Une question se pose : L’ours blanc est-il à craindre ou à désirer ? De mes bottines de citadine, je me répondais qu’il était à craindre, malgré la beauté de sa majesté blanche. La réponse n’est pas si simple, puisque les habitants de ce petit village se déchireront pour elle. Un clan est pour son retour, l’autre, non. À partir de là, les luttes de pouvoir entre hommes forts de la tribu seront sans pitié.
L’histoire de ce peuple survivant est focalisée par la voix de Sakari, l’enfant du chef du village Inuit. Celle-ci est insouciante, désire s’amuser avec ses amis, tout en s’acquittant des tâches imposées. À quinze ans, elle pense déjà à unir sa vie avec un garçon qui l’attire. Mais son destin n’est pas celui qu’elle croit, et son immense attachement à son grand-père l’aidera à l’accepter. Ce dernier occupe une fonction très particulière dans ce village de 350 personnes, il est vigile, fonction qui consiste à garder vivant le savoir ancestral. Il est juché sur un promontoire naturel et, en l’occurrence, il surveille le retour de l’ours. Des heures et des heures d’attente à chaque jour, accompagné de sa petite-fille. Imaginez l’épreuve pour Sakari qui a la bougeotte de son jeune âge !
Deux intrigues jouent, une se déroule dans les hauteurs exposant la relation particulière entre la petite-fille et son grand-père. L’autre, à ras le sol, dévoile le quotidien de ses survivants en situation de crise pour continuer de survivre.
J’ai été et suis encore perplexe vis-à-vis cette histoire qui m’a tirée hors du réalisme, à partir du moment où je me suis arrêté au mot « fable » annoncée sur la quatrième. Par contre, cela reste une fable ambigüe qui flirte avec le genre sans en prendre toutes les allures. Une fable contient des messages, voici ce que j’en ai pensés.
Le vigile, la seule personne à détenir la mémoire ancestrale, donne goutte-à-goutte ces informations à sa petite-fille. Ces révélations m’ont semblé tellement aller de soi, qu’elles en revêtaient un côté simpliste. Quelque unes divulguées aux personnes âgées du village (les sages) et plusieurs problèmes se seraient réglés. La fable mettrait en évidence que, dans la vie, seulement des êtres privilégiés comprennent, tandis que le peuple, lui, n’a pas et ne peut comprendre. Et on ne prend pas les moyens pour qu’ils comprennent afin de mieux le manipuler. Cette partie m’a inévitablement fait penser à nos prêtres qui cultivaient les mystères afin de mieux manipuler leurs ouailles.
Le message vis-à-vis la femme a une teneur positive. Une femme vaut un homme, la prémisse est bien défendue et est plutôt crédible. La foi candide devant la force mâle a quelque chose d’enfantin : tu es le plus fort physiquement, tu es le chef.
Malgré une certaine perplexité, mon désir de découvrir ce qui allait se passer était constant, probablement parce que je me suis attachée aux personnages. L’impression d’habiter dans un ailleurs, une sorte d’alcôve blanche entourée d’eau et de lignes d’horizons m’a plu assez pour recommander Le retour de l’ours.
Le retour de l'ours deuxième roman de Catherine Lafrance - Éditions Druide - 264 p. octobre 2013.
Premier roman : La saison froide