Voilà une semaine, l'auteur de Science-Fiction Brian Stableford m'envoyait les fichiers complets de A Brief History of Ardalia et The Breath of Aoles. Eh oui, comme le laissait entendre cet article du 1er janvier 2013, j'étais décidé à prendre plus de risques financiers cette année, en faisant traduire en anglais Le Souffle d'Aoles et Une brève histoire d'Ardalia. Grâce au remarquable travail de Brian, c'est une nouvelle aventure, une aventure anglo-saxonne, et principalement américaine (because parts de marché de l'ebook aux States) qui est sur le point de débuter pour Le Souffle.
L'herbe est toujours plus verte ailleurs, dit-on. Pourtant, en échangeant par e-mail avec Brian Stableford, je me suis rendu compte que lui aussi avait l'impression de balancer son travail dans un trou noir chaque fois qu'il publiait quelque chose (il est l'auteur de plus de cinquante romans).
En étudiant le marché de l'ebook aux Etats-Unis, je me suis rendu compte qu'il y avait 3 millions d'ebooks qui paraissaient par an là-bas, soit environ 1000 par jour. Le marché américain est donc beaucoup plus dur à pénétrer qu'en France. Comparativement, il est plus aisé d'être visible sur le marché français.
J'ai observé les titres traduits en anglais sur Amazon.com d'un auteur pas totalement inconnu en France, un certain Guillaume Musso. Dans les profondeurs du classement.
J'ai ensuite examiné les classements sur Amazon.com des auteurs français traduits par Brian. Encore plus dans les profondeurs du classement.
Et pourtant, malgré toutes les évidences, malgré ma jeunesse en tant qu'auteur et malgré la quasi-certitude de me planter, j'ai investi 2200€ sur la traduction d'un roman et d'une nouvelle.
Pourquoi ?
Parce que c'est mon destin, comme dirait l'autre. Oui, il est plus facile d'être visible en termes de vente sur Amazon.fr que sur Amazon.com. Mais les possibilités d'en vivre sont aussi plus limitées : on se situe aux alentours des 20 000 - 30 000 ebooks vendus pour les best-sellers de l'autoédition en France. Chiffres que je n'ai jamais, au grand jamais approchés, soit dit en passant: avec mon livre le mieux vendu, Le Souffle d'Aoles, je viens juste de dépasser les 400 ebooks, pour plus de 1700 livres papier.
Cela étant, j'estime que si même Musso ne vend pas énormément en ebook aux Etats-Unis (en tout cas sur Amazon.com), c'est que les cartes y sont rebattues. Je ne dirais pas que tout le monde s'y retrouve sur un pied d'égalité. Ce serait plutôt que tout le monde part avec un énorme handicap, à savoir la concurrence effrénée outre-Atlantique.
Comme je le disais dans un e-mail à Brian, après avoir lu pendant toute mon enfance, et à l'âge adulte, une grande majorité d'ouvrages anglo-saxons (surtout des romans traduits, mais certains aussi en V.O.) dans le domaine de la SF, de la Fantasy et du Fantastique, j'estime que cela doit marcher dans les deux sens, c'est à dire qu'il doit y avoir aussi une présence française là-bas. Il faut renvoyer l'ascenseur.
Les différences culturelles sont-elles trop fortes? Je ne le crois pas. J'ai baigné et je baigne toujours dans les séries américaines. Alors oui, The Breath of Aoles va garder un côté "exotic frenchie" pour le public anglais, parce que plusieurs noms pour lesquels j'avais fait des jeux de mots (nidepoux, Durepeaux, tachefleur) sont restés francisés dans la traduction.
Mais je pense que l'important, c'est l'histoire et le rythme de celle-ci. A cet égard, le public anglo-saxon, si public il y a au final, devrait s'y retrouver.
Ce n'est pas pour rien que j'ai opté pour le nom de plume d'Alan Spade... Mais bien sûr, un nom de plume ne suffit pas. Là, depuis une semaine, j'ai pratiquement complètement arrêté l'écriture pour me consacrer aux corrections du fichier envoyé par Brian.
Plus je travaille dessus, et plus je me rends compte à quel point cette phase de relecture/correction est indispensable. Sans vouloir me lancer des fleurs, je suis un bien meilleur relecteur-correcteur en langue anglaise que je ne m'y étais attendu. J'ai été abonné au Times et à Newsweek pendant plusieurs années, j'ai lu des romans comme Lord of The Rings, Wheel of Time ou The Demon Apostle dans le texte, j'ai traduit l'édition anglaise de Advanced Dugeons&Dragons quand j'étais adolescent, et je lis et commente plus de blogs anglais que de français.
Et là, pour The Breath, c'est presque comme si le texte m'étais redevenu étranger avec la traduction, et comme j'ai un très bon oeil pour repérer les fautes des textes d'autres auteurs en français, je garde ce très bon oeil pour le roman en anglais. Et je sais exactement ce que j'ai voulu dire, ce qui est un plus par rapport à un copy editor.
Etant donné le temps bref qu'il a passé dessus par rapport à l'ampleur de la tâche, Brian a rendu une copie très propre, une traduction d'une vive intelligence, très proche de la version originale, et qui, sur certains détails, améliore la version originale. Mais oui, il y a des fautes de frappe et quelques fautes d'orthographe. Bien plus rares aussi, des fautes de sens. Brian m'a d'ailleurs fait part de certaines incertitudes, ce qui m'a permis de corriger très vite certaines choses pour me rapprocher de l'effet que je cherchais à produire en français.
En aucun cas je n'évoque ceci pour déprécier Brian, qui est un grand professionnel auquel je referai appel avec joie pour les autres romans si les ventes sont au rendez-vous. Ce que j'essaie de faire comprendre, c'est que si vous souhaitez vous épargner les frais d'un copy editor, il vous faudra une bonne maîtrise en anglais. Sinon, un copy editor est tout bonnement indispensable, et vient s'ajouter aux frais de traduction. L'auteur Joe Konrath fait justement la pub de son copy editor dans un article de son blog.
Je terminerais mes conseils par celui de base, mais qui vaut toujours d'être répété : prenez un traducteur dont la langue maternelle est celle dans laquelle le roman sera traduit. C'est dans ce sens-là que cela doit se passer pour obtenir les meilleures tournures de phrases, et tout simplement la meilleure traduction. Le meilleur moyen pour trouver celui-ci sera souvent de s'adresser à un auteur français, et de préférence un auteur français ayant une certaine maîtrise de l'anglais. En tous les cas, je recommande chaudement Brian Stableford.
Dernier point, il est possible que d'ici une à deux semaines vous voyiez surgir un article en langue anglaise de mon cru sur ce blog. Vous saurez alors pourquoi...