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Pétitoire et possessoire

Publié le 29 novembre 2013 par Christophe Buffet

Un arrêt sur la distinction entre action possessoire et action pétitoire :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 9 septembre 2008) rendu sur renvoi de cassation ( Civ. 3, 16 décembre 2003, pourvoi n° 02-16720) que, le 27 mai 1999, les époux X... ont assigné au possessoire devant le tribunal d'instance d'Apt les époux Y..., propriétaires de la parcelle voisine de la leur, en démolition d'un mur les empêchant d'accéder à leur bassin ; que ce tribunal, par jugement du 17 février 2000 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 18 avril 2002, a déclaré leur action irrecevable ; que, les 29 et 30 septembre 2003, les consorts X... ont assigné les époux Y... et plusieurs autres voisins en bornage de leurs propriétés devant le tribunal d'instance d'Apt lequel, par jugement du 1er août 2005, a reçu l'exception d'incompétence soulevée par les époux Y... et s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon ; que, le 16 décembre 2003, l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Nîmes du 18 avril 2002 a été cassé ;

Attendu que les consorts X... et Mme A... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur action possessoire, alors, selon le moyen :

1°/ que l'existence du droit d'agir en justice s'apprécie à la date de la demande introductive d'instance ou de l'appel et ne peut être remise en cause par l'effet de circonstances postérieures ; qu'en se fondant, pour déclarer irrecevable l'action possessoire des consorts X..., sur l'existence d'une action en bornage, dans le cadre de laquelle ils avaient formulé les mêmes demandes, dont il résultait de ses propres constatations qu'elle avait été introduite postérieurement à l'assignation au possessoire et à l'appel formé à l'encontre du jugement du tribunal d'instance d'Apt du 17 février 2000, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1266 du code de procédure civile ;

2°/ que le bornage se limitant à marquer la ligne séparative de deux fonds par l'apposition de signes matériels, l'action en bornage n'est pas destinée à trancher une question de propriété et ne constitue donc pas une action au fond ; qu'en déclarant irrecevable l'action des époux X... en raison de l'action en bornage qu'ils avaient engagée, cependant que, par leur assignation des 29 et 30 septembre 2003, ces derniers s'en étaient tenus à demander le bornage de leurs parcelles avec celle des époux Y... et que ce n'est qu'à la suite d'une demande reconventionnelle de nature pétitoire, au titre de laquelle les consorts X... avaient la qualité de défendeurs, que le tribunal d'instance de Pertuis s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon, la cour d'appel a violé les articles 646 du code civil et 1266 du code de procédure civile ;

3°/ qu'il n'importe qu'au cours des opérations d'expertise, l'expert ait déclaré être saisi de demandes tendant à «voir établie la propriété» et qu'il ait reçu l'accord des parties sur ce point dès lors qu'il n'a pas été constaté que l'initiative en revenait aux seuls consorts X... ; qu'en opposant à l'action des consorts X... les constatations personnelles de l'expert qui ne faisaient l'objet d'aucune demande de leur part, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 1266 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en se fondant sur les demandes formulées par les consorts X... devant le tribunal d'instance d'Apt dans le cadre de leur action en bornage ou dans leurs conclusions prises devant le tribunal de grande instance d'Avignon, tandis qu'il ressort des bordereaux de communication des pièces que ces éléments n'avaient été versés aux débats ni par les consorts X... ni par les époux Y..., la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'action pétitoire engagée postérieurement à l'action possessoire rend celle-ci sans objet lorsqu'elle tend aux mêmes fins ; qu'ayant relevé, en se fondant sur les faits qui étaient dans le débat, qu'en première instance les époux X... avaient la qualité de demandeurs au possessoire, qu'ils avaient ultérieurement introduit une action en bornage laquelle avait donné lieu à la désignation d'un expert judiciaire qui avait reçu l'accord des parties pour poursuivre les investigations en vue d'établir la propriété, qu'ils avaient réclamé à la suite du rapport de l'expert judiciaire la condamnation des époux Y... à démolir le mur mais que le tribunal s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance et qu'il ressortait de leurs écritures qu'ils réitéraient devant elle leur demande de démolition, la cour d'appel, qui a retenu que leur action possessoire tendait aux mêmes fins que l'action pétitoire, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... et Mme A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... et Mme A... à verser aux consorts Y... la somme de 2 500 euros ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et de Mme A... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat des consorts X... et de Mme A...,

