Fils d’ouvrier, Antoine se fait embaucher à l’usine et découvre Lusine. Et quand la femme avec qui il vivait le chasse, il revient chez ses parents. Ça me rappelle Les lisières d’Olivier Adam. Mais la révolte d’Antoine est différente. Il y a plus de retenue chez lui. Et moins de mépris apparent pour les autres. J’ai suivi la révolte des héros d’Olivier Adam jusqu’à ce livre-là et je ne comprenais pas ce qui me faisait arrêter là. Avec le livre de Jeanne Benameur, je trouve une partie des réponses.
Les parents d’Antoine sont attachants, leur vie est faite de travail et de plaisirs simples : modélisme et lecture. Ils ont cependant ces secrets qui donnent envie d’en savoir plus : le carnet de son père, par exemple. Et la propre révolte d’Antoine doit trouver son expression, s’ancrer dans une réalité, dépasser son égoïsme. Cela ne se fait pas facilement : il faut accepter de regarder les autres, d’écouter les autres et de sortir de soi les mots de la conscience. Est-ce que l’exploitation des ouvriers a changé avec la mondialisation ? Est-ce que c’est pareil d’être métallurgiste en France et au Brésil ? Comment admettre que le travail délocalisé n’est pas volé par les travailleurs qui vont l’effectuer si loin ? Pour cela, Antoine va devoir se faire humble, découvrir les livres et les voyages qu’ils proposent, et, finalement, partir. Ce qu’il apprendra, c’est la fraternité. Le livre reste en suspens à la fin, comme si l’accomplissement de soi n’était pas encore assuré, parce que, les grands combats collectifs étant apparemment infructueux, les insurrections singulières qui restent à réaliser ne suscitent pas l’enthousiasme.
Le livre d’Olivier Adam se terminait aussi à l’étranger, dans un Japon fantasmé, loin des luttes de classes. Paul n’y trouvait qu’à refermer les bras. Antoine, au Brésil, les ouvre.