Malko Swann vit à fond sa vie de rock star: il multiplie les conquêtes d’un soir qu’il renvoie ensuite chez leurs maris et aime pousser le compteur de sa voiture y compris après s’être lâché sur la drogue. Mais un soir, c’est peut-être l’excès de trop: arrivé sur un pont au nom prédestiné, le Pont du Diable, il quitte la route et fait un plongeon de trente mètres dans le vide. Pourtant, il survit. Mais il a d’étranges séquelles. Il n’entend plus la musique. Il n’est pas sourd, mais la moindre note reste silencieuse pour lui. Terrifiant pour un musicien. Mais surtout, une étrange impression d’être surveillé, d’être suivi par une ombre, une présence diabolique. Il entend une voix murmurer à son oreille, et dans ses cauchemars. Une voix qui le force à jouer à un terrible jeu morbide. Au même moment, le policier Alexandre Vauvert est appelé sur les bords du canal du Midi. Le cadavre d’une jeune fille vient d’être retrouvé: il semble être remonté du fond de l’eau où il a passé un bon bout de temps. En découvrant son identité, il se rend compte que la colocataire de la jeune fille a également disparu.
Comme le précédent de Sire Cédric que j’ai lu, ce livre m’a surpris par son étonnant pouvoir addictif. Tout semble fait pour vous happer et vous conduire jusqu’à la dernière page sans que vous arriviez à le lâcher, à commencer par ces chapitres courts qui s’achèvent presque tous sur un cliffhanger soigneusement choisi et qui alternent en permanence l’histoire de Malko et celle de Vauvert en vous laissant bien penser qu’elles ont un lien sans vous le dévoiler clairement. Je n’attendais qu’une chose: un face-à-face enfin entre ces deux personnages aussi charismatiques l’un que l’autre.
A commencer par Malko, que j’ai détesté au départ: il nous est clairement présenté comme le salaud de service qui traite les femmes comme des objets et brûle la vie par les deux bouts. Au point qu’au le début de l’intrigue, on n’hésite pas à penser qu’il a presque mérité ce qui lui arrive. Mais très vite, on finit par trembler avec lui, tant ce qui lui arrive le dépasser. Qu’il s’agisse du chien démoniaque qui semble le suivre comme s’il attendait de l’escorter sur le pont maudit qu’il n’a jamais pu traverser, ou des cadavres qui apparaissent près de lui sans qu’il comprenne comment, le fantastique qui vient teinter l’histoire fait son petit effet: on a l’impression que le monde part en vrille autour de lui, que la réalité lui échappe complètement alors que les morts sont terriblement réels et que rien de leur matérialité ne nous est épargné, du sang qu’il découvre trop tard sur ses mains et ses vêtements, à la rigidité qui les gagne en passant par leur taille qui les empêche de rentrer correctement dans un coffre de voiture (j’ai eu des hauts-le-coeur lorsque Malko claque la portière sur une main ou un pied qui dépasse…)
C’est avec un grand plaisir que j’ai retrouvé Alexandre Vauvert, le colosse couturé. Le policier bourru, qui respecte moins sa hiérarchie que son instinct, est encore une fois ici souvent critiqué pour ses méthodes un peu trop brutales. Et pourtant, on s’y attache très vite, entre son acharnement à rendre justice, son ex-femme qui le hante. Il me rappelle un peu un Quasimodo moderne, ce géant cabossé qui cache des valeurs bien plus admirables que celles de nombre des autres personnages qui font pourtant autorité. Il n’est pourtant pas encore au top de son charisme (il est bien plus attachant dans De fièvre et de Sang et dans La Mort en tête) et je pense qu’il méritait un rôle un peu plus actif que celui de simple enquêteur qui se contente de suivre les indices qui éclairent l’histoire de Malko. Mais je ne suis pas objective.
La note de Mélu:
Un excellent roman qui nous balade du début à la fin sans nous laisser vraiment le temps de reprendre notre souffle.
Un mot sur l’auteur: Sire Cédric (né en 1974) est un écrivain français qui a déjà signé plus de dix romans, les plus récents étant les cinq consacrés à Alexandre Vauvert et Eva Svärta ; retrouvez-le sur son site internet et découvrez un autre de ses romans sur Ma Bouquinerie:
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