Irving Acao
Paris. Le Sunside.
Samedi 23 novembre 2013. 21h.
Irving Acao: saxophone ténor, compositions
Leonardo Montana: piano
Felipe Cabreras: contrebasse
Lukmil Perez: batterie
La musique me rappelle le Herbie Hancock latino des années 60. Le sax attaque, un peu rêveur, à la Wayne Shorter. Ce n'est pas de la Salsa facile. La rythmique tourne, légère et puissante à la fois, oscillant comme un pendule. Le quartet repart et, nom de Zeus, ça pulse. Ca réchauffe par cette froide soirée de novembre. Il y a bien un air de danse latine mais sacrément enrichi. Résultat, ça s'écoute. Il n'y a pas la place pour danser au Sunside et, de toute façon, il faut être un excellent danseur avec une partenaire à la hauteur pour ne pas s'emmêler les pattes sur ces rythmes là. Irving Acao parle français avec un bel accent chantant. Ils jouent " Azabache " le premier album de ce quartet. Il s'agit d'une pierre noire dans laquelle on taille des porte-bonheurs.
" Marco Polo y el pez ". Un petit air plaintif, dansant, mélancolique. Le batteur, très classe en costume cravate, mais qui grimace comme tout batteur qui se respecte. Beau solo de contrebasse au centre de la rythmique alors que le batteur malaxe aux balais. Solo de piano que ponctue le batteur passé aux baguettes. Une bonne vibration nous réchauffe. Le jeu de Lukmil Perez est vraiment cubain. Ce ne sont pas les mêmes rythmes qu'un batteur nord-américain. Pour comprendre la différence, voyez la démonstration de Dizzy Gillespie. Le quartet fusionne. Finie la ballade. Ca s'échauffe. Lukmil Perez joue comme un percussionniste cubain mais pas à mains nues sur une conga. Retour au calme pour le final. Beau voyage. Il est sûr qu'Irving Acao a beaucoup écouté Wayne Shorter mais il ne le copie pas.
" Atrifis ", c'est la façon dont le fils d'Irving désigne les feux d'artifice. Solo de contrebasse pour commencer. Le batteur tapote doucement, à mains nues. Un climat naît de ce dialogue contrebasse/batterie. Il fait très doux. Le pianiste pince les cordes de son piano. Ca vibre d'un bout à l'autre de la scène. La rythmique repart, claire et ferme. Il manque à mes côtés un fidèle abonné Béninois pour analyser la parenté de ces rythmes avec ceux de son pays natal. Heureusement, le contrebassiste nous donne des points de repère car ce qui se passe entre le pianiste et le batteur est sidérant. Ca relance sans cesse, dans tous les sens. irving Acao a repris la main avec une rythmique sans faille, d'une souplesse et d'une éactivité à toute épreuve. Elle le propulse plus vite, plus haut, plus fort avant qu'il ne calme le jeu d'un souffle.
" El poeta brasileno ". Morceau dédié à Leonardo Montana, poète brésilien du piano. Une ballade toute en douceur. Irving Acao écrit de jolies mélodies qui restent en tête sans vous la prendre. Le pianiste mérite bien son surnom de " poeta brasileno " qui va aussi à Cesarius Alvim. Le batteur est passé aux maillets pour obtenir une vibration plus intense de ses cymbales et de ses tambours.
" Reflexion ". Un morceau plus vif, plus dynamique avec une sacrée tension piano/contrebasse poussée par le batteur aux baguettes. Puis le sax attaque, tranchant mais jamais brutal. Le batteur joue par au dessous et par en dessous de la mélodie tout en maintenant la pulsation. Il est en symbiose avec les envolées rythmiques du pianiste. Un tour de magie sonore et le quartet revient à la mélodie de départ. Dieux, que c'est bon! Le pianiste maintient la tension de la main gauche, avec le bassiste, alors que sa main droite l'allège. Le batteur fait rouler ses tambours en tout sens.
PAUSE
La semaine de labeur fut rude et j'ai fait 5h32 de train pour venir à Paris aujourd'hui. Le concert s'arrête donc ici pour moi. Madame G et Monsieur S, enchantés, sont restés au deuxième set. J'ai enfin découvert Irving Acao. Il était temps! La chronique de son album " Azabache ", autoproduit, figurera bientôt sur ce blog. Profitez en déjà avec un extrait ci-dessous. Rien à ajouter.