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Juste mon regard

Publié le 11 novembre 2013 par Gentlemanw

Ce matin, levé tôt, une envie rare de croquer la vie, les médicaments ne me clouent pas dans le nuage rose habituel, celui qui cache mes douleurs, celui qui avale mes doutes, du moins pour l'avatar vu par les autres. 

Ce matin, chose rare, je ne vit dans un corps qui se dissocie de moi, là où parfois je souffre mais dans un silence total, en moi, au plus profond de moi, sans avoir ni à l'exprimer, ni même à le montrer, la médecine m'emprisonne dans un dédoublement qui pourrait rendre fou, mais le docteur m'a confirmé que ce mal-là est mieux que la chute suicidaire de la dépression.

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Je me suis levé, j'ai marché vers la porte, j'ai pu sortir, partir dehors, marcher sur des trottoirs vides sous la pluie, sans parapluie, en contact direct avec le monde que je ne voyais que depuis ma fenêtre, et encore quand j'avais encore envie de le voir, moins sombre. Là tranquillement, je suis allé au marché, vers la foule, un univers inconnu depuis des mois, des années que je suis vampirisé par ce mal, depuis que je me bat pour le sortir de moi, une pieuvre géante qui aspire mon énergie. 

Là devant moi, elles sont là, des personnes, des adultes et leurs enfants, des cris, des paroles, des marchands, des fruits et légumes, un souvenir, puis deux et tant d'autres. Les odeurs viennent à moi, mon cerveau sourit de tout cela. Parfums et arômes, je me cale sous cette halle, je vois la pluie au dehors, la vie au dedans. Un miracle.

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Je marche, je prends mon temps, je suis là, surpris d'être vraiment à cette place, je pose ma main, une chaise, mes jambes se relâchent, un tourbillon. UN main se porte vers moi, elle me soutient.

Qui-suis-je ? Je me sens perdu, au milieu d'un univers qui m'a vu grandir, les souvenirs m'étourdissent, trop d'informations peut-être. Assis, un peu pâle d'après les mots des autres, un verre d'eau. Je reste silencieux, un ange vient vers moi, non une infirmière, non .. je ne sais plus.

Assis je le suis toujours, ils ne sont plus là, le vide, un espace plus neutre, plus blanc, une fenêtre, des arbres dehors, je n'ai pas bougé, mon verre est toujours dans ma main, mes médicaments dans ma poche, oubliés volontairement, pour ressentir mon corps, voir dehors, voir plus loin, apercevoir celles que j'aimais, vivre avec certains souvenirs d'odeurs, de cuisine, de grands-mères, de ma mère en train de peindre, des femmes que j'ai aimé. Un flot trop rapide, où sont mes filles ?

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Je me souviens maintenant, j'ai choisi d'être là, pour les protéger, pour ne pas m'exposer à leurs regards, moi, malade, affaibli, rongé par ce mal que je n'arrive plus à chasser seul. Je lève la tête, il pleut dehors, il fait peut-être froid, je ne sais pas. Je ne vais pas bien.

J'avais tant envie de faire la cuisine, d'inviter des amis, la famille, mais ce monde est trop loin pour mon regard. Je souffre, je pleure.

Nylonement


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