ZOMBIE CHERI
Résumé :Paris est peuplé de zombies. Les derniers humains s’organisent pour survivre dans cette civilisation dangereuse et intolérante. Aurore tente de vivre en couple mixte une belle histoire romantique.
Réalisateur:Jérôme Genevray
Scénariste: Jérôme Genevray
Acteurs: Linh-Dan Pham, Pio Marmaï,Eric Savin,Julien Ratel,Gérard Dessalles, Cybèle Villemage,Noa Genevray,Emma Debroise,Yves Alion
Pays :France
Année : 2012
Durée:10 min
Production: Full House
Critique :
Zombies par-ci, zombies par là, au cinéma, à la télé, en BD, c’est une véritable invasion. De quoi donner une indigestion de cerveau à ceux qui ne sont pas accros à ce genre.
Heureusement tout de même, certaines oeuvres sortent leur épingle du jeu en s’écartant d’un balisage stricte et contraignant que confère l’univers zombièsque. C’est le cas de ce Zombie Chéri, réalisé par Jérome Genevray.
Dans un Paris peuplé de morts vivants, Aurore, à la quête d’une vie normalisée parfaite, s’adapte à sa nouvelle condition, vivant même en concubinage avec un zombie.
Le film pose la question suivante, inhérente à notre société moderne : «Pour survivre doit-on rentrer dans les rangs et devenir nous-même des zombies ; nous fondre dans la masse et nous adapter à une culture unique dominante uniformisée? » Une véritable satire sociale qui va au-delà de la simple histoire d’amour des deux personnages principaux.
La mise en scène de Genevray est magistrale et offre aux acteurs un terrain de jeu qui magnifie leurs prestations.La musique travaillée et les maquillages réussis font de ce court une véritable friandise cinéphilique.
Bref, Zombie Chéri,un court dont la satire sociale en toile de fond et le traitement des personnages rappellent le message engagé de Romero. Un véritable gage de qualité qui coiffe au poteau nombre de grosses prods du même genre.
Note : 16/20
Bande-annonce :
Sites Internet :
Site officiel
Interview du réalisateur et scénariste:Jérôme Genevray
Fantasticmovies:Pourriez-vous vous présenter en quelques mots aux lecteurs de fantasticmovies?
Jérôme Genevray : J'ai commencé au lycée à réaliser avec des amis mes premiers courts métrages. On bidouillait à l'époque avec des caméras DV et analogiques, en passant des nuits à faire des montages et trucages sur un ordinateur qui plantait.. Depuis, j'ai réalisé plusieurs courts, écrit un long métrage pour Ugc et créé des cours d'entraînement pour les comédiens au jeu face caméra. Ma passion est devenu mon métier ! Je termine l'écriture de mon premier long métrage avec une société de production .
Fantasticmovies: Quel est le dernier film que vous avez vu qui vous a le plus marqué?
J.G. : Sans hésitation Gravity, autant sur l'histoire que sur la forme. Même si je regrette un ou deux rebondissements un peu artificiels pour relancer l'histoire (ex : le manque de fuel dans la navette de sauvetage...), ce film est exceptionnel et me marquera longtemps (comme Children of men !)
Fantasticmovies: Quelles sont vos influences en tant que cinéaste?
J.G. : Si je devais n'en choisir qu'un : Spielberg est celui qui m'a donné le plus envie de faire du cinéma depuis adolescent. Sa maîtrise de la narration (et son apparente simplicité) est un modèle.
Du côté de la télévision, des séries comme Dexter (mais pas toutes les saisons), Oz, Tutor et surtout Homeland sont une grande source d'inspiration scénaristique.
Fantasticmovies: Que pensez-vous du cinéma de genre actuel en général et dans votre pays?
J.G. : Je regrette que l'on arrive plus à faire de bons films de genre, alors qu'on avait un savoir-faire original à une certaine époque (par exemple La beauté du diable de René Clair). Le problème est moins une question d'argent que d'avoir un bon scénario. Malheureusement, les derniers films que j'ai vu reposent plus sur un visuel, un décors ou même une situation inhabituelle que sur un conflit fort entre les personnages. Et c'est toujours le conflit qui dirige l'histoire et non un univers étonnant.
Fantasticmovies:Comment est né le projet?
J.G. : De l'envie de faire un film de zombie depuis longtemps, et de creuser ce qui me touche beaucoup dans ce mythe : que reste-t-il de notre part d'humanité quand le corps se décompose. Autrement formulé : qu'est-ce qui fait de nous des êtres humains ?
Partant de cette question (génialement bien traitée dans Walking Dead), j'ai eu l'idée de raconter une histoire d'amour qui dépasse la mort, comme dans le très baroque "Della morte Dell'amore" de Michel Soavi (1996).
L'autre envie, plus ludique, c'était de réunir dans une même salle (pour dix petites minutes ;), les garçons (plutôt fan de films de zombie) et les filles (plutôt fan des comédies romantiques).
J'ai reçu des messages de spectateurs me disant qu'il avait trouvé ce film de zombies émouvant. C'est formidable, c'est ce que j'espérais !
Fantasticmovies: Zombie Chéri est vraiment très beau à regarder et le travail du son est vraiment bien, était-ce beaucoup de travail en post-production?
