Après un long silence, j'ai repris le chemin de l'atelier d'écriture virtuel des Impromptus Littéraires ...
Abandon ? Vous avez dit Abandon ???
By see description ("The Book of the Cat" by Frances Simpson) [Public domain], via Wikimedia Commons
Abandon
Il était parti.
Je ne savais pas à quel moment il avait fait ses bagages puisqu’il n’avait pas eu la délicatesse de tirer sa révérence en ma présence.
Ses habits, ses livres, ses bibelots idiots, jusqu’à son chat, s’étaient envolés.
Remarquez, j’aurai du anticiper le dénouement de notre idylle avec le nom dont il avait affublé cette pauvre bête : Abandon !
A-t-on idée d’appeler ainsi son animal familier ?
Pour ma part, je ne m’étais jamais habituée à ce fourbe greffier au pelage noir qui prenait un malin plaisir à planter les griffes de ses pattes blanches dans mon canapé et à réduire en charpie la moindre de mes plantes vertes. Mes pots de fleurs présentaient la mine désolée d’un champ de bataille de 14-18.
Là où l’Attila félin passait, plus rien ne poussait !
Ils étaient partis, disais-je…
L’homme et son chat.
Je ne savais pas si je devais me réjouir de la perte de l’un et pleurer le départ de l’autre ou vice et versa. Au final, lequel des deux avaient été le plus présent dans ma vie ? Le destructeur de végétaux ou le conjoint fantomatique ?
Je passais quelques temps à ruminer sur la scélératesse des unions modernes, sur les petits déjeuners crapuleux des débuts vite effacés par des bols de café avalés silencieusement devant la TV.
Sur les mesquineries, sur la défense des pseudos espaces vitaux, sur l’éloignement, sur l’absence, sur l’oubli…
Un matin, je fus tirée de mon lit désormais trop vaste par des grattements à la porte d’entrée. J’hésitais un instant me demandant s’il était bien nécessaire de se déranger pour un simple bruit puis je me décidai en entendant un farouche miaulement bien identifiable.
Cette satanée bête était donc revenue pour polluer ma vie ?
Ouvrant la porte, j’avisai Abandon qui se traina jusqu’au milieu de ma chambre pour s’écrouler sur ma carpette. Il avait bien grossi, son ventre pendait lamentablement lui donnant une allure de chat-basset.
Il me fallut un moment pour réaliser qu’Abandon était une femelle et non pas un mâle comme nous l’avions toujours cru et qu’il, enfin elle, s’était décidée à faire le don de la vie dans mon appartement d’abandonnée !
Elle m’avait choisi, moi, plutôt que son maître officiel semblant vouloir effacer ainsi les affres de la lâcheté.
Quelques jours plus tard, Abandon donna naissance à Félicité, Liesse et Jubilation.
Quant à la chatte, je la rebaptisais Abandonne.
Abandonne comme « abandonne le souvenir de ce sombre imbécile… ».
Pour retrouver le texte in situ : ICI