"Il faut intégrer les objets connectés au sein de solutions thérapeutiques"

Publié le 08 novembre 2013 par Pnordey @latelier

Interview de Jean-Luc Treillou, PDG des Laboratoires de Nutrition et Cardiométabolisme.

L'Atelier : Quelle est la situation actuelle du rapport des professionnels de la santé aux objets connectés aujourd'hui ? Existe-t-il des partenariats, des applications concrètes?

Jean-Luc Treillou : Pour moi, il ne faut pas se poser la question de la convergence des objets connectés à la santé et de leur valeur ajoutée mais celle plutôt, du moins aujourd'hui, contenue dans le basculement vers les enjeux nouveaux des maladies chroniques. Les objets connectés en tant qu'objets de mesures sont intéressants, mais le point le plus important, le véritable créateur de possibilités, est celui de l'intégration de l'objet connecté au sein d'une action, d'une solution thérapeutique globale et “patient centric”. C'est cette solution thérapeutique intégrée qui peut s'avérer un outil particulièrement utile et efficace pour répondre aux enjeux notamment des maladies chroniques. Il y aura forcément d'un côté un développement des produits de santé, mais ma vision tient à ce que les connected devices puissent être plutôt que de simples outils de quantification des outils permettant d'emmener le patient vers un nouveau soi. Comment dès lors utiliser, insérer les objets connectés dans nos pratiques pour avoir une véritable action sur le mode de vie du patient atteint d'une maladie chronique.

Quels sont les avantages que peut apporter un objet connecté à une procédure médicale ?

L'objet connecté dans le cadre des pathologies chroniques peut intervenir à plusieurs moments, d'une part dans la prévention d'apparition de maladies et d'autre part, une fois l'installation d'une maladie ou d'un état de santé particulier, il peut aider à construire un mode de vie plus adapté. Nous sommes par exemple en train de travailler sur des objets connectés qui s'adressent aux patients pré-diabétiques pour éviter qu'ils développent une pathologie diabétique de type 2. Mais, en l'occurrence, nous intégrons cet objet au sein d'un écosystème de soin complet. En plus de la santé du patient, éviter la survenue d'une pathologie invalidante permet des économies considérables en termes de dépenses de santé. On compte ainsi aujourd'hui 350 millions de diabétiques au monde, mais surtout 315 millions de pré-diabétiques qui seront les diabétiques de demain. D’autre part, si la maladie est déclarée, nous pouvons accompagner le patient. Dans le cas par exemple du suivi post-opératoire de patient atteint d'hyper-obésité, la présence d'un outil constamment présent peut s'avérer un réel atout. Ce qui permet d’inscrire les soins dans une durée longue (plusieurs années) mais peut offrir aide et interaction au patient tout en pouvant alerter celui-ci ou les médecins en cas de danger.

Quels sont les freins qui empêchent encore la généralisation de procédés similaires dans les autres secteurs médicaux, notamment sur des sujets comme la numérisation des dossiers médicaux ?

Deux éléments vont se révéler clés pour l'avenir des objets connectés. D'une part, il s'agira pour les pouvoirs publics de réussir à mettre en place une réglementation et une structure qui fasse l'unanimité auprès des médecins et patients en termes de sécurisation des données médicales personnelles. L'enjeu numéro 1, cependant, est celui de la médico-économie. Il va falloir être à même de démontrer auprès des organisations susceptibles d'y investir, État comme assureurs par exemple, que l'objet connecté n'est pas un gadget mais apporte une réelle valeur ajoutée au traitement, au sein de la stratégie de prise en charge du patient. Ce n'est qu'une fois passé cet obstacle que pourra se généraliser leur utilisation au sein des offres thérapeutiques.