Êtes-vous un esclave ?

Publié le 18 novembre 2013 par Copeau @Contrepoints

Par Rémy Va.

L’État est une institution politique qui détient le monopole de la violence physique légitime sur un territoire donné selon Max Weber. Cette définition, aujourd’hui communément admise, nous renseigne sur les applications de ce monopole dans notre société moderne. L’État, aujourd’hui, n’a pas comme mission régalienne de protéger les personnes et les biens, mais d’œuvrer à la construction d’un cadre social déterminé – c’est le constructivisme. Cette conception, après avoir gangrené les milieux intellectuels, achève lentement son action sur les cerveaux des citoyens lambda.

Ce cadre social est déterminé en démocratie par les urnes. Élire un président revient à voter pour le cadre social qu’on aura choisi d’appliquer. Vous voterez peut-être pour le plan socialiste, qui consiste à réduire les inégalités économiques et sociales et à supprimer toute forme de discrimination. Ou peut-être pour le plan conservateur en privilégiant la préservation d’institutions telles que la famille et l’idée d’un « État-nation ». Ces deux conceptions politiques sont aujourd’hui majoritaires en France, même si le conservatisme, représenté par l’UMP, tend à être reformulé par les libéraux comme un « socialisme de droite« . Il est toujours bon de rappeler que l’UMP n’a rien d’un parti libéral – qu’il est tout aussi inefficace dans la gestion des finances publiques, qu’il a lui aussi augmenté les impôts et a contribué à l’importance de la place de l’État. Vous pourrez opter pour un plan nationaliste avec le Front National, ou un plan communiste avec l’extrême-gauche. Toutes ces conceptions majoritaires sont totalement éloignées du libéralisme. Elles sont toutes caractérisées par l’étatisme, par le collectivisme, par la subordination de l’individu à la société. C’est pourquoi les idées libérales ont eu des difficultés à percer ces dernières décennies dans un paysage politique compact et réuni autour du culte de l’État.

Toutes ces conceptions politiques majoritaires en France, du nationalisme à l’extrême-gauche, ont un point commun : c’est qu’elles visent le « bien social », et elles ne s’en cachent pas.

Le bien social, ou bien commun est une notion volontairement floue. Réfléchissez quelques instants et demandez-vous quelle est la signification de ce terme. Est-ce le bien du plus grand nombre ? Si oui, sur quels critères ? Une somme d’individus a-t-elle des désirs, des besoins communs ? La réalité est non, comme l’ont parfaitement défini respectivement Friedrich Hayek et Ayn Rand dans La Route de la Servitude et Capitalism : The Unknown Ideal :

Le « but social » ou « but commun » en vue duquel la société doit être organisée est souvent désigné d’un terme vague comme « bien commun » ou « bien-être général » ou « intérêt général« . Point n’est besoin de réflechir beaucoup pour voir que ces termes n’ont pas une signfication suffisament définie pour déterminer une politique. Le bien-être et le bonheur de millions d’hommes ne sauraient être mesurés d’une façon exclusivement quantitative. […] Ce but commmun présuppose en somme, l’existence d’un code éthique complet où toutes les valeurs humaines sont mises à leur place légitime.

L’essentiel à nos yeux, c’est qu’un tel code éthique complet n’existe pas. Si l’on essayait de diriger toute l’activité économique conformément à un plan unique, on soulèverait d’innombrables questions auxquelles seul un code moral pourrait répondre, mais auxquelles la morale existante ne fournit aucune réponse.

–La Route de la Servitude, Planisme et Démocratie, Friedrich von Hayek

« Le bien commun, ou intérêt général, est un concept indéfini et qui ne peut être défini. Des entités telles que la tribu ou le collectif n’existent pas. La tribu (ou le collectif, ou la société) est seulement une somme d’individus. Rien ne peut être « bon » pour la tribu en tant que telle : l’utilité et la valeur ne peuvent être perçues que par des organismes vivants – des organismes individuels – pas par un agrégat désincarné de relations sociales.

Le « bien commun » est un concept dénué de sens, sauf si nous considérons la somme des intérêts de tous les individus impliqués. Mais cette conception ne saurait servir de critère moral : les questions « qu’est-ce que l’intérêt individuel » et « comment déterminer l’intérêt individuel » restent ouvertes.

