Rien ne va plus, chacun s’en sort comme il peut, celui qui dort dans la rue et celui qui le croise. Même Lourdes ne fait plus de miracles. Et si on guérissait les blessures du monde depuis les célèbres sources d’eau chaude d’Aix-la-Chapelle en Allemagne de l’ouest ? Ah… Aix-la-Chapelle et les bienfaits de ses stations thermales… Manqué ! Car Komplikations est là pour vous rappeler que tout va mal. Le réveil à l’heure punk. Douloureux, n’est-ce pas ?
Komplikations, c’est trois hommes et un acouphène. Komplikations, c’est du punk sans guitares mais avec des synthétiseurs. Du punk sans guitares, une hérésie ? Dans ce cas-là je vous emmène avec moi dans la Californie des années 70 assister à un concert chaotique des Screamers ou d’autres groupes de la West Coast qui font office de passage de témoin du punk-rock à guitares au hardcore-post-punk-new-wave à synthétiseurs. The Screamers, que nous n’aurons jamais la chance d’écouter avec un son studio puisqu’ils n’ont jamais sorti d’albums. Ces albums que Komplikations, eux, produisent depuis 2012. Pour The Screamers, pour eux-mêmes et pour nous. Pour The Screamers, à qui ils rendent un hommage direct avec une musique minimaliste, synthétique, une batterie brutale et une voix criarde. Pour eux-mêmes, parce qu’ils trouvent dans le punk une échappatoire à tous leurs maux. Et pour nous, pour nous secouer. La musique, les textes, la pochette et le titre du nouvel album, Poverty, les prestations sur scène, tout est direct et sincère avec Komplikations. C’est l’urgence punk.
Poverty est nihiliste, certes, il reflète une réalité, celle de Komplikations, la nôtre et celle d’une société dans laquelle tout va trop vite, où l’on consomme plus d’iPhones que d’amour. Depuis le premier album, Step Forward, sorti en octobre 2012, le personnage d’Apathy ne se remet toujours pas de sa rupture amoureuse (« When my friends are moving, leaving me aside, I wanna follow them, but I am too far behind »). Il est à la ramasse, reste enfermé chez lui, et de toute façon le spectacle auquel il assiste quand il déambule dans les rues ne l’aide pas à se relever (Down : « Walking through the City Ground, there is no one else around, I see all the empty flats, I see all the dirt on the ground »). Il voit un monde matérialiste, froid, sans sentiments (« Ihr Augen sind leer, ohne Gefühl »). De plus en plus de personnes sont laissées sur le bord de l’autoroute du capitalisme parce qu’ils n’ont pas de quoi payer le péage. Komplikations s’arrête sur la bande d’arrêt d’urgence et pousse un cri d’alarme : c’est en revenant aux valeurs essentielles qu’on s’en sortira (Reduce : « Useless and nasty things! Go and get rid of all that shit! Buy only what you really need! »). Step Forward nous proposait une version synthétique du morceau Complications de Killing Joke, Poverty finit de nous achever avec une reprise des Units.
Un testament punk sans concession servi par une pochette tranchante : depuis une fenêtre, deux chiens au regard neutre assistent à ce qui se passe dans la rue. Un vieil homme, seul et pauvre, déambule dans une atmosphère froide, perdu dans ses pensées – encore faut-il qu’il en ait.
Le punk ne passe pas par quatre chemins. Espérons qu’un prochain album nous apprendra que le protagoniste d’Apathy a depuis relevé la tête et qu’il est reparti de plus belle dans son offensive punk.