À l’instar de "Période Glaciaire", "Les Sous-sols du Révolu" ou "Aux heures impaires", "Le chien qui louche" est un one-shot coédité par Futuropolis et le musée du Louvre. Etienne Davodeau n’est donc pas le premier auteur à recevoir comme mission de s’attaquer à une œuvre, une collection ou une partie du célèbre musée…
C’est via l’intermédiaire de Fabien, un agent de surveillance du musée du Louvre, que l’auteur choisit de nous faire découvrir cet endroit touristique. L’intrigue démarre lorsque le jeune homme rencontre sa belle-famille : les Benion. Ceux-ci, profitant de la présence d’un "expert" du Louvre, lui montrent une toile peinte en 1843 par leur arrière-arrière-grand-père et se demandent si ce tableau signée Gustave Benion aurait sa place au Louvre ou s’il s’agit tout simplement d’une merde sans intérêt. Par politesse, Fabien tente de faire pencher sa réponse vers la première option… mais peut-être aurait-il dû être plus catégorique…
Si l’intrigue légèrement abracadabrantesque consiste donc à faire entrer une croûte immonde représentant un chien qui louche au Louvre, la force de ce récit se situe indéniablement au niveau des personnages. Il y a tout d’abord le couple Fabien-Mathilde qui apporte beaucoup de fraîcheur et de légèreté à l’histoire… et même un soupçon de sexe. Il y a ensuite la famille Benion, uniquement composée de protagonistes hauts en couleurs, qui insuffle beaucoup d’humour au récit. Mais il ne faudrait pas oublier monsieur Balouchi, grand habitué du Louvre et qui, en tant que membre de la société secrète « République du Louvre », ajoute une pointe de mystère à l’ensemble. Force est d’ailleurs de constater que ce mélange entre une comédie familiale burlesque, une histoire d’amour coquine et une intrigue peu ordinaire fonctionne à merveille.
De plus, Etienne Davodeau remplit parfaitement son contrat en proposant une réflexion aussi intelligente qu’amusante sur la place de l’Art et sur sa perception. Le métier de Fabien permet ainsi à l’auteur de déambuler à travers les différentes salles et de s’interroger sur ces touristes qui veulent uniquement voir la Joconde sans véritablement s’intéresser aux œuvres mineures (enfin, moins mineures que « le Chien qui Louche » tout de même). La présence de monsieur Balouchi et de sa confrérie occulte permettent de pousser cette réflexion encore un peu plus loin et de s’interroger sur les raisons qui font qu’une œuvre puisse être accrochée en ces lieux. En annexe, l’auteur détaille d’ailleurs la procédure exacte qui permet aux œuvres d’intégrer le musée.
Visuellement, le dessin noir et blanc de Davodeau restitue plusieurs parties du Louvre avec brio et livre une nouvelle fois une galerie de personnages particulièrement attachants.
Encore un coup de cœur signé Etienne Davodeau !
Retrouvez d’ailleurs cet album dans mon Top de l’année.