Quand le bien commun d’une société est évoqué en tant que valeur supérieure à l’intérêt de ses membres, cela signifie que l’intérêt de certains hommes supplantent l’intérêt d’autres hommes, consignés au statut d’animaux sacrificiels. »

— Capitalism : The Unknown Ideal : What is Capitalism ? Ayn Rand

Remémorons-nous toutes les fois où des politiciens, de droite, de gauche, d’extrême-droite, d’extrême-gauche ou du centre ont évoqué cette notion volontairement confuse qu’est l’intérêt général.

Dans le cadre de la fiscalité, l’intérêt général déguise le concept de vol ciblé. Pour financer l’État (qui est montré comme le garant de l’intérêt général), il convient de taxer certaines personnes, certaines entreprises, certains secteurs d’activité, soit pour financer d’autres personnes, entreprises ou secteurs, soit pour redistribuer la richesse pillée. L’individu mal-informé acceptera cet état de fait. Il pensera qu’il est normal et nécessaire que les riches soient plus taxés et que les pauvres le soient moins. La réalité est encore une fois toute autre. Une analyse rapide des recettes de l’État nous montre que l’impôt sur le revenu ne représente que 24,1% des recettes de l’État. Toutes les autres recettes sont perçues par le biais de la TVA (payée par tous, même les plus pauvres), par la TIPP et autres taxes énergétiques (TICPE, encore une fois payées par tous même par les plus pauvres), par d’autres taxes sur certains produits ciblés (les taxes exhorbitantes sur les cigarettes n’épargnent pas non plus les pauvres) ou par les impôts sur les sociétés. Ce dernier point mérite d’être souligné : taxer les entreprises, c’est les empêcher d’employer de nouveaux employés, ce qui augmente mécaniquement le chômage et la pauvreté.

Dans le cadre des politiques environnementales, c’est celui qui pollue le plus (théoriquement et virtuellement) qui paye pour financer diverses opérations écologiques : énergies renouvelables, financements de projets verts. Il est difficilement concevable que l’intérêt individuel d’un toulonnais soit la construction d’une centrale électrique verte en Bretagne. L’intérêt général permet justement de justifier la spoliation des revenus de notre toulonnais – qui devient mécaniquement un esclave, travaillant pour d’autres sans consentement – pour le supposé intérêt d’un breton à des centaines de kilomètres de là.

Cette logique est applicable à toutes les ponctions fiscales de l’État. Le postulat de l’intérêt général est en fait simple : pour justifier des politiques qu’aucun individu ne financerait car il n’y trouverait aucune utilité ou parce que ces politiques ne répondent à aucun besoin, le merveilleux drapeau de l’intérêt général est brandi.

Aujourd’hui, il convient de se poser une question très simple. Suis-je un esclave ? Suis-je un animal sacrifié sur l’autel de la collectivité ? Sur l’autel de l’égalité socialiste, des bonnes mœurs ou de la Nation ? Vous, commerçants de proximité, indépendants et libéraux, auto-entrepreneurs et entrepreneurs, jeunes en quête d’avenir et d’opportunités, employés surtaxés, êtes-vous des esclaves au service d’autres personnes ? L’État français, comme de nombreux autres États collectivistes, a façonné depuis bien longtemps une interdépendance superflue entre les Français. Des esclaves peuvent ainsi être esclaves d’autres esclaves. Un propriétaire taxé sur ses biens immobiliers financera peut-être un plan social inefficace pour une entreprise employant des cadres surtaxés à cause de leurs revenus légèrement supérieurs à la moyenne. La célèbre citation de Frédéric Bastiat, « L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde essaye de vivre aux dépens de tout le monde » n’aura jamais été aussi vraie. De là germent toutes les haines raciales et communautaires, un tel refusant d’être l’esclave d’un tel en raison de son appartenance ethnique ou religieuse. Il ne tient qu’aux Français de se soulever et de lutter pour l’abolition de l’esclavage moderne : celui du collectivisme et de l’étatisme. Il ne suffit pas de s’indigner, libérez-vous !