Chantons sous les arbres !
Critique de Christian Libens
365 jours dans la nature... Tel est l'alléchant sous-titre du Chant des arbres, un «beau livre» (si bien nommé!) dû à ce chantre de la forêt qu'est Benjamin Stassen. Photographe-promeneur, auteur de plusieurs albums consacrés à l'arbre, Stassen est par ailleurs germaniste et traducteur (entre autres de nouvelles de John Cowper Powys).
En épigraphe de ce nouveau-né, l'auteur cite, comme une profession de foi partagée, une phrase de Jacques Brosse : «Ce livre est né, en somme, du besoin que j'ai toujours eu d'une sorte de calendrier païen – païen ne voulant ici rien dire d'autre que rustique, naturel, on dirait aujourd'hui cosmique –, où, chaque jour, serait célébré un personnage, bête, plante ou pierre, qui serait notre quotidien intercesseur, comme les saints du calendrier chrétien. Ce serait une éphéméride sacrée... »
D'un poème d'Octavio Paz, extrait de L'Arbre parle, pour le 1er janvier, à un fragment du Contemplateur solitaire d'Ernst Jünger pour le 31 décembre, Benjamin Stassen nous offre, en même temps qu'une exposition de son superbe travail photographique, une visite de son panthéon littéraire. Flânant à travers les époques et les cultures, il cite aussi bien Virgile que Novalis, Héraclite d'Ephèse que Henry David Thoreau, Lao Tseu que Colette.
Quant aux auteurs belges, ils ne sont pas les derniers à offrir leurs fleurs poétiques à cet «herbier géant» : Lemonnier, Maeterlinck, Robert Vivier, Marcel Thiry, Hubert Juin, François Jacqmin, Henri Falaise, Philippe Jones, Christian Hubin, Roger Foulon, Philippe Mathy, Werner Lambersy, sans oublier Marie Gevers, si bellement «écolo-naturaliste» et citée onze fois, d'autres encore...
Évoquant in fine André Breton et sa Clé des champs, Benjamin Stassen se plaît à saluer, dans une substantielle et lumineuse postface intitulée «La clé des chants», ses compagnons de vie, qu'ils soient dotés de bras et de jambes ou de branches et de racines... «J'ai toujours su que, de sève ou de sang, arbres ou écrivains élus me seraient moins des maîtres à penser qu'à sentir et pressentir. [...] Qu'ils animent l'imagination ou suscitent la spéculation rêveuse, ces enchanteurs partagent le privilège d'éveiller à une vie plus intense et plus immédiate telles sensations bénéfiques par lesquelles notre incursion terrestre prend subitement et durablement valeur d'aventure qui fait les yeux émerveillés.»
Benjamin Stassen
Le chant des arbres - 365 jours dans la nature
Bruxelles
- Éditions Racine
2007
, 400 p.