Daniel Naud a choisi d’approcher son métier en racontant des anecdotes, choisissant parmi les plus sensationnelles qu’il ait vécues. Le livre commence d’ailleurs par « La ligne de front » qui raconte la découverte d’un cadavre dans une auto en forêt un an après le décès. La deuxième « Les p’tits bonshommes verts » décrit, moult détails à l’appui, un pendu corpulent impossible à sortir d’un placard étroit. Malgré ma perception du sincère désir de l’auteur de décrire ces situations avec respect et élégance, le propos de ces deux chapitres est si dégoûtant que le ton est donné. J’imagine que plusieurs seront tentés d’abandonner leur lecture et ce serait malheureux, loupant certains chapitres plus sensibles. « Vivre sa mort », par exemple, relate l’histoire d’une famille particulière entourant les derniers désirs de leur aïeule, décidée à vivre pleinement ses obsèques.
Il ne faut surtout pas manquer « Tout ce que vous avez toujours voulu savoir », chapitre trop court qui s’attaque au cœur du sujet. Ciblant directement la fonction d’embaumeur, je l’aurais d’emblée placé en tête. Je me suis demandé si l’option de placer les anecdotes sensationnelles au début ne révélait pas un manque de confiance envers l’intérêt suscité par le côté technique du geste d’embaumer.
La majorité des anecdotes racontées se déroulent pendant la période où Daniel Naud n’a pas acquis l’expertise d’embaumeur (il a par la suite étudié), son travail consistant donc à chercher les cadavres sur les lieux des accidents. J’ai trouvé le dernier chapitre (« Les fournaises de l’enfer ») lassant, le thème de la récolte pointilleuse de vestiges découlant d’une catastrophe ayant été largement couvert dans les chapitres antérieurs. Chaque objet, chaque lambeau de chair dénichés dans ce bus, transformé en tombeau pour 19 personnes, est décrit avec d’infimes détails, description pointilleuse des malaises physiques de l’exécutant compris.
La maladroite organisation des chapitres n’en fait pas pour autant un livre à éviter. J’ai été captivée par la passion candide de l’auteur pour son métier de thanatologue, et même d’écrivain.
À mon avis, Daniel Naud aurait gagné à partager la diversité de ses émotions, au lieu de nous en souligner une : la fierté. Cette émotion revient à tout moment, et de par son intensité, vient à prendre une teinte héroïque. J’aurais aimé plus de réalisme, apercevoir aussi les failles du héros, ses ratés, ses déconvenues, ses lassitudes. Même dans la pire des situations cauchemardesques, c’est la passion du métier qu’il fait ressortir.
Cette histoire plaira aux personnes pour qui le macabre offre un attrait certain, ou les personnes déterminées à en extraire le meilleur.
Bibliographie
Avis de décès – Les tribulations d’un croque-mort
Daniel Naud
PERRO Éditeur, 2013
246 pages