La prématière est, selon notre thèse, la substance qui emplit l’espace tout l’espace aussi bien qu’elle le constitue. Il s’agit donc d’un objet physique et à ce titre doit être défini par un certain nombre de propriétés. La principale et toute première est celle d’exister au sens où une existence se manifeste par une présence physique – celle d’occuper un volume – et d’être doté d’une capacité d’action et de réaction. Mais usant des concepts adaptés à l’analyse de la matière, on se rend compte immédiatement qu’ils sont inaptes à saisir la spécificité de cet objet étrange que l’on nomme l’espace.
Tout d’abord, il est impossible de saisir l’espace en termes de volume puisqu’il Est ce volume lui-même dans sa totalité et qu’on ne saurait l’isoler et le mesurer puisque sans bord, sans délimitation possible. A ce titre, il doit se penser comme infini puisque sans frontière séparant l’espace d’un non-lieu absolu. Il est ce contenant qui se contient lui-même, tout à la fois « structure » d’accueil en tant qu’espace et prématière accueillie en tant que substance. Mais, à proprement parler, l’espace « n’existe » pas « réellement » au sens où l’existence concerne un objet individualisable soumis au cycle de la naissance et de la mort, de la parution et disparition. La prématière de l’espace est éternelle puisque n’ayant pu surgir d’un ailleurs, d’un autre lieu où elle aurait été en réserve. Elle est par ailleurs non isolable, il est impossible de découper un bout d’espace pour le mesurer ou le peser. Toutes ces propriétés totalement spécifiques rendent impossible d’aborder l’espace-substance à l’aide des concepts de la matière.
Cela explique la difficulté de comprendre l’un de ses aspects les plus originaux à savoir de concilier rigidité et fluidité. Si l’espace de prématière était le support des ondes EM, il faudrait qu’il soit composé d’une matière tellement rigide pour justifier leur vitesse inouïe et le plus infime mouvement en son sein serait interdit. C’est cet argument et lui seul qui a empêcher jusqu’à présent d’attribuer à l’espace tout contenu et aux ondes EM un quelconque support. De fait, nous faisons au quotidien l’expérience de la grande fluidité de l’espace et aucune résistance apparente ne vient refreiner nos mouvements. Comment concilier ce qui nous parait comme irréductible lorsqu’il s’agit de la matière ?
Tout d’abord, un coefficient de rigidité dépend de la quantité d’éléments matériels par volume, de leur densité, ce qui suppose d’avoir à les compacter, à les rapprocher pour élever leur rigidité. Or l’espace-substance n’est composé d’aucun élément séparé, il est immédiatement compact, totalement dense, si bien qu’il n’y a pas de temps de transmission du mouvement d’un corps à un autre qui peut s’effectuer à une vitesse qui n’a pas d’équivalent pour la matière. Aussi, la vitesse C de la lumière nous indique quel est l’état de densité de cet objet physique nommé espace, densité absolue au sens où elle marque la totale continuité, la non séparabilité des « éléments », l’absence d’espace « entre », l’impossibilité d’atteindre une densité supérieure. L’espace-substance pour détenir la propriété de continuité doit être absolument dense et interdire ainsi tout « non-lieu » en lui-même, interdire tout espace dédié au néant absolu.
Mais l’espace prématériel absolument rigide doit être également très fluide pour que le mouvement puisse être accueilli en son sein, car tel est sa fonction traditionnelle : être le lieu où se positionnent et se déplacent les corps.
Pour comprendre la nature de cette fluidité, il faut distinguer le mouvement DE l’espace, le déplacement de sa substance propre, du déplacement DANS l’espace. Une chose est de se déplacer DANS et une autre de mettre en mouvement cette substance sous forme d’ondes. Par analogie, nous pouvons nous déplacer sans grand effort dans l’air atmosphérique mais mettre en mouvement les molécules de gaz pour susciter des ondes sonores suppose d’autres procédés. Il faut donc différencier le mouvement d’un corps DANS l’air atmosphérique et le mouvement DE l’air. Les ondes EM résultent du déplacement DE la substance de l’espace par le mouvement accéléré des électrons, alors même que la faible agitation de mon bras ne saurait mettre en mouvement cette prématière. Mais cela ne signifie pas que la prématière n’oppose aucune résistance, celle-ci est proportionnelle à la vitesse de déplacement en son sein comme nous l’enseignent les équations de Lorentz que nous devons réinterprétées. A la vitesse C, aucune accélération n’est possible, la résistance de la prématière est absolue et nous pouvons assister à la mutation de la prématière en matière par condensation. A contrario, si cette résistance est proportionnelle à la vitesse, elle sera d’autant moins importante que le corps est ralenti ce qui signifie que l’espace est d’autant plus fluide que la vitesse est moindre.
En définitive, la continuité absolue de la prématière composant l’espace justifie la vitesse C des ondes EM et la production de celles-ci, mais la résistance de cette prématière à sa mise en mouvement est d’autant moins élevée qu’un corps est ralenti : densité absolue et fluidité relative de la substance de l’espace sont non seulement parfaitement conciliables mais dérivent toutes deux d’une seule et unique propriété spécifique à cette substance radicalement différente de la matière.