Depuis Septembre 2001 désormais, votre habituel rédacteur troque le vêtement du passionné culturel pour le statut de patient diabétique de Type 1. Pourtant, les deux domaines sont intimement liés dans un parcours profondément personnel. Une journée par an, brassée dans la multitude des journées mondiales dont le sens n’a d’importance qu’aux organisateurs et aux personnes déjà concernées, se tient dans notre calendrier une journée mondiale réservée au Diabète. Je ne me tiens pas en tant que spécialiste du métabolisme; moins encore en tant que conseiller sur la question. Ces prétentions, non, définitivement, elles ne m’appartiennent pas. Toutefois, un léger tour d’horizon, un témoignage, des ressentis sur le long terme paraissent faisables; quand bien même il est "difficile" encore aujourd’hui d’en parler ouvertement.
Souvent, cette difficulté d’évoquer cette "maladie du métabolisme" est rempli de clichés, de fausses idées autant désagréables que faites maladroitement. Au fond, elles en deviendraient presque blessante à évoquer ce "qu’être diabétique". Un ensemble de Foire aux Idées reçues, souvent entendues :
1°/ "Ton diabète, c’est quoi ? Tu as besoin de sucres ou tu as trop de sucres ?"
Ni l’un ni l’autre; il s’agit d’un équilibre à atteindre. On classe traditionnellement 2 types de diabètes; mais non pas 2 situations à réguler en termes de glycémie !
- Un diabète de Type 1. Auto-immune, elle aboutit à une non régulation naturelle par l’organe du Pancréas supposé fournir de l’insuline et régler chaque repas ingéré, sucre et autres consommations contenant des Glucides. Pour le patient, cela suppose donc de remplacer cette absence organique par une action : l’apport d’insuline par injection. ("Stylo", "seringues classiques" ou par un système de Pompe à Insuline.) Celui-ci intervient de façon soudaine généralement chez les enfants mais aussi à d’autres tranches d’âge.
- Un diabète de Type 2. Lié à un âge avancé, supposé et observé chez des patients à la masse corporelle importante. (Il existe de rares cas à la taille "mince".) L’insuline délivrée par le Pancréas devient de moins en moins efficace par rapport à la richesse de la nourriture : extrêmement gras voire très sucrée ou encore les deux.
2°/ Le diabète ne concerne que des personnes obèses.
Faux. Extrêmement faux. Il favorise entièrement le Type 2; mais le Type 1 et d’autres exception du Type 2 ont des corpulences qui ne donneront jamais une situation identique. Témoin vivant de cette chose, comptez et imaginez un jeune homme de 55Kg environ pour 1m70 environ.
3°/ Le diabète, c’est une liste d’interdits et de choses permises.
En partie faux. Toute le problème de la maladie réside dans l’adoption d’un équilibre et d’une prise en main par le patient du taux de Glycémie. Il n’est pas contre-indiqué de manger une part de Pizza; de prendre un dessert sucré … A condition de savoir équilibrer la nourriture ingérée supplémentaire. Et là réside toute la complexité de la chose. Estimez votre dessert comme quelque chose d’extrêmement sucré; rajoutez 3 u. à votre "bolus" (Dose habituelle) d’insuline. Vous pourrez très bien être en "hypoglycémie" (Déficit de sucre dans le sang) ou en "hyperglycémie" (Surplus de sucre dans le sang) si la nourriture fut extrêmement sucrée.
Lecteur et Carnet, les outils indispensables du suivi de la Glycémie !
Depuis l’âge juvénile de 7 ans, lors de ce mois de Septembre 2001, l’existence de l’enfance est directement passée à quelque chose de très sérieux. Le Diabète de Type 1, ce fut l’action concrète d’une injustice abstraite : elle ne dépend vraisemblablement pas de vos proches; elle n’est pas contagieuse et n’est pas génétiquement toujours vérifiable. Elle n’est pas non plus l’erreur de votre famille. On ne l’explique peut-être pas assez; du moins cela doit s’apprendre avec une grande adresse psychologique. Mais rapidement, on se sent "coupable" d’être différent. Est-ce notre faute ? Est-ce l’environnement ? Comment expliquer que le corps ne réagisse pas "comme les autres" ? En 2001, ce fut une série de protocoles appliqués avec automatisme que l’on m’a inculqué : réaliser un dextro (Mesurer le taux de sucre dans le sang); en définir la dose nécessaire par injection(s) afin de soigner une forme de mal-être persistant : l’hyperglycémie (Dès 2.00g par L/Sang) c’est aussi une "haleine à couper l’acier", acide et désagréable pour le patient; l’envie sans cesse d’aller aux toilettes.
L’enfant a, par mal chance, horreur des injections. L’adulte en a encore le dégoût. Il faut faire attention au pincement de la peau, à ne pas repiquer là où la seringue est déjà passée, vérifier que tout se passe bien, se fier avec incertitude aux unités sélectionnées qui, parfois, par réaction du corps, agissent avec retard; correspondent à vos états mentaux, à vos tracas, à vos inquiétudes. Vérifier, contrôler, certifier que le taux de Glycémie n’est donc pas seulement une histoire de volonté, mais bien toute une mécanique du corps qui s’apprivoise. Avec le temps, on en connait quelques ficelles. Avec l’âge, on sait qu’il y a encore apprendre à ce corps non-servile, que la Glycémie dépend grandement de vos émotions, de votre gestion de Stress. Un rendez-vous important ? La catastrophe. Le Baccalauréat ? Des épreuves qui se ressentent sur le carnet de Glycémie. Des heures de conduite ? Des premières heures atroces qui vous font monter malgré votre volonté au-delà des limites habituelles.