J.G. : Déjà : merci beaucoup, cela me touche ! Hé bien non, l'essentiel du travail pour les effets visuels était au tournage. La partie la plus importante de la post-production était pour le son, pour recréer une ambiance complète puisqu'il ne fallait pas de bruit de civilisation (voitures, etc.). J'ai travaillé avec Nicolas Bourgeois et Vincent Cosson, qui sont sound designer et mixer. C'était passionnant de recréer un univers sonore. La musique compte beaucoup avec les chansons originales de Mark Daumail (le leader de Cocoon) et les musiques d'Emmanuel d'Orlando (le compositeur de la BOF de Populaire).
La post-prod sur l'image s'est limitée à l'étalonnage. Une première fois dans une société de prod qui ne m'a pas donné satisfaction, une deuxième fois sur l'ordinateur portable de mon chef-opérateur Williams O'Callaghan. Nous avons utilisé Color, pour obtenir ce rendu post années 70, avec une saturation importante.
Fantasticmovies: Parlez-nous des effets spéciaux.
J.G.: Les effets spéciaux étaient uniquement sur le terrain, il n'y a eu aucun trucage numérique. Je suis né avec le digital, mais dans les films, je l'aime quand il ne se voit pas (ce qui est n'est pas encore toujours le cas aujourd'hui.). Avec David Scherer (un incroyable pro des SFX et maquillages traditionnels), nous voulions des zombies à l'ancienne (soit réalistes : la pourriture devait être crédible et suintante). Les techniques ont progressé : David a créé dans son atelier des décalcomanies en relief, que l'on applique rapidement sur la peau des comédiens. Il faut moins de dix minutes sur un tournage pour avoir un zombie au visage complètement ravagé. Le gain de temps est considérable, surtout quand il faut maquiller une vingtaine de zombies.
Fantasticmovies:Fut-il facile de trouver des acteurs et une équipe motivés pour le film?
J.G.: Oui, et j'étais ravi de cette belle énergie collective que nous avons tous eu. Je me souviens que pour convaincre Pio Marmaï pour jouer le rôle d'un zombie, ou Mark Daumail pour m'écrire deux chansons originales, cela a été très simple. Mon pitch a suffit ("une comédie romantique dans un monde zombie").
Fantasticmovies: Votre recette du faux sang.
J.G.: Je ne la connais pas, il faut demander à David Scherer (l'homme des effets spéciaux sur le terrain). Mais je sais que cela avait un goût de framboise (pour avoir fait un humain qui se fait attaquer dans le générique) !
Fantasticmovies: Pour survivre doit-on rentrer dans les rangs et devenir nous-même des zombies,nous fondre dans la masse et nous adapter à une culture unique dominante uniformisée?
J.G.: A l'époque de la mondialisation, où nous sommes tous sur Facebook ou presque, la question est essentielle. Nous sommes au coeur de la problématique des zombies, qui est une belle satire sociale. Le film "Dawn of the Dead" de Romero a clairement amené cette dimension sociale dans le mythe zombie; notamment quand les zombies retournent "bêtement" dans le centre commercial, seul résidu de leur (triste) vie humaine. "Walking Dead", épisode après épisode ou album après album pose cette même question : doit-on tout abandonner quand on n'est plus dans la norme ? "Je suis une légende" (je pense à la nouvelle, et non au film qui était décevant) pose aussi cette question. Dans Zombie Chéri, mon héroïne tente de garder un sens à sa vie grâce à son amour. Ce qui semble impossible.
Le paradoxe de l'homme est qu'il ne peut pas vivre seul, mais a besoin de singularité dans un groupe.
Fantasticmovies: Avez-vous une anecdote à raconter à propos du tournage?
J.G.: Nous devions tourner un dimanche après midi une scène avec un steadycam, qui opérait un 180° autour de l'héroïne (la délicieuse et incroyable Linh-Dan Pham, pour qui j'ai écrit cette histoire). Manque de bol, nous arrivons au moment du seul rayon de soleil de la journée. Le parc se remplit de familles avec leurs enfants (ce qui est la moindre des choses pour un dimanche après midi à Paris !). Impossible de faire le plan sans avoir un "humain bien frais" dans le cadre, ce qui ne colle pas du tout à l'histoire. Pendant que je modifie fébrilement mon découpage pour faire coûte que coûte cette scène, mes deux régisseurs vont voir un par un les 30 familles dans le parc. Ils les convainquent de se mettre dans un petit coin du parc (incroyable !). Nous pouvons finalement tourner notre plan pendant une heure. Conclusions : 1/ vive les régisseurs, et 2/ les parisiens sont des gens gentils :)
Fantasticmovies:Parlez-nous du budget de Zombie Chéri.
J.G.: Nous avons eu de la part de Canal +, qui a commandé le court métrage, le même budget que les autres films de la collection ("la collection écrire pour..."), soit aux alentours de 25000€. Ce qui n'est pas beaucoup, vu le nombre de lieux, les maquillages et l'obligation de tourner en pellicule (dans notre cas, du 16mm). Mais avec une équipe soudée et des producteurs qui connaissent sacrément bien leur métier (Full House Films), nous nous en sommes très bien sorti !
Fantasticmovies: Des projets futurs ?
J.G.: Oui, je développe un long métrage avec un producteur. Nous commençons la phase du financement. Et je continue avec bonheur mes ateliers de coaching pour les comédiens face caméra (http://workshop.genevray.com)
Fantasticmovies: Un mot pour la fin?
J.G.: Garglllll !