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable l'action possessoire des époux X... ;

AUX MOTIFS QU'il est constant, au vu de l'assignation du 27 mai 1999 qui vise expressément l'article 1264 du code de procédure civile, que les époux X... ont entendu exercer l'action possessoire pour réclamer la démolition du mur sous astreinte et des dommages-intérêts ; que l'action possessoire permet de protéger une situation de fait sans avoir égard au fond du droit ; qu'aux termes de l'article 1266 du code de procédure civile, celui qui agit au fond n'est plus recevable à agir au possessoire ; que si cette règle ne s'applique qu'aux demandeurs, il est observé au vu des pièces produites aux débats, que les appelants avaient bien la qualité de demandeurs en première instance, qu'ils ont introduit une action en bornage devant le tribunal d'instance d'Apt par actes des 29 et 30 septembre 2003 qui a donné lieu à la désignation de l'expert B..., que ce dernier a reçu l'accord des parties pour poursuivre les investigations en vue « d'établir la propriété » (page 4 du pré-rapport), que les époux X... ont notamment réclamé devant ce tribunal à la suite de ce rapport la condamnation des époux Y... à démolir le mur sur la ligne EF sous astreinte et que, par un jugement du 1er août 2005, le tribunal s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon ; qu'il ressort des écritures des époux X... notifiées le 3 mars 2008 devant cette juridiction qu'ils réitèrent la demande de condamnation des époux Y... à démolir l'intégralité du mur sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard ; que, contrairement à ce qu'ils soutiennent, les époux X... ont donc bien la qualité de demandeurs à l'action pétitoire, de sorte que l'action possessoire qui tend aux mêmes fins est irrecevable ;

ALORS, en premier lieu, QUE l'existence du droit d'agir en justice s'apprécie à la date de la demande introductive d'instance ou de l'appel et ne peut être remise en cause par l'effet de circonstances postérieures ; qu'en se fondant, pour déclarer irrecevable l'action possessoire des consorts X..., sur l'existence d'une action en bornage, dans le cadre de laquelle ils avaient formulé les mêmes demandes, dont il résultait de ses propres constatations qu'elle avait été introduite postérieurement à l'assignation au possessoire et à l'appel formé à l'encontre du jugement du tribunal d'instance d'Apt du 17 février 2000, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1266 du code de procédure civile ;

ALORS, en deuxième lieu, QUE le bornage se limitant à marquer la ligne séparative de deux fonds par l'apposition de signes matériels, l'action en bornage n'est pas destinée à trancher une question de propriété et ne constitue donc pas une action au fond ; qu'en déclarant irrecevable l'action des époux X... en raison de l'action en bornage qu'ils avaient engagée, cependant que, par leur assignation des 29 et 30 septembre 2003, ces derniers s'en étaient tenus à demander le bornage de leurs parcelles avec celle des époux Y... et que ce n'est qu'à la suite d'une demande reconventionnelle de nature pétitoire, au titre de laquelle les consorts X... avaient la qualité de défendeurs, que le tribunal d'instance de Pertuis s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon, la cour d'appel a violé les articles 646 du code civil et 1266 du code de procédure civile ;

ALORS, en troisième lieu, QU'il n'importe qu'au cours des opérations d'expertise, l'expert ait déclaré être saisi de demandes tendant à « voir établie la propriété » et qu'il ait reçu l'accord des parties sur ce point dès lors qu'il n'a pas été constaté que l'initiative en revenait aux seuls consorts X... ; qu'en opposant à l'action des consorts X... les constatations personnelles de l'expert qui ne faisaient l'objet d'aucune demande de leur part, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 1266 du code de procédure civile ;

ALORS, en quatrième lieu, QU'en se fondant sur les demandes formulées par les consorts X... devant le tribunal d'instance d'Apt dans le cadre de leur action en bornage ou dans leurs conclusions prises devant le tribunal de grande instance d'Avignon, tandis qu'il ressort des bordereaux de communication des pièces que ces éléments n'avaient été versés aux débats ni pas les consorts X... ni par les époux Y..., la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile."


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