C'est une bien belle journée qui s'achève pour moi à Aoste. Me voilà donc entre en Italie, le 4e et dernier pays de cette Via Francigena. Un peu comme une longue dernière ligne droite vers Rome qui commence.
Mais c'est bien du côté suisse que je me suis réveillé, dans le beau chalet de Philippe et Françoise. Un splendide petit déjeuner, face aux montagnes enneigées, nous attendais. C'est que chez Philou, qui reste à mon sens un des plus forts trailer que l'on ait vu, et qui est aussi la modestie incarnée dans un style de vie proche de la nature et de la montagne, avec un petit côté rebelle plutôt inédit en Suisse, les produits sont bons et sains.
Après avoir remercié nos amis, nous repartons Guy et moi en direction de l'autre vallée, vers Bourg Saint Pierre, où nous avons stoppé notre marche hier soir.
Parvenu là, nous n'avons plus qu'à entamer notre ascension vers le Grand Saint Bernard. Ce col reste le point culminant de la Via francigena, le passage clé. Cette étape apporte aussi une ambiance vraiment montagne, surtout aujourd'hui avec la neige, à ce parcours, ce que le passage pyrénéen, même si il est très agréable, ne donne pas au Saint Jacques.
Car nous nous élevons vite vers les hauteurs et le monde des glaces et des roches. Certes, le tracé n'a rien de bien compliqué et cela nous permet de profiter encore davantage de la vue et des lieux.
Le soleil a décidé de nous accompagner et c'est vraiment par une météo splendide que nous progressons vers le col.
Nous trouvons la neige aux alentours de 1900 mètres d'altitude. Entre la route et de petits bouts de sentiers, nous jouons entre les espaces presque libres de neige et les traces laissés par quelques raquettes, en prenant bien garde aux plaques de verglas et à ne pas trop nous enfoncer. Guy, en bon jurassien, connaît parfaitement l'élément. Je le suis donc en parfaite confiance.
Nous grimpons vite, en doublant même quelques randonneuses qui se rendent à l'hospice pour y passer quelques jours dans la sérénité des lieux. Nous ne ferons qu'y passer mais ce lieux restera un moment fort de mon voyage.
L'hospice est bientôt en vue, au bout du dernier virage. Stefano, de Mandala Tour, mes partenaires italiens, une agence spécialisée dans le trekking et l'organisation de trails par étapes (dont le Volcano Trail et l'Amalfi coast) nous attend la avec son copain Alberto, un trailer valdotain de Pont Saint Martin.
Ça me fait bien plaisir de les retrouver içi, dans cet endroit vraiment majestueux aujourd'hui et qui marque vraiment une nouvelle étape dans ma pérégrination. C'est aussi vraiment gentil à eux de venir ainsi me souhaiter la bienvenue en Italie.
Nous nous arrêtons un instant dans l'hospice pour boire un thé et visiter, en compagnie d'un des six chanoines qui résident en permanence dans les lieux, l'église et la crypte. C'est vraiment curieux de voir une belle église à cette altitude et dans un lieux aussi sauvage, surtout quand la route est fermée à la circulation.
Nous entamons, après cette belle visite, notre descente. Je suis donc en Italie maintenant! Et du côté italien il a un peu neigé aussi et le vent est présent. Mais après nous être un peu plus enfoncé que sur l'autre versant nous parvenons aussi un peu plus vite à la limite de la neige, aux alentours des 2100 mètres d'altitude. Ce sera je pense la dernière neige de mon parcours.
Un parcours qui va sans doute changer un peu de rythme en Italie: comme ici à partir de la fin de la descente du col proprement dit, juste avant d'arriver au premier village de Saint Rémi des Bosses, je vais y bénéficier d'une assistance que je ne peux pas refuser! Stefano a en effet garé là sa voiture et quand il me propose de malleger de mon sac je ne refuse pas.
Nous nous arrêtons déjeuner un peu plus loin. Guy repart en voiture avec Stefano et je poursuis la descente vers Aoste avec Alberto. Le chemin est agréable et livre de belles vues sur la vallée et offre à nos regards de belles échappées vers les cimes. Ça descend, remonte parfois un peu, traverse de nombreux villages, et allégé, je ne peux m'empêcher de courir sur ces sentiers qui s'y prêtent.
Un peu plus loin, nous disons au revoir à Guy qui s'en retourne par le bus de l'autre côté. C'était pour moi un grand plaisir d'avoir un tel ami à mes côtés durant ces passages du Jura et des Alpes.
Nous trottinons à bonne allure avec Alberto, qui m'apprend qu'il est avocat à Milan mais qu'il n'est pas sûr de vouloir faire ça toute sa vie, et me raconte aussi cette tradition valdotaine des combats de vaches noires dont m'avait parlé Philippe hier pour le valais. Il s'agit d'une race de vache qui se livre à des combats de "poussées de corne" pour savoir laquelle est la plus forte, de façon naturelle. Les paysans ont ensuite organisé des combats qui s'étendent même aux trois pays (Suisse, Italie et France) où ces vaches sont élevées. "Ici l'éleveur de la championne jouit d'un grand prestige, mais si je raconte ça à Milan personne ne me croit..." s'amuse Alberto.
Nous croisons souvent Stefano, qui nous prend en photo et suit notre descente. Aoste se profile finalement assez vite. La descente est tout de même assez raide et je dois prendre garde à ne pas me laisser griser par ce changement de rythme. Mais mes jambes me disent vite le tempo à ne pas dépasser.
La place de l'hôtel de ville accueille nos dernières foulées du jour. Après cette belle étape, un bon repos nous attend dans une chambre d'hôte du centre, chez Sara, bien agréable, et un excellent repas aussi. La cuisine de l'osteria da Nando est fine et excellente. Et tout ça nous est en plus offert par la région Val d'Aoste qui a été séduit par le projet! Voilà de quoi démarrer au mieux ma cavalcade en Italie sur la Via francigena!