Trois
ans après la mort de son mari et après avoir elle-même
frôlé la mort, sauvée à temps par une
opération pour lui éviter un accident vasculaire
cérébral, Cristina de Kirchner, que les sondages
d'opinion montrent toujours la très grande popularité
personnelle, est de retour aux affaires, en chemisier blanc (voilà
trois ans qu'elle n'apparaissait plus que dans le noir le plus
strict) et à la tête d'un gouvernement fortement remanié,
comme on pouvait s'y attendre après les élections de
mi-mandat qu'elle a gagnées d'une courte tête.
Quelques
grosses pointures sont écartées, parmi lesquelles le
Premier Ministre et le Gouverneur de la Banque Centrale. D'autres
arrivent ou reviennent.
Dans
une vidéo tournée par sa fille Florencia à
laquelle elle semble fusionnellement attachée, la Présidente
argentine a donné des nouvelles de sa santé, avouant
sans fausse pudeur qu'elle avait connu des jours très
difficiles après l'opération (on la croit sans peine),
et remercié les très nombreuses personnes, en Argentine
et à l'étranger, qui lui ont envoyé des vœux
de prompt rétablissement, en commençant la liste par
les médecins, le personnel soignant et même les autres
patients de la clinique qui la saluaient quand ils la croisaient dans
le couloir. Avec insistance, elle a cité le cas, encourageant
pour l'avenir démocratique du pays et très émouvant
pour elle, affirme-t-elle, d'un jeune militant du PRO, le parti de la
droite libérale fer de lance de son opposition, qui, le 17
octobre dernier, lui a souhaité une bonne fête de la
Loyauté (1) et qui n'en revient pas, ce matin, qu'elle ait
prêté attention à son geste de concorde civile
(voir la dépêche de Télam de ce jour).
Elle
a présenté un énorme pingouin en tissu, exhibant
sous l'une de ses palmes orange le slogna d'une organisation
militante "Organiser
pour Transformer" (2)
(l'oiseau polaire est un clin d'œil
aux racines que Cristina s'est créé dans le sud du
pays, après son mariage avec un Patagonien), et un adorable
chiot blanc, très joueur et très affectueux, offert par
Adán Chávez, le frère de feu Hugo. Un chien tout
pareil à celui de Bolívar, celui qui planta ses crocs
vaillants dans les mollets de quelque soldat pro-espagnol à la
bataille de Carabobo dans l'actuel Equateur. La patriotique bestiole
en mourut, transpercée par un coup de lance. Sur l'un de ses
portraits historiques, il est représenté aux pieds du
Libertador et, pour cette raison, il a été promu chien
national au Venezuela. C'était Hugo Chávez qui avait
promis ce cadeau à son homologue argentine. Cristina a donc
appelé la neigeuse boule de poils Simón, en hommage au
héros révolutionnaire, et l'enverra bientôt vivre
dans sa maison du Calafate, dans la montagne et le froid, puisque le
ravissant quadrupède est un toutou de montagne.
C'est qu'il
commence à faire chaud à Buenos Aires, où l'été
s'approche à grands pas.
Pour
en savoir plus sur le remaniement du Gouvernement, lire l'article de Página/12.
La
vidéo est consultable notamment sur Clarín ainsi que
sur Télam et sur le site Internet de la Présidence argentine (par ailleurs très intéressant avec sa riche
arbolescence) : une vidéo où Cristina improvise un
message simple et sincère, plein d'aisance et de naturel, un
petit film rigolo comme tout tout et vraiment très, très,
très sympa.
A
remarquer que, pour une fois, les unes des journaux nationaux ne
laissent pas apparaître au grand jour leurs habituels
différends idéologiques. Tout au contraire puisque
toutes les rédactions ont choisi la même photo. Comme si
dans un moment heureux, emblématique et tout à fait
exceptionnel, une communion nationale parvenait à naître,
en dépit de la volonté politique affichée par
beaucoup d'entretenir jusqu'à l'extrême des oppositions
partisanes qui sans doute s'épuisent peu à peu avec le
développement de la démocratie et le retour de la
croissance.
Bref, que des bonnes nouvelles pour le moment.
(1)
C'est d'autant plus remarquable que la fête de la loyauté,
le 17 octobre, est vraiment une fête péroniste par
définition et non pas une fête de tous les Argentins. Ce
jour commémore la grande manifestation en soutien à
Perón, le 17 octobre 1945, lorsque les foules amassée
sur Plaza de Mayo obligèrent les antipéronistes qui
venaient de prendre la tête du Gouvernement à rappeler
Perón de l'île Martín García, où
il avait été relégué deux jours
auparavant dans le bagne militaire installé alors sur ce
confetti argentin au large de la côte uruguayenne, dans le Río
de la Plata.
(2)
C'est ce qui manque encore le plus à l'Argentine pour se
développer : de l'organisation !