Les samouraïs n'ont pas disparu du jour au lendemain, l'histoire du samouraï Iwasaki.
1868. L'empereur Meiji arrive au pouvoir et abolit la caste des samouraïs, classe guerrière qui avait du mal à survivre en ces temps de paix et d'émancipation faisant suite à la politique d'isolement volontaire (Sakoku) de l'ère Edo. Cette même année se présente chez son coiffeur le dénommé Iwasaki Yataro, issu d'une famille d'agriculteurs de l'île de Tosa où sont fabriqués les couteaux Haiku Kurouchi, qui avait racheté le statut de samouraï de son arrière-grand-père. Iwasaki est très influencé par les idées du réformiste Toyo Yoshida. A son coiffeur surpris, il demande de couper son chignon de samouraï. Le geste est fort symbolique, seule une défaite humiliante donnait lieu à cette cérémonie. Iwasaki montre par là qu'il rompt avec le passé. Entré comme samouraï il ressort, libéré du poids des traditions, comme entrepreneur.
1868, c'est une de ces dates charnières de l'histoire du monde. C'est aussi la fin de la guerre de Sécession outre-Atlantique, les besoins sont immenses notamment en acier, cet alliage 1000 fois plus résistant que le fer, devenu un enjeu vital (une des raisons de la victoire yankee est que 4 usines sur 5 étaient situées au nord des Etats-Unis). En 1870 Iwasaki rachète une compagnie commerciale et loue des entrepôts où il décide d'appliquer le savoir-faire nippon des sabres d'abord aux fusils, puis à de nombreux autres objets en phase avec la demande de l'époque. En 1874, le gouvernement sollicite son entreprise une première fois pour le transport de soldats et de matériel militaire, puis à nouveau en 1877 lors de la révolte de Satsuma. En 1878 l'entreprise prend le nom de Mitsubishi qui lance 6 ans plus tard, après l'acquisition des chantiers navals de Nagasaki, la construction de navires qui feront la renommée du Japon jusqu'à nos jours. En 10 ans le Japon avait appris ce que l'Occident avait mis un siècle à acquérir, Mitsubishi du couteau aux navires cuirassés. Iwasaki meurt le 7 février 1885 à l'âge de 50 ans d'un cancer à l'estomac.
Certains samouraïs, déployant les qualités propres à leur ancienne classe sociale, se reconvertissent comme patrons d'industrie et créent des sociétés comme Mitsui, Hitachi, Nissan, etc... Sociétés qui feront perdurer l'esprit samouraï au sein même de leurs murs et auxquelles on reprochera la collusion avec le gouvernement impérialiste des années 1930-40. Ils sont la courroie de transmission qui a fait survire cet esprit samouraï dans les valeurs de la société notamment ce constant perfectionnisme qui taraude nos fabricants de couteaux.