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En dépit de la crise : allier travail et plaisir ?

Publié le 25 novembre 2013 par Vincentpaes
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Le mot travail porte en lui la notion de souffrance : il vient du latin tripalium, qui désigne à l’origine un instrumentdetorture. Une alliance étymologique que la conjoncture a tendance à confirmerdepuis plusieurs années. Pour MichelLallement,sociologue et spécialiste du travail, le mal être des salariés ne fait ques’accentuer depuis une trentained’années : « cela prend corps dans les années 1980, où le partage de la valeurbascule en faveur des profits, se poursuitdans les années 1990 avec ledurcissement des conditions de travail, et s’accentue ensuite avec lafinanciarisation del’économie ». Avec la crise, tout s’accélèreencore : le plaisir de travailler a de plus en plus de mal à résister à lamisesous pression des salariés, et aux modes d’organisation plus austères, quifont parfois même penser à un pénibletaylorisme. Pourtant la souffrance autravail est une fatalité que certains n’acceptent pas. Et ils ont raison :lestravailleurs, et leurs entreprises, ne s’en portent que bien mieux.

Bâtir un environnement pour (ré)concilierplaisir et travail

Certainesentreprises font ainsi du plaisir au travail un volet primordial de leurpolitique de recrutement, et de gestiondu personnel. C’est même devenu la marquede fabrique, médiatisée, de plusieurs d’entre elles. Ainsi chez Google, onsaitque les salariés peuvent consacrer 20% de leur temps à des projets libres, etont accès à des salles de jeux, desport, ou autres services personnelsdestinés à maximiser leur bien-être, et leur plaisir de travailler. Mêmephilosophie chez Pixar, où le bâtiment est conçu de sorte que les employéspuissent circuler librement et échangerleurs idées, dans une logique qui seveut avant tout ludique.

ChezLego aussi, les locaux ont été pensés comme le reflet d’une philosophie dutravail : « Lego ne crée pasque du ‘fun’pour les autres, travailler chez lego est également ‘fun’ ! »,se réjouit le cabinetd’architectes du bâtiment. Toutes cesentreprises se félicitent desconséquences de cette conception du travail sur le bien-être des employés, maisaussi surleur productivité. Et en effet, toutes sont des acteurs de référencedans leurs domaines respectifs et affichent unesanté resplendissante, qui a dequoi faire des jaloux en temps de crise.

De la passion naît le plaisir… et laperformance

Mais cultiver le plaisir au travail, ce n’est pas « simplement »installer un baby-foot dans ses locaux. Les entreprisesqui y réussissent sontcelles qui en font une vraie philosophie, un socle sincère et solide de leursvaleurs. Et pour celail y a une condition essentielle, qui semble évidentemais que la morosité économique a peut-être eu tendance à faireoublier :pour prendre du plaisir à travailler, il faut travailler avec passion. Uneentreprise comme Wonderbox, lenuméro 1 en France des coffrets cadeaux, doitpour beaucoup sa réussite à la passion qui anime ses fondateurs, etqu’ils ontsu transmettre à leurs employés.

BertileBurel, co-fondatrice de Wonderbox, revient sur lesorigines de la société qu’elle a fondé avec son mari, parceque tous deuxsont adeptes de voyages et d’aventure : « les deux premiers coffrets que nous avons lancés reprenaientdesactivités que nous avions aimées et que nous avions envie de partager. Doncquand notre équipe s’est constituée, sanss’en rendre compte, nous leur avonscommuniqué cette passion. Nous n’avons recruté que des gens qui aiment cequ’ilsfont et qui vivent à fond ». Aujourd’hui, Wonderbox affiche deschiffres record, 1.5 millions de coffrets cadeaux vendusen 2012 pour unchiffre d’affaires de 140 millions d’euros, et continue à cultiver la passionet le plaisir au travail. Celase passe au niveau du recrutement, mais aussi dumanagement : écoute, responsabilisation… ou encore budget annuelde 500€par personne pour tester les activités. « Les collaborateurs qui arrivent au travail avec le sourire le matinmettent du cœur à l’ouvrage, cela se répercute positivement sur toutes lesrelations avec nos partenaires, avec la clientèle», estime BertileBurel. Pour une entreprise qui doit gérer des relations aussi bien avec sesclients qu’avec sesprestataires (15000 aujourd’hui), c’est effectivement un« actif stratégique précieux ».

AuVieux Campeur aussi, la passion est au cœur du business model. Elle est pourpartie ce qui explique que cetteentreprise de taille modeste a su résister auxgéants de la grande distribution du sport. En 2010-2011, l’entreprise,qui nevoit pas passer la crise, a même réussi à afficher un chiffre d’affaires de 120millions d’euros hors taxes, enprogression de 13.7%. En effet depuis lanaissance de la société il y a plus de 70 ans, le recrutement des vendeurs estplus affaire de passion que de commerce. Jacques-Yves de Rorthays, qui dirigele Vieux campeur, explique :« Nous nedemandons pas à un vendeurd’être vendeur […]. Il faut simplement que le postulant pratique le sport qu’ilva avoir àvendre. Plutôt qu’un rapport vendeur-client, on parlera plutôt d’unéchange «passionné-passionné »avec des avis trèspointus, parfois orientés mais toujours sincères ».Là aussi le cercle vertueux est en marche : les vendeurs passionnéstravaillent avec plaisir, ce qui a un impact positif sur leurs relations avecles clients… et des conséquences directes surla santé de l’entreprise.

AuxEtats-Unis, la société Ruby Receptionists parvient à appliquer cettephilosophie à un secteur réputé « ingrat » : lestandardtéléphonique, qu’elle gère pour ses clients TPE/ PME. Sa fondatrice, JillNelson, explique commentelle metses valeurs en pratique : « Jedemande régulièrement à mes employés s’ils sont heureux dans leur travail et sije peuxfaire quelques chose pour les render plus heureux encore ». Entermes de notoriété, de résultats mais aussi d’efficacité –tout est lié, lepari est payant : « Il est arrivé que nosclients décrochent des marchés simplement parce que nosstandardistes sontpolis et agréables », se targue JillNelson.

Travail et plaisir : une alliancegagnante

Allier travail et plaisir en temps de crise est loin d’être incongru. Et c’estmême scientifique : comme l’explique le DrPhilippe Rodet, le plaisirdiminue la sécrétion des hormones du stress, et augmente celle de dopamine,l’hormonede la motivation… qui génère du plaisir. Et ces salariés plus motivéset plus heureux seront plus efficaces, mais ausside meilleurs ambassadeurs del’entreprise vers l’extérieur. De quoi optimiser les chances de bonheur pourchacun, etde réussite pour tous.



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