendre ont poussé quelqu'un à en poignarder un autre.
En matière de mecs et de sexualité, tout semble totalement différent. Il y aurait l'idée communément répandue que des hommes, on ne sait pas bien lesquels, sans doute les moches, les dépressifs, les handicapés, ceux qui ont des besoins spéciaux ne peuvent absolument pas apprendre la frustration sexuelle. On peut apprendre la frustration en matière de consommation, ne pas s'acheter 50 paires de chaussures, ne pas bouffer du caviar à tous les repas, mais il est apparemment impossible de contenir ses envies sexuelles pour un homme si elles ne peuvent être satisfaites. Un homme m'expliquait ca d'une manière qu'il pensait très scientifique il y a quelques jours ; "tu comprends on a de la testostérone et ca rend agressif. Si je ne l'évacue pas, je vais être énervé et pour qu'elle sorte il faut avoir un rapport sexuel". On peut ainsi visualiser la testostérone sortant en masse de pénis partout dans le monde à chaque rapport sexuel.
On est ainsi dans l'idée qu'il n'y a même plus besoin d'expliquer tellement elle est évidente. "mais enfin c'est évident la frustration sexuelle masculine". "tout le monde sait que". "c'est tout de même connu que".
Il y a quelques temps, alors que je venais de subir une agression sexuelle dans le métro, une femme a conclu mon récit par un vigoureux "oui mais les hommes tu sais...". Il y aurait donc l'acceptation tacite que les hommes ont des mouvements incontrôlés qui les conduit, qui à te coller une main au cul, qui à te toucher les seins, qui à te fourrer leur bite dans le vagin alors que tu n'es pas d'accord. Mais ils sont comme cela, il faut bien s 'en accommoder tels de grands enfants un peu impétueux. Le viol serait d'ailleurs une sorte de tic.
D'ailleurs, si certaines prêtres violent des enfants, nous dit-on, c'est qu'ils sont célibataires. Pensez donc ! Un homme privé de sexe devient tellement fou, tellement violent qu'il prend n'importe quoi, d'un enfant de 6 ans à une chèvre (à tout le moins on devrait lui filer une boite de corned beef cela devrait faire l'affaire aussi) pour se calmer.
Mais essayons d'imaginer comment tout cela peut bien se passer.
Un homme moche et frustré - c'est ainsi qu'on nous les vend - a des envies sexuelles et elles sont normales, deviennent même des besoins irrépressible car c'est un homme. Il devient un peu comme une machine sous trop forte pression. Alors je ne sais pas bien comment on justifie ca médicalement, si un homme ne baise pas il a ses couilles qui gonflent, gonflent, gonflent car des litres de sperme s'y entassent ? Un surplus de testostérone le fait devenir vert et déchirer ses habits ? Il faut alors le vider. Au sens propre du terme. Il va donc voir une prostituée et tout va mieux. (c'est ce que c'est simple un homme tout de même).
On nous vend toujours l'idée que les féministes détestent les hommes et en ont une piètre image. Mais quelle espèce de société prend les hommes qui la composent pour des êtres tellement incapables de se contrôler, prêts à violer tout ce qui passe si on ne satisfait pas leurs besoins sexuels ? Quelles société vend qu'un homme est mû par sa testostérone et viole à qui mieux mieux s'il ne l'évacue pas ?
Les gens qui, tous les jours, par paquets de 100, viennent nous dire que l'arrêt de la prostitution (où, quand ?) ferait augmenter le viol semblent penser qu'il y a des hommes - lesquels, où sont-ils - qui sont très bizarres. Ils ne les connaissent pas, ce ne sont pas des hommes de leur famille, ou leurs amis, mais ils existent. Et ils violent. Ou alors il faut leur donner des gens pour qu'ils ne violent pas. Je propose donc qu'on organise des services sexuels obligatoires ; tous les gens qui pensent que la prostitution fait diminuer le viol - et je ne peux que me ranger devant cette idée de bon sens - feront, hommes comme femmes, un an de service sexuel afin de soulager un peu les autres, qui, ainsi vivront moins dans la menace du viol par ces monstres tapis dans l'ombre.