La Vénus à la Fourrure // De Roman Polanski. Avec Emmanuelle Seigner et Mathieu Amalric.
Tout simplement brillant. Au début, j’avais peur. Peur que ce film intimiste sur les coulisses d’une audition qui marie théâtre avec réalité, ne parvienne pas à aller au bout de son idée. Et puis
finalement éclos dans La Vénus à la Fourrure quelque chose de brillant, de magique, une oeuvre singulière et surtout très loin de ce que l’on aurait pu attendre de la part de
Roman Polanski. Après avoir délivré Carnage il y a quelques temps (qui était un huis clos sur un dîner qui tourne mal - prenez pour référence Le
Prénom -), il revient encore une fois avec un huis clos à la mise en scène théâtrale. J’ai trouvé ça bluffant. Surtout que le film joue toujours la carte de la subtilité et c’est ce qui
lui réussi le plus. On ne sait pas vraiment à quoi l’on a à faire et pourtant, jamais le rythme ne désempli. Le spectateur ne peut qu’être subjugué par le talent d’Emmanuelle
Seigner face à un Mathieu Amalric qui se laisse peu à peu soumettre. Les deux acteurs sont justes brillants dans ce huis clos où tout est décuplé, même les sensations du
spectateur.
Seul dans un théâtre parisien après une journée passée à auditionner des comédiennes pour la pièce qu’il s’apprête à mettre en scène, Thomas se lamente au téléphone sur la piètre performance
des candidates. Pas une n’a l’envergure requise pour tenir le rôle principal et il se prépare à partir lorsque Vanda surgit, véritable tourbillon d’énergie aussi débridée que délurée. Vanda
incarne tout ce que Thomas déteste. Elle est vulgaire, écervelée, et ne reculerait devant rien pour obtenir le rôle. Mais un peu contraint et forcé, Thomas la laisse tenter sa chance et c’est
avec stupéfaction qu’il voit Vanda se métamorphoser. Non seulement elle s’est procuré des accessoires et des costumes, mais elle comprend parfaitement le personnage (dont elle porte par ailleurs
le prénom) et connaît toutes les répliques par cœur. Alors que l’« audition » se prolonge et redouble d’intensité, l’attraction de Thomas se mue en obsession…
Mais La Vénus à la Fourrure réussi également l’exploit de nous proposer une très jolie réflexion féministe tout en ayant l’intelligence de pointer du doigt tout ce qui peut faire
la force d’une pièce de théâtre comme ses faiblesses. Le film s’ouvre de manière étrange et puis tout d’un coup celui-ci commence à prendre une forme totalement différente. On ne sait pas
vraiment à quoi s’attendre, notamment avec Vanda qui semble savoir beaucoup plus de choses que le spectateur. Le spectateur a alors la soif de savoir qui elle est réellement même quand celle-ci
tente de donner des indices sur le pourquoi de sa présence. Emmanuelle Seigner est une actrice fabuleuse, notamment quand il s’agit de nous proposer un jeu de maitrise des
hommes. Elle a cette emprise sur Mathieu Amalric, un truc assez formidable. D’ailleurs, Mathieu Amalric est lui aussi tout aussi bon dans le registre de l’homme
soumis. Surtout quand l’on tente de décortiquer nous aussi ce qu’il a mis de lui dans la pièce qui se joue devant nous. Quand je repense à La Vénus à la Fourrure, on se rend
rapidement compte que tout ce qui est dit prend son sens au fil du film (une citation, une référence, etc.)
Tout n’a pas nécessairement de sens au premier abord mais rapidement tout cela va prendre une autre dimension quand La Vénus à la Fourrure nous fait des révélations. Le côté
coquin du film n’est jamais pervers. On n’a pas l’impression de regarder un film de voyeur et je trouve ça remarquable, surtout que je m’attendais vraiment à quelque chose de ce genre là. Mais
Roman Polanski opte pour un registre plus soutenu et surtout sur la retenue. En effet, dans une ambiance théâtre très confinée (la pluie, le côté pesé de la réalisation,
l’éclairage bien pensé, etc.), le tout explose en plusieurs sensations. En tant que grand admirateur du monde du théâtre, je dois avouer que le film de Roman Polanski fait tout
de suite partie de mes films préférés de cette année 2013. Une claque sur tous les points et puis le jeu des acteurs est tout simplement parfait. Disons que la plus grande réussite de ce La Vénus
à la Fourrure est certainement d’avoir réussi à fusionner la fiction avec la réalité sans même que le spectateur ne s’en rende compte.
Note : 10/10. En bref, l’un des meilleurs films de l’année 2013.