En faisant la rencontre de Yannick cette nuit-là au Safari night-club (situé au quartier Hippodrome, à côté de l’hôtel de l’Indépendance), Ingrid B. était loin de se douter qu’elle tombait sur un dandy qui avait quitté cette vallée des larmes, il y a quelques années. C’est sous un ciel moutonneux qu’Ingrid, spécialiste du plus vieux métier du monde, a choisi d’arpenter les collines escarpées du mont Fébé ; pour la traque des proies pleines aux as.
Y étant, comme toute péripatéticienne expérimentée, Ingrid avait quelques sous pour, ne fut-ce que se taper son ticket d’entrée et s’offrir un petit jus.
Comme toutes les prédatrices, son regard s’est posé sur une table où un jeune homme à l’habillement très british lui faisait des clins d’œil, tout en l’invitant par un hochement de tête, à rejoindre sa crédence. Etant véritablement en mission, celle-ci, sans se poser de questions a rejoint illico presto son prince charmant du dimanche. Yannick lui fait une cours assidue non sans lui promettre monts et merveilles au cas où… Ingrid cède à ces appels du cœur. Les numéros de téléphone sont aussitôt échangés. Les deux tourtereaux se comportent désormais comme s’ils se connaissaient depuis des lustres. Câlins, bécots, attouchements, danses, promesses de mariage et consommation des grands crus accompagnent cet amour naissant.
« Les choses » coulent au point où la jeune fille est convaincue d’avoir trouvé l’homme qui la fera quitter ce métier pour une vie satisfaisante. Au bout de la nuit, les deux amis décident de se séparer avec la promesse ferme de s’appeler au téléphone. Ce qui est d’ailleurs fait dès le lendemain. Une semaine après leur première rencontre, les deux amoureux se retrouvent dans un restaurant de la place. Après un repas copieux et plantureux, bien arrosé aussi, Yannick prend sur lui d’indiquer son domicile qui, avait-il dit, se trouverait au « Rond-point Nlongkak » à Yaoundé.
Ingrid doit s’y rendre le lendemain à 18 h. Yannick lui remet un bon pactole avant de prendre congé d’elle. La jeune fille est galvanisée. Une fois sur les lieux, elle se renseigne chez des dames faisant du petit commerce aux alentours. Renseignement pris, elle se rend chez Yannick. Une fois sur place, elle toque à la porte et est accueillie par une voix féminine. C’est la mère de Yannick. Une fois la porte ouverte, elle demande à voir Yannick.
Et la mère de s’étonner : « je n’ai pas deux Yannick ici. Si c’est mon fils, il est mort depuis cinq ans, voilà d’ailleurs sa photo accrochée au mur », explique-t-elle les yeux embués de larmes. La jeune fille a nié tout en bloc : « Maman, c’est faux, je suis avec lui tous les jours. Pas plus tard qu’hier, j’étais dans un restaurant avec lui. C’est lui qui m’a invité ici ce soir (sic) », lance-t-elle blême de peur.
Devant son refus catégorique de croire à cette nouvelle, la mère de Yannick l’enjoindra de la suivre à l’arrière de la maison. Une fois devant la pierre tombale, photo à l’appui, elle lui dira : « voici la tombe de mon fils. Est-ce que j’ai besoin de te mentir ma fille ? Avec ce que tu me racontes là, j’ai l’impression que mon fils a été vendu au kong (1) ou au Famla (2) ». La jeune fille s’est aussitôt effondrée. Elle a été conduite dans un centre hospitalier pour la réanimation. Après avoir retrouvé ses esprits, elle a décidé d’abandonner la prostitution, pour se jeter dans le commerce. Sa santé s’est aussi considérablement dégradée. Ses jours sont-ils comptés ? Bien malin qui pourrait répondre.
Source: Leuksenegal