Ces détails, je regrette encore de ne pas les avoir connu, avant. De ne pas avoir su les premières semaines à la sortie du centre Hospitalier, avoir reconnu qu’il fallait un temps d’adaptation. Pour vous, pour votre famille. Les premières semaines sont complexes, car elles deviennent ingérables, se transforment en un combat contre lequel il ne faut pas baisser les bras face à de mauvais résultats et les effets secondaires d’hypoglycémie comme d’hyperglycémie : un sentiment de désordre difficilement définissable mais aux contours de mal-être.
Après 8 à 9 années de piqures aux stylos et à la seringue à raison de 3 injections par jour … (Je vous suggère le calcul) La démarche a été naturellement tournée vers une Pompe à Insuline. Un dispositif d’avantages et de contraintes.
Alors … Être optimiste n’a pas toujours été simple pour l’entourage qui se confronte à autant d’incompréhension que de soucis pour l’enfant. Plus tard, les choses évoluent et l’adolescence obligent à un retour à l’hôpital à cause d’une acidocétose : (Taux de glycémie en constante hausse pouvant jouer grandement sur le reste du corps par une grande production de cétone) changements de doses; de stylos; d’habitudes; explications que, les mêmes préceptes appris en 2001 "ne sont plus les mêmes", "n’ont pas été suivis correctement", "tout ça est de votre faute". Inutile de rappeler que la blessure de l’injustice, alors que vous étiez quelqu’un d’équilibré et de globalement soucieux de votre alimentation, tombe en quelques jours. A la nouvelle sortie de l’hôpital, environ 7 ans à 8 ans après un douloureux séjour; vous voilà armé de nouveaux stylos. De nouveaux réglages …
Ca a en été de trop. Il a fallu se renseigner, prendre des informations, prendre contact, attendre. Encore, encore et encore avant d’avoir un rendez-vous pour quelque chose de prometteur. Cet espoir, ça a été une Pompe à Insuline qui supprimait l’horreur des stylos. Peur certaine de ces seringues; mais qui ont permis, vers la fin du traitement complexe par des mélanges d’insulines rapide/lente d’atteindre une moyenne d’environ 7% en Hémoglobine glyquée ! (7,7% si les souvenirs sont bons ?)
La Pompe Insuline, sa tubulure et sa pochette en Jean ! Directement dans la poche, la diffusion est faite par une canule (Posée sur le ventre) connectée par une tubulure. Une cartouche d’insuline est dans la partie inférieure de la "Game Boy" : la Pompe à Insuline.
Généralement en accord avec des centres relais, suite à un rendez-vous médical, qui proposent la Pompe à Insuline, elle est une réponse à un "mieux être". Attention : elle n’est pas une réponse adaptée à tous et toutes. Un pourcentage de personnes ne peuvent accepter d’avoir la maladie dans la poche; car ce dispositif relativement discret est portable. La Canule installée à votre ventre ou bras, la diffusion est en continue par des doses infimes délivrées sur une tranche horaire d’1 h. Si la réponse n’est pas parfaite; elle est à l’image des multiples défauts de cette maladie qu’est le diabète : éventuels douleurs à certaines "lanceurs" (Exemple de la Marque Cleo); bouchage possible en réaction avec la peau (Généralement, une zone de pose de la canule trop souvent sollicitée qui forment une "dureté" de la peau et empêche de réaliser un passage correct de l’insuline) voire pose sur une zone très sensible …
Je reprocherai au système de ne pas être parfait, d’être parfois agaçant par une approche matérielle : la cartouche d’insuline se change tous les 3 jours et doit être "intacte" : sans bulles lors de son remplissage … Quand bien même le mécanisme impose une grande rigueur, une grande méthode, elle est une méthode de confort. Elle est un message pour l’avenir : les améliorations techniques sont rares, mais elles arrivent. Elles peuvent être une source de confort qui "soulage" ce fardeau. Cette charge d’un équilibre, de bien-être, n’est pas celui des multiples publicités et multiples messages de dépistage légèrement idylliques ou simplets : le diabète a besoin d’être encadré. Par votre famille, par une équipe qui sait expliquer les raisons et les motifs de tel phénomène … L’échange, l’ouverture, le fait de ne pas rester seul avec cette maladie qu’est le diabète fait partie, aussi, de sa prise en charge.
Sans doute, sa complexité est un drame personnel. Il y a eu un avant et un après cette période. Mais avec certitude; essayez; dans le plus possible, d’adopter et d’avoir les moyens de vivre cet équilibre : il est alimentaire, autant que mental et constitue un ensemble. Je ne serai jamais un Sportif – Marathonien par choix et non pas par impossibilité; car cet équilibre trouvé avec la Pompe à Insuline correspond aux attentes. Bien que défaillant à certains moments, il est un ensemble de caractéristiques qui aident à "un mieux être". Il n’est pas encore facile d’entreprendre un récit à cœur ouvert; car sa présence, celle du diabète, m’est autant irritante que l’une des solutions de confort.
Plutôt que les moult clichés médiatiques sur le "dépistage gratuit"; le nombre croissant de patients … Il est indispensable d’en parler. De l’évoquer. D’en témoigner. J’espère, du moins, qu’à travers le Blog La Maison Musée, une approche a été possible. Peut-être pour certains patients, pour certains lecteurs concernés. Il est autant lié au désespoir qu’à une manière optimiste d’apercevoir des possibilités de "vivre" parmi le diabète. "Une ennemie à battre" afin de toujours trouver une forme de "stabilité".