GET UP
À travers le monde, la démocratie est exercée de manière spécifique en fonction des contextes. Diverses formes sont élaborées depuis le XIXe siècle, au sein d’états-nations régis par un nombre croissant de lois, par des institutions désormais enracinées et par un système simple de représentation du peuple. Un espace consensuel se met en place dans ces systèmes où la confrontation n’a plus de place. Dans un même temps, les fonctionnements propres à chaque nation s’entremêlent dans un monde qui évolue vers un grand empire global. Il est temps de penser le fonctionnement et l’exercice de ce nouvel ordre. Débute cette longue construction, non plus de peuple à peuple mais de gouvernement à gouvernement. La démocratie, que le peuple appelle de ses vœux, représente t-elle alors une utopie moralisatrice ?
À l’échelle européenne, des marqueurs du désenchantement démocratique se dessinent et mettent en doute son réel accomplissement. Le repli identitaire et le retour à la sphère privée sont perceptibles. L’importance des besoins individuels à court terme fait face au désengagement pour la construction d’un meilleur avenir commun. Dans ce contexte actuel, quel est le devenir de la démocratie, dont le modèle semble caduque et où le peuple ne peut intervenir ? La formation de sociétés autonomes, notamment par les libertés qu’offrent le web et la culture insurrectionnelle, peuvent-elles encore être considérées comme de véritables oppositions ?
Afin de repenser la démocratie pour l’accomplir, il paraît important de s’éloigner de la principale figure démocratique en usage qu’est le régime, en tant que somme de procédures et d’institutions, pour revenir à sa définition comme ensemble de valeurs et réelle manière d’être collective. En plaçant des expériences artistiques au cœur de ce débat, l’exposition « GET UP » présente des œuvres poétiques et politiques provenant d’espaces urbains et appelant chacun à se questionner.
Alors que l’agora était hier le berceau des pratiques communautaires, est-elle toujours l’endroit d’expression et de représentation des populations ? L’espace urbain semble aujourd’hui être cerné par des logiques de confort et de sécurité. Pourtant, dans le cadre de revendications ou d’appels à la construction d’imaginaires démocratiques, des peuples continuent d’investir ces lieux de rassemblements, voir même d’en créer de nouveaux. L’insurrection, que l’agora voit souvent naître, représente un dysfonctionnement de la démocratie et reste une action majeure dans la ressource corrective des institutions. Elle peut aussi être considérée comme le paroxysme de la démocratie, alors même qu’elle n’est sous l’emprise d’aucun gouvernement, d’aucune constitution et pas encore menacée d’être trahie. Cette puissance de résistance et d’affirmation, qui redonne au peuple sa souveraineté, peut-elle symboliser l’essence même de la démocratie et ainsi constituer un modèle pour son accomplissement ? La richesse de la démocratie ne réside t-elle pas dans sa critique et son inachèvement ?
UN PROJET EUROPEEN
Le contexte
Le projet « Art Cooperation Transmission Democ[k]racy » regroupe sept partenaires institutionnels, plus de quarante artistes, ainsi qu’une vingtaine de chercheurs. Croisant résidences, séminaires et expositions, « A.C.T. » se poursuit après Rennes et Eindhoven (Pays-Bas), à Cluj (Roumanie) puis Belgrade (Serbie) jusqu’en août 2014. Face aux replis identitaires et sécuritaires qui se manifestent dans différents pays européens, symptômes alarmants d’une Europe en crise de démocratie, les partenaires du projet « A.C.T. » choisissent de promouvoir l’art comme espace critique fondamental au débat sur l’avenir de la démocratie. Il s’agit à la fois de reconnaître l’importance d’une liberté de création, tout en questionnant les modalités de formation des artistes et d’inscription des œuvres dans l’espace social.
Itinérance
Cette exposition est itinérante et s’ouvre à chaque occurrence à des artistes locaux ou en résidences dans les structures partenaires. Suite à la Fabrica de Pensule à Cluj-Napoca en Roumanie (Transylvanie) en octobre 2013 et au Centre culturel Serbe à Belgrade en janvier 2014, l’exposition « GET UP » est présentée à Mains d’Œuvres à Saint-Ouen en février et mars 2014.