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1:12

Publié le 18 novembre 2013 par Samiahurst @samiahurst

Elle ne va sans doute pas passer, l'initiative 1:12 lancée par les jeunes socialistes. En tout cas, malgré des efforts très originaux pour convaincre de la part des initiants, les sondages la donnent perdante.
Malgré tout, je ne résiste pas à saisir l'occasion pour vous remontrer la vidéo qui ouvre ce message. Je vous en avais déjà parlé. Richard Wilkinson y détaille, clairement et tranquillement, les effets que les inégalités sociales ont sur les sociétés. Au fil des données, c'est un autre regard sur nos débats politiques du moment qui se dessine. Car avec l'augmentation des inégalités, c'est aussi l'insécurité qui avance. Les sociétés plus inégales ont plus de crime. Moins de confiance. Elles punissent plus sévèrement. Leurs prisons sont plus pleines. Côté santé, leur espérance de vie est plus courte, leur santé mentale moins bonne. Une société plus égalitaire (pas totalement égalitaire, plus égalitaire) c'est une société où, pour beaucoup de raisons, on vit mieux.
Une autre chose que montrent les chiffres de Wilkinson est que ce résultat est le même quel que soit le chemin par lequel on y parvient. Certaines sociétés 'fabriquent' plus d'égalité en limitant les écarts de revenus, d'autres en taxant progressivement plus les revenus de plus en plus élevés. Les unes et les autres en tirent les mêmes effets positifs. Certaines sociétés ne 'fabriquent' pas plus d'égalité, et elles s'en sortent moins bien.
Une fois qu'on a compris ça, on doit admettre que cela peut être du ressort d'un état de vouloir limiter les inégalités. Un des arguments souvent entendus, que limiter les écarts est une limite à la liberté personnelle des employeurs, est vrai. Sauf que l'état a parfaitement le droit de limiter la liberté des employeurs au nom de la protection de tiers. On n'a pas le droit de demander à son employé d'amener aussi travailler son enfant. On n'a pas non plus le droit de polluer n'importe comment, même si dans ce cas les personnes protégées sont moins faciles à identifier. Limiter les inégalités dans une société ressemble à ce deuxième exemple. Cherchez la victime, elle ne sera pas directe. Comment identifier quelle victime de cambriolage, ou d'infarctus, aurait été épargnée si nos sociétés étaient plus égalitaires? Passé un certain écart, ces victimes, existent pourtant bel et bien. Limiter les inégalités protège des tiers, et c'est là une des raisons qu'on admet comme acceptable pour mettre des limites à la liberté des personnes.
Alors, en Suisse, où en est-on? Côté inégalités de revenus, nous ne sommes pas au niveau des Etats-Unis. Encore moins, évidemment, au niveau des inégalités qui existe si on regarde la planète dans son ensemble. Non, en Suisse, si on nous compare avec d'autres pays de l'OCDE, on est à peu près au milieu. Un constat que plusieurs sources confirment.
Si on regarde de plus près on constate cela dit que les inégalités, comme pas mal de choses, cela varie selon les cantons. Dans cette petite animation vous pouvez sélectionner le vôtre à droite dans la liste, puis appuyer sur 'play' pour faire défiler le temps: plus la boule se déplace vers la droite, plus les revenus sont inégaux.
Ensuite, il semble que l'on arrive à des résultats différents selon les comparaisons que l'on fait. Par exemple, un chercheur publiait l'an dernier que "De 1998 à 2008, la part de revenus des 1% les plus riches par exemple a augmenté de 32%, celle des 50% les moins riches a baissé de 4%."
En calculant autrement, "Les revenus du 10e décile sont 72 fois plus importants que ceux du 1er décile." Mais c'est le revenu après les impôts qui compte, si on suit Wilkinson. Sur ce plan, l'Office fédéral de la statistique nous rassure en indiquant que le rapport entre le revenu disponible (ce qui vous reste après les impôts, les contributions sociales, les primes d'assurance et les pensions alimentaires) n'est que de 4.4 si on compare les 20% les plus riches et les 20% les plus pauvres: nettement moins que le rapport demandé par l'initiative. Si on regarde les données du rapport complet, en revanche, on constate que le point le plus élevé de la courbe du revenu disponible est à plus de 12'000.- par mois, et le point le plus bas à ... -1000.- par mois (c'est à la page 20 pour les curieux). Un rapport nettement plus grand, donc, même en tenant compte des impôts.
Tout ça, ça donne à l'arrivée un niveau vivable? Un peu plus, un peu moins, d'insécurité, de confiance mutuelle, de criminalité? Et à quel prix? Désaccords vénérables que tout cela. Ici, les avis vont certainement diverger. Mais en tout cas voilà un sujet dont on n'aura pas fini de parler dans dix jours.

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