Cette étude qui a analysé les articles publiés lors de la pandémie de grippe H1N1 en 2009, accuse. Selon ces chercheurs des meilleurs instituts de recherche britanniques, les experts ayant des liens avec l’industrie pharmaceutique se sont montrés 6 fois plus susceptibles d’évaluer le risque potentiel comme supérieur à la réalité mais aussi 8 fois plus susceptibles de promouvoir l’utilisation des antiviraux lorsqu’ils avaient des liens avec les laboratoires concernés. Ce bilan on ne peut plus précis, publié dans l’édition de novembre du Journal of Epidemiology and Community Health, apporte des preuves de l’influence de l’industrie sur les stratégies de santé publique et conforte la tendance de recherche d’une plus grande transparence sur le Médicament.
Les chercheurs de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, de l’Imperial College London, du Princess Alexandra Hospital NHS Trust n’excluent certes pas que le biais dans l’analyse de certains universitaires pourrait aussi inconscient et lié à l’environnement et aux expériences cliniques mêmes des experts. Cependant, l’analyse des articles publiés au moment même où les gouvernements prenaient des décisions sur les stratégies et les achats d’antiviraux, montre globalement, une évaluation accrue des risques qui, s’ajoutant à un plaidoyer appuyé pour les produits pharmaceutiques pour contrer ces risques, ont pu conduire à une anxiété accrue du public et de la demande de vaccins et de médicaments.
Pour aboutir à ces conclusions, les chercheurs ont examiné 425 articles sur la grippe H1N1 rédigés par des experts universitaires et publiés entre avril et juillet 2009 dans tous les journaux nationaux britanniques. 12 journaux nationaux étaient inclus dans l’échantillon, les autres médias ne permettant pas une analyse objective étant exclus. Chaque article a été évalué de manière indépendante par 2 des chercheurs de l’équipe. Les articles ont également été classés en fonction de leurs sources (Organisations en Santé publique, laboratoires ou sources académiques).
Sur l’analyse des données présentées dans chaque article, chaque binôme de chercheurs a regardé si les chiffres cités concordaient ou non avec les données épidémiologiques officielles. Les citations et les références ont été vérifiées. Un système de codage a été développé puis affiné permettant d’évaluer le décalage entre le contenu publié et les données officielles et les preuves scientifiques.
Les conflits d’intérêts des experts universitaires ont été recherchés, vérifiés et documentés sur les 4 années précédant la pandémie.
Les conclusions sont claires :
· dans les articles étudiés, les experts universitaires sont la seconde source la plus fréquemment citée après les ministères de la santé,
· la moitié des experts ayant commenté l’utilisation de médicaments antiviraux ou de vaccins avait des conflits d’intérêts,
· un expert universitaire sur 2 cité ou auteur de l’article, a évalué le risque plus élevé que les prévisions officielles,
· les experts présentant des conflits d’intérêts avec l’Industrie ont eu 5,8 fois plus tendance à évaluer les risques comme plus élevés que les experts sans conflits d’intérêts,
· les experts académiques présentant des conflits d’intérêts ont eu 8,4 fois plus tendance à recommander ou favoriser l’utilisation des médicaments antiviraux que les experts sans conflits d’intérêts.
Selon les auteurs, il y a preuve de conflits d’intérêts entre les experts universitaires de la grippe A/H1N1, à une période critique de l’élaboration des politiques sur les médicaments et les vaccins. Ces preuves, écrivent-ils, s’ajoutent « à la masse croissante de documents mettant en évidence l’influence potentielle de l’industrie pharmaceutique sur les décisions politiques ».
Source: Journal of Epidemiology and Community Health doi:10.1136/jech-2013-203128 November 11 2013Academics and competing interests in H1N1 influenza media reporting (Visuel CDC)
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