Le bilan est globalement positif, pour le dire très vite. Il est surtout, c’est sa plus grande qualité, très varié : il y en a pour tous les goûts. Du vécu, du romanesque, du choc des cultures, de l’ego, de la guerre, du théâtre, du facile à lire comme un feuilleton et du plus ardu qui oblige à se concentrer.
L’année dernière, le roman d’un jeune Suisse inconnu, ou presque, était devenu le best-seller de l’automne, propulsé par l’Académie française et le Goncourt des Lycéens : La vérité sure l'affaire Harry Québert, de Joël Dicker. Le livre, épais, se lisait sans effort particulier et procurait un vif plaisir. Au revoir là-haut, de Pierre Lemaitre, prix Goncourt cette année, semble renouveler la formule, en y ajoutant le parfum d’une commémoration de la Grande Guerre dont on va prendre pour cinq ans puisque, oui, c’est commencé avant l’heure. Mais, s’agissant de Pierre Lemaitre, auteur de romans noirs célébré dans le genre, et moins connu par les lecteurs de littérature « blanche », personne ne songera à s’en plaindre. Surtout pas les libraires…
De toute manière, la facilité n’est pas la norme cette année – elle ne l’était pas davantage l’an dernier, d’ailleurs, et cette remarque est à porter au crédit des jurys littéraires. Yann Moix n’impressionne pas seulement par le volume de Naissance (Renaudot), il pratique aussi une écriture radicale qui indispose ou séduit, c’est selon – elle suscite en tout cas des réactions.
Leonora Miano, dans La saison de l’ombre (Femina), nous parle d’un monde dont nous ne connaissons souvent que quelques clichés. Et, s’agissant de démonter des clichés, Marie Darrieussecq s’est emparée avec talent de la relation entre une femme blanche et un homme noir (Il faut beaucoup aimerles hommes, Médicis). Je viens de citer deux femmes et on fait souvent remarquer leur place réduite dans les listes d’auteurs primés.
Nelly Alard, en remportant hier le Prix Interallié (Moment d’un couple), succède, comme écrivaine, à Dominique Bona, couronnée en… 1992 ! Bien joué, avec un roman sur la fragilité d’un couple qui part à la dérive et où l’épouse tente de construire un radeau afin de sauver ce qui peut l’être. Monica Sabolo, autre femme, parle aussi d’amour dans Tout cela n’a rien à voir avec moi (Flore). Tout comme, d’ailleurs, Christophe Ono-dit-Biot, homme cependant, dans Plonger(Académie française).
Et Le quatrième mur, de Sorj Chalandon (Goncourt des Lycéns), n’est pas un livre sans amour même s’il s’agit surtout d’une guerre et de l’espoir de la tenir à distance le temps d’une représentation théâtrale.
Ce n’est pas mal du tout, cette liste. Chacun y trouvera son compte.