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Peut-être pourrions-nous, en ce jour de commémoration d'une tragique victoire, en hommage à nos Anciens, soldats citoyens que des "princes" avaient envoyés sur un front dont ils ne reviendraient pas, méditer ces lignes de Machiavel, extraites de L'Art de la guerre :
N'avez-vous pas chez vous un proverbe qui vient à l'appui de mon opinion ? "La guerre fait les voleurs, et la paix les fait pendre." Lorsqu'en effet un individu qui vivait uniquement de la guerre a perdu ce moyen de subsister, s'il n'a pas assez de vertu pour pouvoir se courber, en homme d'honneur, sous le joug de la nécessité, il est forcé par le besoin à courir les grands chemins, et la justice à le faire pendre.(...) Permettez-moi d'achever le développement de mes deux propositions : l'une, qu'un honnête homme ne peut embrasser, pour sa profession, le métier des armes : l'autre, qu'une république ou des royaumes sagement constitués ne l'ont jamais permis à leurs citoyens ou à leurs sujets. Je n'ai plus rien à dire sur la première de ces propositions ; il me reste à vous entretenir de la seconde.(...) Tant que le république se maintient pure, jamais un citoyen puissant n'entreprit de se servir de la profession des armes pour maintenir pendant la paix son autorité, renverser toutes les lois, dépouiller les provinces, tyranniser sa patrie et tout soumettre à sa volonté. Jamais un citoyen des dernières classes du peuple n'osa violer son serment militaire, attacher sa fortune à celle des particuliers, braver l'autorité du Sénat, et concourir à des attentats contre la liberté, afin de pouvoir vivre en tout temps de son métier des armes. Les généraux, dans ces premiers temps, satisfaits des honneurs du triomphe, retournaient avec plaisir à la vie privée. Les simples soldats déposaient leurs armes avec plus de plaisir encore qu'ils ne les avaient prises et reprenaient leurs occupations accoutumées, sans avoir jamais conçu le projet de vivre du produit des armes et des dépouilles de la guerre.(...) Un Etat bien constitué doit donc ordonner aux citoyens l'art de la guerre comme un exercice, un objet d'études pendant la paix ; et, pendant le guerre, comme un objet de nécessité et une occasion d'acquérir de la gloire, mais c'est au gouvernement seul, ainsi que le pratiqua celui de Rome, à l'exercer comme métier. Tout particulier qui a un autre but dans l'exercice de la guerre est un mauvais citoyen ; tout Etat qui se gouverne par d'autres principes est un Etat mal constitué.Machiavel 1469-1527 L'art de la guerre Livre premier.